Le retour de la CNAN (Compagnie nationale algérienne de navigation) à Rouen l’an dernier, après une vingtaine d’années d’absence, a marqué les retrouvailles de deux partenaires qui ont longtemps entretenu des relations. L’établissement normand, traditionnellement très présent sur les échanges nord-sud, a même été le principal pôle européen d’activité portuaire de l’armement national algérien. Cette fois, la compagnie a décidé d’intégrer Rouen dans son service régulier entre l’Algérie (Alger, Oran, Bejaia et Skikda) et l’Europe du Nord (Anvers et Hambourg). Le Terminal conteneurs et marchandises diverses (TCMD) de Grand-Couronne, qui se positionne dans ce dispositif comme dernière escale européenne à l’exportation, est également en mesure de traiter des flux d’importation. Ce site éminemment multimodal dispose de connexions ferroviaires, fluviales, routières, et bénéficie de capacités logistiques optimales. Des infrastructures et un « compte d’escale compétitif » qui ont séduit les décideurs de la CNAN dans leur choix d’une implantation sur l’axe Seine. Cinq unités de type MPV devaient être déployées sur ce service, dimensionnées pour charger des colis conventionnels, du matériel roulant et des conteneurs. Les escales rouennaises devaient être assurées à un rythme bimensuel.
70 000 t d’éléments pour éoliennes
L’initiative apparaissait alors comme un défi. Et pour l’heure, il reste à relever. Un MPV est mobilisé. « Nous avons traité quelques escales l’an passé, et la ligne demeure en semi-régulière avec des escales en fonction de la demande », indique aujourd’hui Éric Lelièvre, président de Promaritime International, l’agent maritime (consignation et commercialisation), basé à Rouen, de l’armement algérien. « Mais sans un matelas de fret conteneurisé, on fait difficilement du conventionnel » constate le commissionnaire de transport spécialisé dans les projets industriels « clé en main », les transferts industriels et opérations de levage.
Plus généralement, sur des trafics bien ancrés localement, les manutentionnaires rouennais ont traité près de 70 000 t d’éléments d’éoliennes terrestres (pales, mâts, nacelles) à l’importation. Une activité qui se porte « plutôt bien ». Les navires accueillis sont généralement « des petites unités avec des chargements variant de 120-150 t à 2 200 t », précise Haropa Port de Rouen.
Trois opérateurs interviennent sur ce trafic spécifique. En 2020, Katoen Natie au Quai de Radicatel en a traité 30 443 t pour une trentaine de navires reçus. Normande de Manutention au Terminal conteneurs et marchandises diverses (TCMD) de Grand-Couronne/Moulineaux a engrangé 23 300 t avec un nombre d’unités équivalent. DockSeine au Quai Rouen-Quevilly a réceptionné quelque 13 000 t pour une quinzaine de cargaisons.
Sur d’autres registres traditionnels, l’évolution de l’industrie locale influera sur celle du fret conventionnel. La fermeture de Vallourec à Dévillle-lès-Rouen va peser sur les flux sidérurgiques. La reprise, toujours en suspens, de la papeterie Chapelle-Darblay de Grand-Couronne influence les volumes des produits papetiers. En revanche, l’évolution de Technip – essaimage en deux sociétés distinctes, TechnipFMC et Technip Energies, cette dernière recentrée sur les énergies de la transition énergétique, GNL, hydrogène et l’éthylène – pourrait relancer l’activité en bord à quai de Flexi-France (ex Colexip) du Trait où les navires spécialisés du groupe effectuent de spectaculaires chargements de flexibles pour l’industrie pétrolière et gazière. Une cinquantaine d’escales sont attendues en 2021.