Le signal envoyé est rarement une bonne nouvelle. Il indique gros temps, baisse des volumes, surcapacité et sinistrose. Pareille situation n’avait plus été observée depuis le 4 avril 2020 lorsque, au plus fort de la crise, plusieurs porte-conteneurs avaient été pris en flagrant délit de passage par le cap de Bonne-Espérance.
Le canal de Suez, raccourci avantageux pour les navires reliant Asie et Amérique du Nord mais surtout Asie et Europe, a toujours été contournable par le cap de Bonne Espérance. Mais le point de passage à la toute extrémité de l’Afrique du Sud n’est plus emprunté que par les navires aux dimensions supérieures ou pour quelques flux.
Il est plus rare d’y croiser des porte-conteneurs, toujours pressés, qui préfèrent l’isthme de Suez, voie royale de la navigation mondiale depuis que l’Asie du Sud est devenue l’usine du monde. Sauf en cas de circonstances exceptionnelles comme le fut l’ère covidienne. À l’époque, toutes les conditions s’y prêtaient: la faiblesse historique des prix du pétrole, la surcapacité de l’offre de transport, une demande qui faisait grise mine…
Si le contournement de l’Afrique allonge le trajet de quelque 6 000 miles nautiques, selon les points de départ et le temps de transit (entre une et deux semaines de plus) suivant la vitesse de navigation, il permet d’économiser les droits de passage qui, selon les tonnages, sont estimés entre 500 000 et 1 M$ par navire. Alphaliner a récemment identifié une douzaine d’échappés du peloton. « La plupart des détournements ont été effectués par des navires de THE Alliance », dont sont membres Hapag-Lloyd, ONE, HMM et Yang Ming.
Sur le plan financier, le détour est actuellement judicieux avec la tonne de carburant IFO 380 à 400 $ la tonne. Selon les calculs d’Aphaliner, « un grand navire, efficient sur le plan écologique, naviguant à 16 nœuds, ne consommera que quelque 120 t par jour. Cela revient à environ 1 100 t pour le kilométrage supplémentaire, soit 440 000 $ ». Et à 10,5 nœuds, la consommation sera limitée à 70 t/j, soit 392 000 $.