Comme annoncé, le constructeur naval allemand Werften, propriété de Genting Hong Kong, s'est déclaré le 10 janvier en situation d’insolvabilité auprès du tribunal de Schwerin. Les négociations entre l’Etat allemand et la société-mère malaisienne (groupe Genting) n’ont pas permis de trouver un compomis sur les conditions de prêt pour maintenir ses activités. En ricochet, MV Werften (trois chantiers hérités de l’ex-RDA, tous en Poméranie occidentale, 2 000 personnes) mais aussi Lloyd Weft (Bremerhaven, 300 personnes) – que Genting souhaitait céder déjà depuis un temps selon les médias allemands –, ont déposé leur bilan.
Un fatal épilogue pour le constructeur naval allemand, qui avait été acquis en septembre 2015 par Genting Hong Kong, l’opérateur des compagnies de croisières Star Cruises, Dream Cruises et Crystal Cruises, lui-même filiale du conglomérat malaisien Genting. Spécialisé dans les paquebots, les chantiers navals de Wismar, Stralsund et Rostock ont particulièrement souffert en 2020 en raison de la mise à l’arrêt forcée de l’activité des croisières.
Des prêts qui se relaient
Confrontée à un manque de liquidités, le land de Mecklembourg-Poméranie Occidentale, où les sites sont implantés et emploient aujourd’hui 2 000 personnes, et 17 banques avaient alloués aux chantiers navals en juin 2020 des prêts relais totalisant 175 M€, qui devaient notamment lui permettre de relancer les activités après le confinement et d’achever le yacht d’expédition pour Crystal Cruises.
Pour autant, en août, le constructeur avait été contraint de suspendre les remboursements de ses échéances à ses créanciers.
Conditions de tirage du prêt
En juin 2021, le fonds de stabilisation économique du ministère allemand de l’Économie avait fini par voler à son secours. Il était question d’un prêt relais de 193 M€, d’une entrée au capital de l’Etat allemand à hauteur de 60 M€ et de 47 M€ de prêts supplémentaires.
Cet apport en cash devait sécuriser la construction du premier des deux très grands paquebots pour Global Dream. C’est cette aide, plusieurs fois restructurée (et donc revue à la hausse) qui fait l’objet d’un litige devant les tribunaux. Les négociations entre les deux parties prenantes sont dans l’impasse en raison des contreparties financières et garanties exigées par le gouvernement allemand à l’égard de Genting.
Le 7 janvier, dans une annonce boursière, Genting a volontairement suspendu ses actions. Dans le même temps, la direction de MV Werften a informé les employés qu'elle était dans l’incapacité de verser les salaires de décembre au risque de violer les conditions du prêt.
Restructuration nécessaire
« Le gouvernement a fait tout son possible pour éviter l'insolvabilité et sauver des emplois. Cependant, les propriétaires ont rejeté notre offre d'aide et la conséquence est l'insolvabilité » a déclaré le ministre de l'Économie Robert Habeck. Genting aurait soumis quatre propositions au gouvernement au cours des négociations, rehaussant à chaque fois sa participation financière, condition pour bénéficier du prêt. L’État allemand exigeait 60 M€. La maison-mère de MV Werften soutient qu’elle a déjà fourni 30 M€, somme qui, selon elle, suffisait pour remplir toutes les conditions de tirage d’une partie des financements. Mais qui lui avait été refusée.
Les responsables politiques allemands se sont engagés à prioriser le maintien des emplois et à assurer la livraison du Global Dream prévue cette année. Ils appellent désormais à une profonde restructuration de l'entreprise et notamment pour se réorienter vers l'industrie offshore, estimant que « la structure actuelle ne pouvait pas perdurer. »
Adeline Descamps