L’heure de vérité tant redoutée a sonné pour ZIM. Dans le contexte particulier qui est celui du conteneur – deux années de résultats ahurissants auxquels a succédé une lente puis brutale glissade –, les résultats du petit dernier du Top 10 de la ligne régulière sont inévitablement traqués. La compagnie, dont l’introduction à la bourse de New York a coïncidé avec une conjoncture attractive pour les investisseurs, est un sujet à part entière.
La société vient d’emmagasiner plusieurs trimestres consécutifs de belle facture, profitant à plein et de son positionnement sur la ligne la plus lucrative ces deux dernières années et de sa politique commerciale qui privilégie le marché au comptant. Le transpacifique, où elle opère une douzaine de services hebdomadaires et concentre une grande part de ses capacités (34 % sur les neuf premiers mois) et sa forte exposition au spot (plus de la moitié de ses volumes) sont à l’origine de sa toute récente fortune.
Mais les mêmes paramètres vont la faire atterrir beaucoup plus rapidement et sévèrement que ses pairs, dont le réseau est plus diversifié et les ventes moins dépendantes des contrats de courte durée. La compagnie a une autre tare: la quasi-totalité de sa flotte (138 navires dont seulement huit en propriété) relève de l’affrètement, ce qui va inévitablement peser sur les comptes d’exploitation futurs. Toutefois, le transporteur dispose de leviers pour limiter la casse. Les 25 navires à renouveler en 2023 et 37 en 2024 sont autant de fenêtres de tir pour renégocier les tarifs.
Des taux de fret moyens supérieurs
ZIM a déclaré un résultat net de 1,17 Md$ au troisième trimestre contre 1,33 Md$ sur la période avril-juin. Le bénéfice opérationnel (Ebit) ressort à 1,54 Md$.
Ses revenus moyens par EVP traduisent cette inflexion. À 3 353 $ sur la période juillet-septembre, ils ont perdu de la vigueur (– 243 $) par rapport aux trois mois précédents, mais sont supérieurs à la moyenne du marché depuis le second semestre 2021 avec jusqu’à 1 000 $ d’écart. À une nuance près, ils ont pris une trajectoire inverse dès le second trimestre alors que le secteur affichait encore des progressions.
Chez ZIM, les volumes placés sous des contrats annuels (qui débutent en mai) concernent à 50 % les lignes transpacifiques. C’est donc pour l’entreprise le double coup de bambou. « Comme l’écart entre les taux contractuels et les taux spot a augmenté, nous avons été contraints d’accepter de revoir la tarification avec nos clients afin de protéger une partie du volume », a reconnu le directeur financier de l’entreprise.
Si la trésorerie (4,44 Md$) s’est étoffée de 634 M$ entre le 31 décembre 2021 et le 30 septembre 2022, un endettement est apparu. ZIM est passé d’une trésorerie nette de 509 M$ à un passif de 250 M$, soit une variation de 759 M$.
Alors qu’elle avait maintenu jusqu’à présent ses prévisions de bénéfices pour l’ensemble de l’année quand bien même ses résultats marquaient le pas, la société israélienne se résigne cette fois à corriger. Pour 2022, le bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement est désormais estimé entre 7,4 et 7,7 Md$ et non plus entre 7,8 et 8,2 Md$. Anticipé entre 6,3 et 6,7 Md$, l’Ebit est également révisé, dorénavant plus proche de 6 à 6,3 Md$. « Mais cela constituera une fois de plus des records », modère Éli Glickman, directeur général.
Conformément à sa politique de « retour de capital aux actionnaires » (30 % du bénéfice net redistribué aux actionnaires, soit 1,26 Md$ pour la période janvier-septembre), le conseil d’administration a validé, pour le troisième trimestre, un dividende en espèces d’environ 354 M$ aux détenteurs d’actions ordinaires.
Adeline Descamps