Quand le prix de l’énergie fait dérailler le report modal

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Face à la flambée du prix de l’énergie répercutée sur le prix du transport ferroviaire, les rail-routiers historiques s’inquiètent. Certains ont déjà commencé à remettre des caisses mobiles sur la route.

Le rail-route fait déjà intrinsèquement partie du modèle économique de certaines entreprises françaises de transport. Même si elles sont encore rares, elles l’ont inscrit dans leur ADN et ce, bien avant le choc des consciences provoqué par le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec).

Alainé a débuté le combiné en 2019 avec une percée fulgurante dans le secteur, enregistrant 1 000 UTI mensuelles. Le transporteur opère 50 départs quotidiens dans chaque sens entre Mâcon et Calais avec des connexions sur la Grande-Bretagne et la desserte du Boulou (Pyrénées-Orientales) depuis Bettembourg au Luxembourg. Il ambitionne à terme de connecter la région Rhône-Alpes au sud de la Pologne.

En Ille-et-Vilaine, le groupe Lahaye Global Logistics menaçait en décembre de remettre 12 000 camions sur la route en 2023. En cause, le prix de l’énergie. « Novatrans et T3M achètent des sillons à SNCF Réseau. Les prix ont explosé. Nous ne pouvons plus supporter ces envolées de coûts énergétiques qui nous amènent d’ores et déjà dans le mur à la vitesse du TGV », alertait Matthieu Lahaye, directeur général du groupe breton. Opérateur de deux lignes au départ de Rennes (vers Gennevilliers et Lyon) et de deux autres services au départ de Dourges (vers Lyon, Valenton et Bordeaux), l’entreprise basée à Vern-sur-Seiche vient de recevoir seize nouveaux wagons et, en dépit du contexte social, a lancé le 13 mars une ligne Rennes-Lille à raison d’une rotation trois fois par semaine et 30 UTI par train.

Hausse de 15 % des prix

Au nord de Marseille, SMTRT a également commencé à retirer ses caisses des sillons. « Nous faisons du report modal inversé, contraints de limiter le nombre de caisses sur les trains. Non seulement nous avons pâti en fin d’année dernière d’un service catastrophique, subissant des travaux nocturnes sur les lignes, mais depuis le 1er janvier, nous devons aussi encaisser une hausse de 15 % du prix du fret ferroviaire et, en le répercutant, nous devenons hors marché », déplore Thomas Pellegrin, directeur général de l’opérateur de transport combiné marseillais. Chaque jour, une trentaine de caisses circule entre l’Île-de-France (Bonneuil/Valenton) et le sud de la France (Miramas/Marseille Le Canet). La moitié descend à plein, chargée de biens électroménagers et de produits de bricolage, l’autre moitié est composée de caisses remontant à vide. « Si le marché avait été tendu avec des volumes de fret importants et un manque de conducteurs, nous aurions pu faire passer ces hausses de prix, mais ce n’est pas le cas. Les volumes ont chuté. Ce n’était déjà pas simple de défendre le train, mais aujourd’hui, les chargeurs doivent avoir une conviction personnelle très forte. Nous avons divisé par deux le nombre de caisses sur le rail car il en va de la viabilité de l’entreprise », maugrée Thomas Pellegrin, qui dénonce le cynisme des pouvoirs publics. « Le gouvernement s’est donné comme objectif d’augmenter la part du ferroviaire pour protéger la planète, mais reste silencieux parce qu’il y a d’autres dossiers brûlants à gérer. Nous ne voulons pas de subventions mais simplement travailler au juste prix. Ce sujet est passé sous silence », appuie le chef d’entreprise qui a investi dans une centaine de caisses mobiles.

En réalité, l’appréciation de la compétitivité du train dépend donc de la conjoncture. « Les trains partent en fin de journée pour arriver à l’aube. Le transport routier présente davantage de souplesse. » SMTRT, actionnaire à hauteur de 2,5 % de Novatrans et membre du Groupement national du transport combiné, n’a pas basculé la totalité de son fret sur la route pour préserver les emplois dans son entreprise.

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