Avec une croissance de 17,8 % soit 1,2 Mt supplémentaires, par rapport à la précédente, la campagne d’exportations maritimes 2021/2022, considérée parmi les éditions de « haut niveau » aura été soutenue en permanence. Quelque 3,4 Mt ont été expédiées vers les marchés étrangers au premier semestre 2022 (44 % du total) dont 370 000 t sur le seul mois de juin. Durant cet exercice, les quatre opérateurs rouennais spécialisés – Groupe BZ, Simarex, Sénalia et Invivo-Soufflet –, ont sorti 5,3 Mt de blé tendre et 2,3 Mt d’orges, dont un flux record de 746 000 t d’orge de brasserie.
Le volume d’orges exportées résulte d’une forte demande chinoise. Par ailleurs, les récoltes affectées par des précipitations abondantes et des rendements globalement en baisse dans le Nord de l’Europe ont conduit l’Allemagne et les Pays-Bas a importer des orges de brasserie françaises. Tirant le meilleur parti de l’approfondissement du chenal de la Seine, les terminaux rouennais ont notamment traité 69 grands navires (panamax et plus) dont un chargé de 54 200 t de blé, deuxième plus fort tonnage jamais réalisé en la matière.
La Chine, principal client
Avec plus de 2,6 Mt de céréales (record) – 1,28 Mt de blé tendre et 1,34 Mt d’orges soit 58 % –, la Chine constitue le principal débouché des céréales « rouennaises » devant le Maroc avec 1,6 Mt. En raison de la situation en mer Noire, les achats de blé par l’Algérie ont vigoureusement repris (1,4 Mt) tandis que l’Égypte et la Tunisie ont aussi retrouvé le chemin de la France en fin de campagne.
Seul bémol, les flux vers l’Afrique de l’Ouest apparaissent en fort retrait à 400 000 t (près de 1 Mt lors de la campagne antérieure). Selon Haropa Port, « la qualité moindre du blé français, en raison des pluies de l’été 2021, explique ce recul significatif ». Selon l’autorité portuaire, la part de marché dans les exportations maritimes françaises de Rouen, « numéro un portuaire de la spécialité en Europe occidentale », s’élève à 50 % pour le blé tendre et 60 % sur les orges. « Ce qui démontre le haut niveau de performance de son offre et de ses opérateurs », indique le commuiqué.
Investissements en conséquence
Et les opérateurs continuent d’y investir. Sénalia a remis 7,3 M€ pour accroître la capacité des portiques de la presqu’île Elie et autant pour son siège social implanté à Rouen. Simarex a aménagé un parking pour fluidifier les flux de camions. Le silo Socomac du groupe Invivo-Soufflet a rallongé la bande de roulement des portiques pour disposer d’un linéaire de quai de 145 m.
Plutôt de bon augure dans la perspective d’une nouvelle donne géopolitique agitée. Animateur de la première édition du Rendez-vous de l’Axe Seine organisé à Rouen par Haropa Port et Seine Port Union sur le thème « Agro-industrie de demain pour répondre aux besoins d’aujourd’hui », le spécialiste des matières premières Philippe Chalmin, confirme que l’Ukraine est parvenue à sortir en grande partie les exportations de blé de sa campagne 2021/2022. Le fondateur du Cercle Cyclope, dont le rapport sur l'état et les perspectives des marchés mondiaux de matières premières est très demandé, s’attend en outre à une récolte russe record.
Pour l’économiste, ce n’est pas la pénurie qui menace le secteur. Mais bien plutôt les prix malgré une récente accalmie comparativement aux sommets « inouïs » qu’ils ont pu atteindre. La compétition entre ports n’en sera pas moins rude.
Robert Querret