Un an après le détournement du Galaxy Leader, l'équipage toujours otage

Un an après son abordage, les 25 membres d’équipage du porte-voitures Galaxy Leader, le premier navire marchand attaqué par les rebelles houthis, le 19 novembre, sont toujours en captivité. Des images suggèrent que le navire est toujours à quai dans le port de Salif, utilisé avec un sens des relations publiques douteux, l'équipage, lui-même mis en scène. Un nouvel appel international a été lancé.    

En février dernier, près de 30 associations devaient rappeler dans un appel international que les 25 membres d’équipage du porte-voitures Galaxy Leader, le premier navire marchand attaqué par les rebelles houthis, le 19 novembre, et alors l’un des deux seuls (avec le vraquier Ruen) à avoir été arraisonné, étaient toujours en captivité. Sa saisie interroge d'ailleurs car il reste une opération ponctuelle alors que des centaines de navires ont fait l'objet d'attaques de missiles et de drones, entraînant plusieurs pertes totales et un certain nombre de morts.

Selon les Forces maritimes combinées (CMF), partenariat maritime multinational regroupant 46 pays, dont les États-Unis, entre le 19 novembre 2023 et la mi-septembre de cette année, il y avait eu 99 incidents au cours desquels quatre marins ont été tués et deux ont été blessés. À 42 reprises, les Houthis ont tenté des attaques qui ont échoué, faisaient-elles valoir.

Le Galaxy Leader est ce navire d'une capacité de 5 100 voitures (CEU) exploité par Nippon Yusen (NYK) sous pavillon de l'Ile de Man mais propriété de la société britannique Ray Car Carriers, dont actionnaire principal est l'Israélien Abraham Rami Ungar. Ce qui suffit à en faire une cible. Après avoir été abordé, il avait été escorté jusqu'au port yéménite de Salif situé dans le gouvernorat de Hodeïda avec son équipage, de différentes nationalités – 17 Philippins, trois Ukrainiens, deux Bulgares, deux Mexicains et un Roumain –, dont le capitaine bulgare. Compte tenu de leur nationalité, leur obédience religieuse (ou culturelle), s'ils en ont une, questionne sur le sort qui leur est réservé.

Propagande islamiste

Des images suggèrent que le navire est toujours à quai dans le port sous emprise houthie, utilisé avec un sens des relations publiques douteux. Sa coque sert de support à la propagande pro-islamiste quand le navire n'est pas exploité comme lieu de célébration religieuse. L'équipage, toujours à bord, est lui-même mis en scène, contraints de porter des foulards à l'idéologie marquée. Dans les premiers jours qui ont suivi la prise d’otages, les Houthis avaient déjà fait du navire un objet d’attraction sur lequel étaient organisées des visites !

Outre la façon dont ils sont traités – les soins qu'ils reçoivent ou les contacts qu'ils peuvent avoir avec les leurs, dont on ne sait peu de choses et qui ne serait pas crédibles quoi qu'il en soit sans accès des ONG –, le navire pourrait être déclaré en perte réputée totale en raison de la « privation de jouissance pendant 12 mois » et s'il était couvert par une assurance contre les risques de guerre. La coque est estimée à 40 M$ et serait assurée pour une valeur de 65 M$.

Des appels sans impact ?

La Chambre internationale de la marine marchande (ICS), organisation qui maintient une vigilance depuis près de deux ans sur le sort des marins et qui alerte au niveau international, réitère son appel à la communauté internationale à l'occasion de cette date anniversaire. L'Organisation maritime internationale (OMI), le BIMCO et le Conseil mondial de la marine marchande se sont joints à l'ICS pour « demander instamment la libération immédiate et sans conditions des prisonniers, détenus en violation flagrante du droit international. »

Une mobilisation qui risque d'être sans effets alors que les actions des pays d'origine des marins n'ont rien donné. Le Premier ministre bulgare Nikolay Denkov avait déjà déclaré, mi-janvier, que leur libération faisait l'objet de « discussions avec les Houthis » et qu'elles étaient sur le point d'aboutir.

Et cela fait deux ans que la mer Rouge est en proie aux exactions des houthis, qui ne serait qu'une mineure organisation non étatique sans le soutien armé des Gardiens de la révolution islamique et du Hezbollah libanais. Les efforts conjoints des forces navales et les différentes missions internationales ne sont toujours pas parvenus à éradiquer la menace alors qu'une bonne partie de la flotte mondiale ne peut plus transiter et ceux qui s'y aventurent doivent être escortés par des bâtiments militaires.

Droit de retrait

C’est bien la situation du Galaxy Leader qui avait motivé la décision prise le 7 février, à l’occasion de l'International Bargaining Forum (IBF), forum qui réunit la Fédération internationale des employés du transport (ITF) et les employeurs maritimes internationaux du JNG*, à inscrire dans les droits des gens de mer la possibilité de refuser de naviguer dans la zone à haut risque, laquelle a été étendue du sud de la mer Rouge à des zones plus vastes du golfe d'Aden et aux eaux environnantes.

Selon les termes de l'accord, les marins doivent disposer d'un préavis de sept jours avant d'entrer dans la zone à haut risque. S'ils font valoir leur droit de retrait, ils doivent être rapatriés aux frais de la compagnie avec une compensation égale à deux mois de salaire de base. L'indemnité de deux mois de salaire de base ne s'applique pas si le marin est transféré sur un autre navire appartenant ou lié au même armateur/manager, au même rang et au même salaire et dans toutes les autres conditions. Il ne doit pas y avoir de perte de revenus ou de droits pendant le transfert et la compagnie doit prendre en charge tous les frais et la subsistance pendant le transfert. La mise au point permettra-t-elle de régler une réalité passée sous le radar : plusieurs équipages ayant refusé de naviguer ont pu être menacés de résiliation de contrat.

Au-delà, la menace d'un embrasement au Moyen-Orient reste une réalité d'autant que les attaques au Liban sont quotidiennes. Dans les sphères de la diplomatie internationale, on gage sur les affinités entre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et Donald Trump, le futur homme fort des États-Unis pour obtenir un début de règlement du conflit, le premier plus faborable à négocier avec le Républicain qu'avec le démocrate Joe Biden.

Adeline Descamps

* Le groupe de négociation paritaire (JNG, Joint Negotiating Group) se compose aujourd'hui du Conseil international des employeurs maritimes (IMEC), de l'International Mariners Management Association of Japan (IMMAJ), de l'Association des armateurs coréens (KSA) et de la société Evergreen.

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