ArcelorMittal va mettre à l’arrêt deux installations en Allemagne en Espagne. Les coûts élevés du gaz et de l’électricité, qui rognent la compétitivité de la production d’acier en Europe, sont venus se greffer à un ensemble de facteurs négatifs dans un contexte d’incertitude économique. Frappé par le ralentissement de l’industrie automobile, principal moteur de l’industrie sidérurgique, et une demande globalement faible, l’aciériste européen, qui comptait seize hauts-fourneaux en Europe fin 2021, doit aussi composer avec « des coûts de CO2 toujours élevés en matière de production d’acier ». La tonne de CO2 a atteint 93 € fin août en Europe. Le groupe estime que toutes les installations ne peuvent plus être exploitées de façon rentable en Allemagne d’autant plus qu’une nouvelle taxe sur le gaz entrera en vigueur le 1er octobre. L’un des deux hauts-fourneaux du site de production d’acier plat de Brême sera fermé « à partir de la fin septembre, et ce jusqu’à nouvel ordre ». À Hambourg, où ArcelorMittal produit du fil machine, l’exploitation a déjà été réduite de 80 % et sera également mise à l’arrêt à partir du quatrième trimestre. Des mesures de chômage partiel ont aussi été mises en œuvre sur les sites de production de Duisburg, Eisenhüttenstadt et Brême.
Concurrence carbone
En Espagne, les opérations sur un des hauts-fourneaux de l’usine des Asturies (Gijon) seront suspendues fin septembre mais dont la durée n’a pas été communiquée. Là, ce sont les distorsions de compétitivité qui sont mentionnées, notamment de pays non soumis aux quotas carbone.
« La situation est aggravée par le gros volume d’acier importé venant de producteurs extra-européens qui ne sont pas concernés par la hausse des coûts liée aux quotas d’émission de CO2 de l’UE », indique le communiqué d’ArcelorMittal Espagne, qui appelle d’ailleurs à la mise en œuvre rapide « d’un mécanisme d’ajustement frontalier lié au carbone qui établisse un cadre dans lequel chaque région, chaque pays, devra contribuer équitablement ». La mesure est prévue par la feuille de route climatique de l’UE (Fit for 55).
Des mesures d’ajustement en France
En France, où l’entreprise est notamment implantée à Fos-sur-Mer, à Dunkerque, et à Florange, il est question de ralentir l’activité dans le port des Hauts-de-France où deux des trois hauts-fourneaux sont déjà à l’arrêt, l’un pour maintenance et l’autre depuis juillet dans le cadre de la décarbonation du site. Le seul en activité (le n° 4) représenterait toutefois, selon la société, la moitié de la capacité de production de Dunkerque. L’usine nordiste fera en outre l’objet de mesures d’économie (diminuer le recours aux intérimaires, inciter à la prise de congés anticipés, ouvrir la possibilité d’activité partielle…)
À Florange (Moselle), une des lignes de galvanisation et l’activité de couplage doivent faire l’objet d’ajustements. Des mesures de chômage partiel dès le lundi 19 septembre ont été annoncées au cours d’un Comité social et économique (CSE) extraordinaire qui s’est tenu le 6 septembre.
Les opérations d’acier plat (sept sites en France, 7 000 personnes) à Florange et Dunkerque mais aussi à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) sont plus particulièrement touchées.
Coup de frein en Europe
Selon Eurofer, l’association européenne de l’acier, les importations importations d’acier dans l’Union européenne ont considérablement freiné entre mars et juin (+ 0,4 %) après un premier trimestre marquée par une croissance de 28,8 % et une fin d’année 2021 sur les chapeaux de roue du fait de la reprise industrielle post-épidémique (+ 43,4 % au troisième trimestre et + 47,7 % pour le dernier exercice de l’année).
« La tendance positive observée dans la consommation apparente d’acier tout au long de 2021 s’est poursuivie au cours du premier trimestre de 2022, mais elle a été ralentie par la persistance de graves perturbations de la chaîne d’approvisionnement mondiale [manque de composants et de matériaux, goulets d’étranglement et hausse des coûts de transport, NDLR] et la hausse des prix de l’énergie et des coûts de production. Ces problèmes devraient notamment peser encore plus lourd au second semestre, ainsi que les effets de la guerre en Ukraine », indique Eurofer.
Au premier trimestre, la croissance de la consommation apparente de l’acier a augmenté de 6,5 %, après une hausse de 10,1 % au quatrième trimestre 2021, totalisant un volume de 37,1 Mt. Un niveau toutefois inférieur au pic pré-pandémique. L’association européenne de l’acier a révisé à la baisse des projections de croissance à + 1,1 % (contre + 2 % précédemment) pour la production des secteurs utilisateurs en 2022 (+ 8,6 % en 2021).
« Cette réévaluation résulte de la détérioration rapide des perspectives industrielles et économiques mondiales à la suite de la guerre de la Russie en Ukraine, associée à des problèmes de chaîne d’approvisionnement qui se poursuivent et s’aggravent », justifie l’association dans son rapport publié en août. « La croissance de la production ne s’accélérera que modérément en 2023 (+ 2,2 %), en raison de la forte incertitude générale qui devrait se poursuivre et ne s’atténuer qu’à partir du deuxième trimestre de cette année-là. »