La tolérance « zéro Covid » décidée par Pékin a donné du fil à retordre à la logistique mondiale. La politique, qui consiste à verrouiller, au moindre cas détecté, conduit à des fermetures partielles de terminaux portuaires, dont on connaît l’importance stratégique pour l’approvisionnement mondial, mais aussi à des fermetures d'usines, qui menacent la production à l’échelle du monde. Yantian au printemps. Ningbo en été. Dalian à l’automne. Les trois ports chinois, ont démontré leur puissance de feu en 2021 tant leur indisponibilité temporaire a mis la planète portuaire sens dessus dessous.
Le troisième port à conteneurs mondial (30 MEVP) fonctionne à nouveau sur trois cylindres depuis la détection d’un foyer épidémique touchant une petite trentaine de personnes au sein d’une entreprise textile (Shenzhou International) implantée dans le quartier de Beilun, l'une des 19 zones portuaires qui abritent trois des terminaux à conteneurs stratégiques.
Les autorités locales ont pris des mesures d'urgence pour minimiser les impacts sur la logistique, notamment en délivrant des laissez-passer pour la circulation des camions, ainsi qu'en désignant des « voies vertes ». Mais un quart seulement de la jauge habituelle de chauffeurs routiers disposent des documents nécessaires pour entrer et sortir dans l’un des terminaux de Beilun. Les marchandises peuvent donc être difficilement évacuées.
Plusieurs routes sont en outre bloquées. Des entrepôts et usines ont également suspendu leurs expéditions et livraisons. L’annonce a provoqué un petit affolement auprès des grandes marques internationales de prêt-à-porter (Nike ou Adidas pourraient être affectées par ricochet). Selon un rapport de Reuters, 20 sociétés cotées en bourse opérant dans la province ont suspendu leurs activités. Il s'agit notamment de fabricants de batteries, de textiles et de produits pharmaceutiques.
A l’approche de la saison de pointe
Selon les données de la Lloyd's List Intelligence, 120 porte-conteneurs représentant 613 713 EVP étaient au mouillage au large de Shanghai et de Ningbo-Zhoushan le 4 janvier. Un niveau supérieur à celui observé mi-août, lorsque l’un des plus stratégiques terminaux de Ningbo a été contraint de fermer pendant quelques semaines suite à la détection d’un cas chez un docker.
L’événement survient alors qu’il s’agit de la saison de pointe pour les exportations avant le Nouvel An chinois et à moins d'un mois du début des Jeux olympiques d'hiver de Pékin. Des villes tombent les unes après les autres dans les restrictions, générant des effets de panique dans la chaîne d'approvisionnement. Xian, dans l'ouest du pays, est soumise à un confinement strict depuis quinze jours, tandis que Zhengzhou (12 millions d'habitants) a été assignée au dépistage à grande échelle après la détection de quelques cas. Un million d'habitants de Yuzhou, dans la même province que Zhengzhou, ont été sommés de rester à la maison après la survenue de trois cas asymptomatiques.
Selon un rapport de Goldman Sachs, les vaccins fabriqués par la société nationale Sinovac Biotech offriraient une protection limitée contre la variante Omicron, ce qui renforce encore davantage Pékin dans sa politique ultra stricte mais à double tranchant en surajoutant au chaos.
Les lourdes règles de quarantaine de la Chine contraignent en outre les marins chinois à observer des quarantaines jusqu'à sept semaines lorsqu'ils rentrent chez eux, tandis que les changements d'équipage pour les marins étrangers dans les ports chinois sont devenus très critiques.
Adeline Descamps