La plateforme d'analyse de marché des tarifs de fret maritime et aérien promet une « année de relations passionnantes » entre le transporteur, le chargeur et le transitaire. L’approche souple sera probablement la meilleure façon de naviguer dans cet environnement de taux dynamiques, indique-t-elle.
« Alors que nous entrons dans une période de négociation clé, il faut s'attendre à de nouvelles hausses de tarifs sur le marché des contrats à terme au cours des prochains mois », notait déjà en octobre, Patrik Berglund, PDG de Xeneta, particulièrement cinglant. « Les transporteurs ont géré la capacité avec une réelle expertise, maintenant les taux contractuels et poussant les chargeurs sur le marché spot, là où les compagnies peuvent obtenir un meilleur rendement. »
L'année 2021 a démarré sur les chapeaux de roue pour les contrats de fret maritime à long terme, selon le dernier rapport de la plateforme d'analyse de marché des tarifs de fret, dont l’indice XSI est un baromètre en temps réel pour les conteneurs à l’export. L’indicateur affiche ce mois-ci l'une des plus fortes hausses de taux mensuels (+ 5,9 %) jamais enregistrées.
« Le mercure est à un pic, avec des ports congestionnés, un manque d'équipements et une demande déséquilibrée qui mettent les compagnies de transport par conteneurs dans une position de force inégalée », indique aujourd’hui le PDG de Xeneta.
Horlogerie cassée
Un échevêtrement de causes expliquent en effet la situation. Et elles sont désormais largement connues, rebattues et partagées, y compris par le presse généraliste qui a fini par s’intéresser au sujet. La pandémie a complètement désorganisé le marché de l’offe et la demande, brisé le cycle de la chaîne d'approvisionnement et son fonctionnement. La pénurie de conteneurs d'expédition en Chine, et dans d'autres régions d'Asie, est criante alors que les usines tournent à plein régime pour répondre à une demande en biens plus importante que prévue dans les principaux centres de consommations mondiaux, en premier lieu les États-Unis. Il faut y greffer des accumulations de stocks chez les détaillants en anticipation de maintes craintes, rebond du virus, émergence de nouvelles souches, retour du verrouillage généralisé des économies, etc.
La congestion des ports américains, comme Los Angeles/Long Beach où 30 à 35 navires attendent d’accoster en ce moment, empêche les conteneurs d’être renvoyés en Asie rapidement. Les boîtes ne sont donc pas là où elles doivent être mais bloquées là où elles ne sont pas désespérément nécessaires. En conséquence, les prix grimpent toujours plus haut pendant que les entreprises se disputent le peu de conteneurs en circulation.
Négociations difficiles
Les taux spot élevés observés sur les principales voies commerciales au cours des derniers mois « se sont traduits par des accords contractuels, ce qui a mis les chargeurs du monde entier sous pression ». Pour rappel, entre 65 et 75 % du fret relèvent des négociations contractuelles. En un an, le SCFI aura augmenté de 202 %. Les chaînes logistiques ont été extrêmement perturbées. Les clients sans contrats fixes ont peiné à trouver de l’espace. « Ils en connaissent les règles. Quand le marché est à la baisse, ils en tirent profit et quand il est à la hausse, ils en tirent moins profit », confiait au JMM le responsable des lignes chez CMA CGM.
Turbulences
L’indice de Xeneta reflète ces turbulences dans les importations et exportations sur les principaux corridors. En Europe, les importations ont enregistré leur plus forte augmentation mensuelle jamais enregistrée, avec une hausse de 19,3 %, principalement due aux flux en provenance d’Asie. Le déséquilibre entre l'offre et la demande est clairement visible du côté des exportations, avec une baisse de 1,9 %, soit 1,6 % par rapport à janvier 2020.
En Asie, les exportations ayant augmenté de 15,1 %, tandis que les importations ont chuté de 4,6 %, soit une baisse de 11,1 % par rapport à la même période l'année dernière. L'indice de référence des importations américaines s’est montré moins volatile dans l'ensemble, avec une hausse de 0,7 %. Au moins certains importateurs américains semblent avoir été en mesure de compenser les fortes hausses sur la zone transpacifique par des baisses sur d'autres échanges d'importation. Toutefois, les exportations ont chuté de 6,2 %.
Le PDG de Xeneta ne conseille pas forcément aux chargeurs de s'engager à 100 % dans des contrats à long terme à des tarifs toujours élevés : « une approche souple est probablement la meilleure façon de naviguer dans cet environnement de taux dynamiques en utilisant les toutes dernières connaissances du marché pour prendre les meilleures décisions commerciales et saisir les opportunités chaque fois que cela est possible » vend le dirigeant qui promet, mi figue-mi raisin, « une relation commerciale passionnante ».
Adeline Descamps