« L'année 2020 restera dans les mémoires comme l'une des plus étranges pour le transport maritime par conteneurs », pose le cabinet d’analystes Alphaliner. Le retournement de situation est saisissant. Il y a encore quelques semaines, les perspectives les plus sombres cueillaient les exploitants et propriétaires de flotte, encore assommés par la fièvre du Covid. La demande de navires atteint désormais des sommets alors que la deuxième vague tant redoutée n’est plus une option.
Pour l'instant, les transporteurs surfent sur une vague, reconnaît dans sa note hebdomadaire le cabinet d’analystes maritimes Alphaliner. « L'année 2020 restera dans les mémoires comme l'une des plus étranges pour le transport par conteneurs », s’étonne le consultant, qui rembobine en accéléré les phases de ces derniers mois : les perspectives qui s’annoncent sombres pour les transporteurs et les propriétaires de flotte ; le spectre de la diminution des volumes de conteneurs qui menace ; la guerre des profits pour laquelle ont opté les transporteurs en réduisant considérablement leur offre sur de nombreux itinéraires long-courriers via des fermetures de services, des fusions en boucle et des blank sailing à répétition…
« Puis l'inattendu s'est produit ». Alors que l’étau des restrictions liées au confinement se desserrait ici et là, « la demande a commencé à augmenter sans explication rationnelle à première vue. Cela a incité les transporteurs à reprendre les boucles suspendues et à organiser des boucles supplémentaires qui ont progressivement absorbé la plus grande partie de la capacité excédentaire. »
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Dislocation des marchés du fret aérien
La flotte inactive est en effet tombée à environ 430 000 EVP (1,8 % de la flotte mondiale), après avoir atteint un pic de 2,7 MEVP fin mai, soit 11,6 % de la flotte. Les taux spot et la capacité ont atteint des sommets en septembre. Même la Golden Week, semaine de congés payés début octobre, ne semble pas avoir affecté la demande.
Les raisons de cette reprise soudaine du transport maritime de conteneurs ? « Elles sont multiples : un effet de rattrapage, la dislocation des marchés du fret aérien au profit du transport maritime, une forte augmentation de la demande de produits médiaux et des gens qui dépensent plus pour des biens de consommation que pour voyager », répond le spécialiste des lignes régulières.
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Tonnages en défaut
Pour l’heure, la pénurie persiste dans les navires de la catégorie supérieure à 5 000 EVP, qui profitent aux propriétaires non-exploitants dont les taux d'affrètement montent en flèche. La situation est également devenue inhabituellement tendue pour le segment des 3 000 à 5 000 EVP, passe en revue Alphaliner. Seuls deux panamax classiques de 4 800 à 5 000 EVP sont encore libres d'emploi. « Cependant, ils ne sont donc disponibles qu'avec un préavis de quelques semaines ». Le segment de 3 000 à 4 000 EVP est aussi pleinement employé.
« Les transporteurs ont jusqu'à présent résisté à l'envie d'augmenter la vitesse de leurs navires pour accroître leur capacité de transport. Le faible coût du bunker permet de soutenir une telle option ». L’analyste veut voir, dans cette réticence à mettre les gaz, un changement de comportement : « la nécessité de réduire les émissions de CO2 fait son chemin ».
A.D.