Dans son dernier rapport hebdomadaire, le courtier maritime Clarkson Platou Hellas s’enthousiasme de voir le premier VLCC vendu depuis le début de l'année, « ce qui est encourageant pour l'avenir ». La fenêtre de tir est pourtant courte car les mois religieux du Ramadan approchant (fortement observé dans le sous-continent indien), l’activité devrait être à nouveau affectée. Le courtier n’est pas le seul à avoir noté que l’activité, en coma artificiel depuis le début de l’année, commence à s’animer.
Ces dernières semaines, les courtiers faisaient part d’une anomalie de marché : les chantiers manquent de tonnages alors que les conditions sont plus que favorables pour l’envoi à la casse. Dans certains segments du transport maritime, les vieilles unités, pour lesquelles les propriétaires ne sont pas disposés à supporter le coût de la mise en cale, feraient pourtant d’excellents candidats.
Tous les courtiers scrutent le segment des pétroliers où toutes les conditions de marché sont réunies pour envoyer les unités les moins efficientes, les plus énergivores, à la casse. Ces huit derniers mois, les tarifs des VLCC ont été égaux ou inférieurs au seuil de rentabilité et aux coûts d'exploitation depuis la fin janvier. Seuls les navires à la spécification écologique et équipés de scrubbers sont encore en mesure de couvrir les frais d'exploitation.
Le conteneur et le vrac sec sont actuellement portés par une incroyable dynamique haussière et les capacités manquent. Les propriétaires se refusent donc à condamner leurs vieilles unités pour profiter pleinement des vents favorables.
La paradoxale désaffection pour le recyclage
Entre 470 et 500 $
Les prix de l’acier sont à un point haut et ont progressé de plus de 30 % sur une base annuelle. Ils se situent actuellement dans la fourchette des 500 € la tonne de ferraille en Asie du sud-est, Bangladesh (490 $ pour les porte-conteneurs, 480 $ pour les pétroliers et 470 $ pour les vraquiers), Inde (500 $ pour les porte-conteneurs, 490 $ pour les pétroliers et 480 $ pour les vraquiers) et Pakistan, selon GMS, le plus important acheteur mondial de navires au comptant.
En revanche, les chantiers turcs sont bien en deçà de ce tarif : 260, 255 et 250 $. Clarkson Platou Hellas attribue cette situation aux décisions du président turc Erdogan qui a « choisi de manière inattendue de remplacer le gouverneur de la banque centrale du pays, ce qui s'est répercuté sur les marchés monétaires et a fait perdre à la lire jusqu'à 15 % par rapport au dollar américain ».
Allied Shipbroking constate aussi un frémissement sur le marché du recyclage des navires tout en relevant que la concurrence s’exacerbe entre les principales destinations du sous-continent indien. « Plus précisément, le Bangladesh reste en tête du classement et du marché le plus influent de la région, ayant conclu quelques unités à prix élevé ces derniers temps. »
Source : GMB
FSU sur le marché à terme
L'Inde, dont la compétitivité s’est renforcée grâce à de meilleurs fondamentaux de son économie, est sapé dans son redressement par une nouvelle série de mesures de confinement. En dépit d’offres de prix alléchantes, le Pakistan n’a pas réussi récemment à conclure des marchés.
GMS note par ailleurs qu’outre les VLCC, les FSU (Floating Storage Unit), navires du reste extrêmement difficiles à recycler en raison des quantités massives de boue à bord dont le nettoyage peut prendre plus de trois semaines, sont pourtant les plus concernés par le démantèlement. Les normes de travail, qui se sont resserrées dans le sous-continent indien, constituent un autre frein. « Par conséquent, les FSU se positionnent sur le marché à terme car aucun acheteur final n'est prêt à travailler/attendre sur un navire dont le délai de livraison est de deux mois, d'autant que les marchés sont actuellement en surchauffe et qu'ils ont toutes les chances de se refroidir à l'approche des mois de mousson », indique l’acheteur au comptant.