Malgré un carnet de commandes de près de 8 millions d’unités équivalent vingt pieds (MEVP), le plus important de l’histoire de la navigation, les transporteurs et les armateurs négocient toujours et encore la construction de nouveaux navires.
Tous les créneaux des chantiers à court terme étant réservés, le carnet de commandes mondial offre désormais aux constructeurs une visibilité jusqu’en 2028, avec un pic de livraison en 2024 et 2025. Et une préférence très marquée pour les doubles motorisations.
Les normes réglementaires, qui assignent au secteur d’aligner une flotte zéro émission à horizon 2050, et une trésorerie gonflée par deux années très fastes se sont combinées pour inciter les propriétaires à passer commande.
Les prix à la construction ont suivi, d’après les retours des courtiers. Un néo-panamax à haut rendement énergétique serait proche des 200 M$ tandis qu’un porte-conteneurs à motorisation classique de 15 000 EVP se facturerait autour de 150 M$ en Chine et à plus de 160 M$ en Corée du Sud.
Le même tonnage neuf, mais doté d’un système de propulsion au gaz naturel liquéfié (GNL), est vendu avec un surcoût de 25 %. Jusqu’à une date récente, le coût supplémentaire pour une motorisation au méthanol était limité à 15 %, mais sous l’effet d’un boom de la demande pour le méthanol, ces primes sont passées à environ 20 % et 25 %. Le delta entre le GNL et le méthanol s’est donc réduit.
Toutefois, les inquiétudes étant croissantes quant à la disponibilité du méthanol vert à date, certains armateurs ont déjà permuté certaines de leurs commandes au GNL. Ainsi de CMA CGM avec ses huit porte-conteneurs d’une capacité de 9 200 EVP.
En mars 2019, l’armateur a commandé au premier groupe de construction navale en Chine, CSSC, une série de navires de 15 300 EVP alimentés au GNL et dotés de 1 800 prises reefers pour un montant d’environ 130 M$.
En fin d’année 2020, quand Hapag-Lloyd a commandé ses douze géants de 23 600 EVP au GNL, le transporteur allemand s’est mis d’accord avec le Sud-Coréen DSME (aujourd’hui Hanwha Ocean) sur le prix de 164 M$.
Aujourd’hui, les mêmes seraient facturés 250 M$ en Corée et quelque 240 M$ s’ils étaient construits en Chine. Du moins, c’est ce qui devrait être payé par CMA CGM à Yangzijiang pour sa dernière série passée en milieu d’année dernière, avec peu ou prou les mêmes spécifications techniques.
Ramené à l’EVP, l’investissement pourra tout simplement doubler entre un conteneur transporté sur un mégamax de 24 000 EVP commandé à des conditions favorables (environ 6 960 $/EVP) et un conteneur transporté sur un 15 000 EVP de construction récente (environ 12 745 $/EVP).
Les livraisons de porte-conteneurs se sont élevées à 2,4 MEVP en 2023, tandis que 3 MEVP sont attendus en 2024 et près de 2 MEVP en 2025, contre 1 MEVP arrivé sur le marché en moyenne chaque année au cours de la dernière décennie.
Les contrats d’affrètement les plus longs ne sont pas prolongés, peut-on lire dans le rapport financier du troisième trimestre de MPC Container Ships, tandis que les taux pour les engagements d’une durée moyenne de six à douze mois ont enregistré une baisse dans tous les segments de taille au cours de la période.
En un trimestre, entre le deuxième et le troisième de 2023, la durée moyenne des chartes-parties s’est réduite de quatre mois, passant de treize à neuf mois.
Les revenus de l’armateur allemand, qui affrète en grande partie des feeders exploités sur des services intrarégionaux en Europe ou en Asie, ont baissé en conséquence, à 184 M$ contre 194,4 M$ à la même époque l’an dernier. Le bénéfice net (101,5 M$ au troisième trimestre 2022) s’est limité à 68,2 M$ pour la dernière période publiée.
Constantin Baack, son PDG, s’est montré rassurant auprès de ses investisseurs, disposant « d’une bonne couverture », avec 67 % des jours déjà fixés pour 2024, selon les données arrêtées fin octobre.
La société s’attend à un chiffre d’affaires de l’ordre de 700 M$ en 2023 et à un bénéfice d’exploitation entre 500 et 515 M$.
Danaos, parmi les tout premiers propriétaires mondiaux de navires (second parmi les entreprises cotées en Bourse), a enregistré 380,7 M$ de recettes contractuelles au cours du troisième trimestre, dont 262 M$ tirés des affrètements d’une durée de trois ans pour six nouveaux navires qui seront livrés au cours du deuxième semestre de 2024. À l’occasion de la présentation de ses résultats trimestriels en novembre, la société avait indiqué que sa flotte était louée à 97 % pour cette année et à 73 % en 2024 moyennant une durée moyenne d’affrètement de 3,2 ans.
Le propriétaire de navires avait encaissé un bénéfice net d’1,8 Md$ sur le temps de la pandémie, en 2020-2022. Ses profits avaient toutefois été gonflés par le dividende issu de sa participation dans ZIM dont il était actionnaire au premier trimestre 2022 (la société s’est retirée depuis).
Danaos attend 10 porte-conteneurs neufs d’une capacité totale de 74 914 EVP entre 2024 et 2026. Tous sont configurés pour être propulsés au méthanol le cas échéant.