Nouvel incident de sabotage présumé d'un câble sous-marin, un pétrolier russe suspecté

pétrolier Eagle S

Le pétrolier Eagle S

Crédit photo ©Edsel Johnson/ MarineTraffic
Alors que l'enquête judiciaire du parquet suédois sur la rupture de deux câbles de télécommunication par un navire chinois dans les eaux suédoises en mer Baltique est en cours, la Finlande met en cause cette fois la Russie. Un pétrolier, qui opère potentiellement sous couvert de la flotte fantôme, est soupçonné dans la panne du câble électrique sous-marin EstLink 2.

Nouvelle affaire en matière de rupture de câbles sous-marins, quelques jours à peine après que le vraquier Yi Peng 3 ait été autorisé à reprendre la mer le jeudi 19 décembre après une inspection à bord. Ce navire, propriété de l'armateur chinois Ningbo Yipeng Shipping, était retenu depuis le 19 novembre sous la surveillance des garde-côtes suédois en raison de sa responsabilité présumée dans l'endommagement de deux câbles de télécommunication rompus en mer Baltique : l'Arelion, reliant l'île suédoise de Gotland à la Lituanie et; le C-Lion1 entre la Finlande à l'Allemagne.

Alors que l'enquête judiciaire sur ce dossier, conduite par l'Autorité suédoise d'enquête sur les accidents (SHK), est toujours en cours, une autre affaire éclate. La police finlandaise a ouvert ce 26 décembre une enquête pour « sabotage aggravé » visant un pétrolier potentiellement exploité sous couvert de la flotte fantôme russe, ces navires classés, enregistrés, immatriculés, exploités en dehors des normes officielles pour des opérations clandestines et des trafics illicites).

La flotte fantôme en cause

L'Eagle S, battant pavillon des îles Cook, est mis en cause par les autorités finlandaises dans la coupure du câble sous-marin EstLink 2 (liaison à courant continue entre la Finlande et l'Estonie), survenue le 25 décembre. La perturbation, sans conséquences pour l'alimentation des usagers, a été décelée par les opérateurs de part et d'autre, Fingrid pour la Finlande et Elering pour l'Estonie.

En route vers Port-Saïd, le navire a été arraisonné et escorté par un patrouilleur finlandais au large de Porkkala, à environ 30 km d'Helsinki, où il sera immobilisé un temps voire sa cargaison saisie si son implication est avéréd. Il avait chargé de l'essence sans plomb dans le port de Saint-Pétersbourg, a fait savoir Sami Rakshit, directeur général des douanes finlandaises dans le cadre d'une conférence de presse relayée par l'AFP. Les autorités finlandaises indiquent qu'elles disposent d'éléments (l'ancre), relevés par les gardes-frontières, lui permettant de lui imputer la responsabilité. Cet incident en rappelle un autre. En octobre 2023, un gazoduc sous-marin entre la Finlande et l'Estonie, le Balticconnector, avait été endommagé par l'ancre du porte-conteneurs New Polar Bear, enregistré à Hong Kong.

Affaire prise très au sérieux par l'UE et l'Otan

Le Premier ministre finlandais Petteri Orpo a considéré, lors d'une conférence de presse tenue ce jour. cet événement comme « très grave », sans incriminer spécifiquement la Russie à ce stade. « Les dommages causés aux infrastructures sous-marines sensibles sont devenus si fréquents qu'il est difficile de croire qu'il s'agit d'accidents ou simplement de mauvaises manœuvres maritimes, a indiqué le ministre estonien des Affaires étrangères, Margus Tsahkna, cité dans un communiqué. Traîner une ancre sur le fond marin peut difficilement être considéré comme un accident », a-t-il ajouté.

L'Union européenne n'a pas tardé à réagir, envisageant de nouvelles sanctions contre les navires russes, dont les pratiques de contournement notamment du dispositif de plafonnement de pétrole du G7 ont déjà fait l'objet de nombreuses mesures, sans grand succès. Les dernières en date visant une cinquantaine de pétroliers russes, ont été présentées à la mi-décembre dans le cadre du 15e paquet de sanctions. Le dixième paquet avait déjà le même objet. La liste des navires et des compagnies maritimes s'allonge mais en volumes, le pétrole russe continue largement de transiter en raison des opérations clandestines, notamment les transferts de pétrole de navires (STS) en haute-mer pour brouiller l'origine et les destinations.

« Nous condamnons fermement toute destruction délibérée des infrastructures essentielles de l’Europe. Le navire suspect fait partie de la flotte fantôme de la Russie, qui menace la sécurité et l'environnement, tout en finançant le budget de guerre de la Russie. Nous proposerons d'autres mesures, y compris des sanctions, pour cibler cette flotte », a déclaré à nouveau la cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas. Les autorités européennes ont ensuite précisé qu'elles travaillaient de concert avec la Finlande sur l'enquête, tandis que l'Otan, que la Finlande vient de rejoindre, a proposé son « assistance » à Helsinki et Tallinn.

Secteur d’intérêt stratégique

La dépendance croissante de l’économie mondiale aux flux numériques fait des câbles sous-marins un secteur d’intérêt stratégique. Depuis l'invasion russe en Ukraine, les tensions autour de la mer Baltique – dont le trafic peut représenter selon les années jusqu'à 10 % du trafic maritime de l'UE –, vont crescendo. Cette mer de l'UE (hors Russie) depuis 1995 est devenue un enjeu pour son potentiel de destabilisation de l'économie européenne. La Baltique est bordée par des États dont le soutien à l'UKraine est le plus marqué.

Avant ce nouvel incident, plusieurs dirigeants ont fait allusion à de possibles actions menées par Moscou depuis le sabotage en septembre 2022, quelques mois après le déclenchement de la guerre, des gazoducs Nord Stream 1, qui desservait l'Europe en gaz russe via l'Allemagne, et de son clone (Nord Stream 2), opérationnel mais jamais entré en service. Les causes restent toujours à élucider.

Adeline Descamps

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