5 partenaires. L’initiative se nomme « Cap décarbonation » et rassemble dans une démarche commune cinq industriels des Hauts-de-France : Eqiom, Lhoist (Chaux et Dolomies du Boulonnais), Air Liquide, Dunkerque LNG et RTE.
L’objectif de l’initiative est de « décarboner » l’industrie en captant 1,5 million de tonnes de dioxyde de carbone sur les sites émetteurs, en le transportant et en le stockant « définitivement ». Elle s’inscrit dans les ambitions au niveau européen et français d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050.
Une concertation préalable a eu lieu sous l’égide de la CNDP dont le rapport permet de mieux comprendre la démarche des industriels dont deux sont des « gros » émetteurs de CO2.
3 projets. « Cap décarbonation » se décline en trois projets complémentaires :
- la phase 2 du programme K6 sur la cimenterie de Lumbres (Eqiom),
- le projet CalCC sur l’usine de production de chaux de Réty (Lhoist),
- le projet d’Artagnan avec les canalisations de transport de CO2 (Air Liquide) et le terminal CO2 sur le port ouest de Dunkerque (Dunkerque LNG).
1 objectif. Il faut retenir que la production du béton et de la chaux produit intrinsèquement du CO2, le capter avant son émission dans l’air est une solution de « décarbonation » de ces activités. Les industriels cherchent, par l’innovation, à séquestrer le CO2 produit à la source.
Deux gros émetteurs de C02
« Le projet Cap décarbonation recouvre trois étapes, précise le rapport publié à l’issue de la concertation préalable. La capture du CO2 sur les sites émetteurs de Lumbres et de Réty, son transport via une canalisation d’une longueur d’environ 80km vers une installation portuaire, à construire à proximité du terminal méthanier à Loon Plage, son transfert pour séquestration dans les couches géologiques profondes de la mer du Nord. A chacune des trois étapes, sont associées des opérations de calibrage, c’est-à-dire de préparation physique du CO2 afin d’optimiser sa pureté et de faciliter son transport. Pour la cimenterie et la fabrique de chaux, un renforcement de la puissance disponible s’impose, un apport d’oxygène est nécessaire à Lumbres ».
A l’origine du projet, il y a les deux industriels (Eqiom et Lhoist) qui sont les deux gros émetteurs de CO2 par la nature même de leurs activités. Les émissions de CO2 pourraient être réduites à hauteur de 87% pour la fabrication de chaux et 91% pour celle du ciment.
Air Liquide s’est associé au projet en raison « de ses compétences spécifiques et de la localisation de son unité de production de divers gaz industriels à Mardick ».
Dunkerque LNG est un autre partenaire car pour exporter le CO2 jusque dans les couches géologiques en mer du Nord, la mise à disposition d’un équipement portuaire est nécessaire.
RTE a rejoint la démarche compte tenu des besoins accrus d’électricité à chaque étape et de la nécessité de renforcer le réseau.
Les coûts. Selon le rapport de la concertation préalable, le montant des investissements est :
- pour K6 150 millions d’euros,
- pour CalCC 160 millions d’euros,
- pour d’Artagnan 220 millions d’euros
- Total : 530 millions d’euros.
Le calendrier. Comme le projet dans son ensemble bénéficie d’aides financière d’un programme européen, « le calendrier est contraint », indique le rapport. Selon l’engagement pris après la délivrance d’une aide du fonds Fit for 55, le captage et l’exportation des premières molécules de CO2 devront être opérationnels avant la fin de l’année 2027. L’enquête publique pourrait avoir lieu « dans les prochains mois ». La décision d’investissement pourrait être prise fin 2024. Les travaux de construction sont prévus entre 2025 et 2027, pour une mise en service fin 2027.
De nouvelles installations sur le terminal méthanier
La dernière « lettre d’information » du terminal méthanier a évoqué la participation de Dunkerque LNG et les installations à prévoir. « Dunkerque LNG est impliqué dans le terminal CO2 du projet d’Artagnan. Il comprend deux composantes : un réseau de canalisations de transport du CO2 capté par les sites émetteurs vers Dunkerque, développé par Air Liquide, et la construction d’un terminal maritime pour l’export de CO2 sur le port de Dunkerque, développé par Dunkerque LNG et Air Liquide », explique Pierre-François Sorato, responsable en charge du développement du terminal. Le terminal CO2 réceptionnera le CO2 capté sur les sites de Lumbres et de Réty et le conditionnera en vue de son expédition vers des sites de séquestration en mer du Nord. Il sera implanté à l’avant-port ouest, et plus précisément sur la plateforme de l’ancienne base vie de construction du terminal méthanier, limitant ainsi l’impact sur les espaces naturels vierges. Les installations du terminal CO2 permettront de liquéfier et de réduire la pression du CO2 qui sera ensuite stocké temporairement dans des réservoirs, avant de pouvoir être chargé dans des navires, semblables à des méthaniers, mais dix fois plus petits. Dans cette perspective, une nouvelle jetée longue de 200 mètres sera créée au sein du terminal ».
« Au niveau territorial, le bassin industriel dunkerquois et plus largement celui du PMCO (pôle métropolitain de la Côte d’Opale) compte près de 500 entreprises industrielles qui émettent plus de 20% des émissions nationales des gaz à effet de serre d’origine industrielle, rappelle le rapport. C’est dans ce contexte que la communauté urbaine de Dunkerque a mis en place la démarche DKarbonation qui porte sur plusieurs projets : autoroute de la chaleur, électrification des process… L’adhésion au dispositif national ZiBaC apporte des moyens financiers complémentaires pour accélérer les transitions en cours ».