Lors de l’assemblée générale annuelle d’Entreprises fluviales de France (E2F), organisée le 6 juillet à Paris, une table ronde a eu pour thème « quelle vision à 10 ans du transport fluvial ? ».
Pour Thierry Guimbaud, directeur général de Voies navigables de France (VNF), les évolutions du fluvial sont déjà à l’œuvre mais l’une des avancées récentes pour l’établissement et le mode est la signature du contrat d’objectifs et de performance (COP) fin avril 2021. Comme il en avait déjà fait part dans un entretien à NPI : « Ce contrat est novateur. Il n’y en avait jamais eu entre l’Etat et VNF. Au-delà des objectifs de progression en termes de trafics, ce sont des ambitions pour le réseau, les infrastructures, les services. C’est une trajectoire d’investissement avec un budget qui a déjà augmenté ces dernières années passant de 150 à 300 millions d’euros. C’est une réorganisation et une modernisation de l’établissement avec notamment la téléconduite, l’automatisation ».
Faire en sorte que le fluvial soit mieux utilisé qu’aujourd’hui
Stéphane Raison, directeur général de Haropa Port, a pris la parole pour souligner le nouveau nom des trois ports suite à leur intégration : « Grand port fluvio-maritime de l’axe Seine, ce n’est pas un hasard ».
Selon lui, « un lien extrêmement fort est à créer avec le fluvial pour desservir la région parisienne et le Nord de l’Europe ». Le constat est que la logistique des ports du Nord de l’Europe vers le Bassin Parisien est essentiellement routière et se concentre à l’Est de Paris. « Il faut revoir cela. Ports de Paris, l’une des composantes de Haropa, porte des projets importants à l’ouest de la capitale », sur lesquels il faut capitaliser, « pour faire en sorte que le fluvial soit mieux utilisé qu’aujourd’hui ».
Il a cité le projet PSMO à Achères, le site de Limay-Porcheville où Ikea sera présent avec un entrepôt à partir de 2026 et la volonté d’utiliser la voie d’eau, Gennevilliers et le projet Green Dock. Il a rappelé les 130 barges fluviales au départ d’Anvers à comparer aux 10 qui partent du Havre.
Dans ce port, la desserte fluviale de Port 2000 (« chatière ») sera construite pour la fin 2023 ou le début 2024.
Concernant la mission confiée au préfet François Philizot par le ministre chargé des transports sur la « facturation des prestations de manutention fluviale dans les ports maritimes », pour Stéphane Raison : « L’harmonisation des coûts de manutention concerne l’axe Seine mais aussi celui de Rhône-Saône-Méditerranée. C’est un sujet à mener avec les manutentionnaires et tous les acteurs de la chaine logistique, l’autorité portuaire jouera son rôle ».
Les objectifs de décarbonations ne sont pas oubliés avec l’électrification des quais le long de l’axe Seine avec 13 bornes déjà en place et le déploiement de 70 autres d’ici 2024-2025.
Etre inventif
Matthieu Blanc, directeur métier fluvial de CFT/Sogestran, a relevé « la dynamique » lancée avec la mission du préfet François Philizot sur les coûts de la manutention fluviale qui est l’une des priorités du groupe, lâchant : « La donne peut changer ».
Il a rappelé le projet hydrogène mené par le groupe Sogestran avec le Zulu 6 attendu pour la fin de cette année 2021 sur la Seine.
Il a mentionné que les groupes Cemex et Lafarge conduisaient, eux aussi, des projets de bateaux à l’hydrogène.
Pascal Rottiers, président du collège « artisans » d’E2F a souligné l’importance de l’ensemble du réseau quel que soit son gabarit pour les activités fluviales. Cette organisation représentative de la filière va participer à la concertation sur les niveaux de services selon les itinéraires prévue par le COP et à conduire par VNF avec l’ensemble des parties concernées d’ici la fin 2022. Pour cela, « E2F avec Agir pour le fluvial va réaliser une étude pour identifier les sections qui sont indispensables sur le petit gabarit pour les professionnels et les activités et où des offres de transport seront proposées ».
Il a mis en avant « la convergence entre les activités marchandises et touristiques, quand les bateaux des uns passent, ceux des autres aussi ».
Pour lui, « il faut une taxe carbone » qui peut jouer un rôle pour amplifier la décarbonation des transports. « Il faut gratifier, bonifier le choix « vert » d’un chargeur ».
L’innovation au sens large constitue un autre point important pour le développement du fluvial à l’avenir, selon lui : « Il faut faire évoluer nos offres et nos services, être inventif ». Cela concerne les horaires de navigation, des « contenants » innovants, les marchandises transportées (plus seulement du vrac, des céréales ou du BTP).
Frédéric Aviérinos, président du collège « tourisme » d’E2F, a rappelé l’arrêt des activités touristiques pendant de longs mois et le redémarrage tout récent, par exemple, pour les croisières fluviales avec hébergement : « Pour l’ensemble des activités touristiques fluviales, la reprise sera lente et progressive, elle prendra du temps. Nous avons été très soutenu par l’Etat ce qui a évité la casse. Il ne faut pas cesser immédiatement de soutenir les entreprises, il faut continuer à les accompagner pour sortir de la crise ».
Pour lui, les entreprises du tourisme fluvial sont mobilisées pour la reconquête de la clientèle, se lancer dans de nouveaux marchés et activités, de nouvelles destinations. Elles n’oublient la transition énergétique qui nécessite toutefois d’importants investissements et financements de leur part et sur lesquels elles ont besoin d’éléments concrets.