« Cet accord est une nouvelle étape dans le développement des technologies GTT en Chine. Yangzijiang a finalisé le processus de qualification en un temps record, les premières étapes de validation ayant débuté en mars 2022 », indique GTT, la société française, dont le savoir-faire – le transport d’un gaz liquéfié à -163°C – lui assure une conséquente part de marché mondiale dans son domaine. Entre 80 et 90 % des méthaniers en circulation dans le monde sont équipés de ses cuves tapissées d’un revêtement en alliage spécifique permettant de s’affranchir des réservoirs sphériques plombant le navire. Et sa technologie de confinement à membranes Mark III équipe aussi les réservoirs des navires qui utilisent le GNL comme carburant. Elle truste aussi une bonne part de ce marché.
Hormis au Japon, où les cuves Moss de son concurrent sont privilégiées, elle est très bien introduite auprès des constructeurs sud-coréens, historiquement spécialistes de la construction navale de méthaniers. Mais sur ce terrain aussi, les chantiers navals coréens sont de plus en plus rattrapés par les chantiers navals chinois, qui gagnent des parts de marché sur la construction de méthaniers et des navires alimentés au GNL comme en témoignent les nombreuses commandes de CMA CGM. La Chine est un marché important pour l’entreprise française.
Après les constructeurs Hudong-Zhonghua, Jiangnan et Dalian shipbuilding, qui utilisent déjà ses membranes spécifiques, Yangzijiang pourra donc y avoir recours. C’est le sens de l’accord qui vient d’être signé. Yangzijiang a d’ores et déjà obtenu (en juillet) une commande de quatre porte-conteneurs de 8 000 EVP de la compagnie singapourienne PIL dont la livraison est prévue en 2025. Ils seront dotés de la technologie de confinement à membranes Mark III « avec des caractéristiques qui faciliteront une éventuelle conversion des navires à l’ammoniac, offrant ainsi à PIL une plus grande flexibilité opérationnelle dans la perspective d’une évolution des réglementations environnementales », fait valoir la direction de GTT.
Ammoniac et hydrogène
En février 2021, l’entreprise a obtenu une AiP pour ses membranes « NH3 Ready » par Bureau Veritas. Ainsi le système III peut-il être, sans modification majeure de design, adapté au confinement éventuel de l'ammoniac pour les applications GNL carburant. GTT veut offrir aux armateurs une solution « à l’épreuve du temps », et ainsi un peu de visibilité alors qu’ils butent sur les technologies de substitution aux carburants conventionnels pour répondre aux futures évolutions réglementaires notamment sur le CO2. Savoir que le système est configuré GNL et ammoniac sécurise d’une certaine façon leurs investissements.
« Bien que nous soyons convaincus que le GNL est la solution de choix pour réduire les émissions des navires, nous devons prendre en compte le fait que l’ammoniac, provenant de l’hydrogène vert, pourrait permettre de réduire encore davantage ces émissions. En proposant un système compatible avec l’ammoniac, nous offrons aux armateurs la possibilité de prolonger considérablement la période d’amortissement des navires », justifiait alors Philippe Berterottière, le PDG de GTT, aux manettes depuis 2009 et reconduit en mai 2018 pour quatre ans.
Des commandes pour 68 méthaniers et 28 navires au GNL
Au 30 juin, la société d’ingénierie française avait engrangé un nombre dit record de 88 commandes pour des méthaniers et 38 pour des navires à propulsion GNL. Son carnet de commandes s’élevait ainsi à 229 unités dont 210 méthaniers et 68 pour les navires propulsés au GNL, majoritairement des porte-conteneurs. La plupart seront livrés entre le troisième trimestre de 2024 et le deuxième trimestre de 2027.
Par comparaison, en 2021, le fabricant, dont les systèmes permettent de stocker et de transporter le GNL en toute sécurité, avait reçu 68 contrats pour les méthaniers et 27 pour des navires au GNL.
Au coude à coude avec la Chine
Au cours des sept premiers mois de 2022, les chantiers navals sud-coréens ont ajouté plus de 11 Mt à leur carnet de commandes répartis en 204 navires, indique Clarkson Research. Cela représente 47 % du total mondial commandé jusqu’à présent alors que les chantiers navals chinois ont enregistré des contrats pour un peu plus de 10 Mt et 383 navires.
Pour la construction des méthaniers, cependant, la Corée du Sud détient toujours une part de 75 % des commandes (pour la période janvier-août). Les trois principaux constructeurs navals du pays – HHI, DSME, Samsung –, ont enregistré des contrats pour 83 des 111 navires commandés au cours de cette période d'une valeur totale de plus de 30 Md$, le prix moyen d'un méthanier étant actuellement négocié entre 235 et 240 M$.
Adeline Descamps