Les armateurs espagnols ont bataillé dur sur le sujet. En 2021, leur organisation professionnelle avait demandé qu’une telle stratégie soit mise en place. Il y a un an, à l'occasion de l'assemblée générale de l’association, Vicente Boluda, le président d’Anave, avait affirmé que l’Espagne avait besoin d’ « une politique nationale de la marine marchande ».
La profession s’est inquiétée à plusieurs reprises d’un manque de conscience au plus haut niveau de l’État de la situation et des enjeux du transport maritime alors que les défis s’accumulent (conjoncture, décarbonation, crise du pavillon national, concurrence étrangère, etc.).
Inspiré des exemples italien et français
En septembre 2022, lors de sa réception comme membre de l’Académie royale de la mer, le président de la compagnie maritime espagnole Balearia, Adolfo Utor, avait demandé à l’État « un engagement ferme avec l'adoption des mesures nécessaires pour que les compagnies maritimes espagnoles puissent rivaliser sur un pied d'égalité avec celles du reste de l'Union européenne ».
Les initiatives annoncées récemment en Italie et en France, accompagnées de financements substantiels (500 M€ et 300 M€ respectivement) ne sont pas passées inaperçues.
Tout juste revenu de Hong Kong où un accord de partenariat a été signé entre la division remorquage de son groupe et Hutchison Ports, Vicente Boluda a salué l’annonce à l'occasion de leur rendez-vous annuel.
Alerte sur la compétitivité
La décarbonation figure au premier rang des préoccupations. Anave avait pris les devants en présentant, en avril 2023, au ministère des Transports, la « Proposition de programme pour la transition du transport maritime espagnol vers une économie à zéro émissions nettes ».
Vicente Boluda a expliqué que « cette proposition vise à contribuer à garantir que les normes adoptées par l'UE se traduisent par une réelle réduction des émissions de gaz à effet de serre de la flotte contrôlée par les compagnies maritimes espagnoles ».
Retour de la problématique du pavillon espagnol
Il a alerté à propos des « investissements importants » qui vont conditionner la compétitivité du secteur.
Le président d’Anave a également insisté sur le déclin accéléré du pavillon espagnol, le Registre spécial des Canaries (REC selon l’acronyme en espagnol), un sujet évoqué régulièrement, lors de chaque assemblée générale.
Des élections en arrière-plan
Les nouveaux navires enregistrés sont désormais inscrits dans d’autres pavillons européens et en 2023 sept navires ont quitté le REC en dépit de mesures prises pour enrayer l'érosion.
Dans son discours, David Lucas n’a pas évoqué la « réforme structurelle » sollicité par les armateurs espagnols tout en se déclarant ouvert aux propositions dans le cadre de l'élaboration de la stratégie, qu'il veut consensuelle.
Reste une inconnue qui n'est pas neutre : les élections législatives anticipées du 23 juillet. Tous les sondages indiquent une victoire de l’opposition de droite. Sa victoire ne devrait néanmoins pas remettre en cause le projet.
Daniel Solano