Il ne va pas sans dire que notre monde est politiquement complexe. La Chine, la Russie, l’Inde, le Brésil, l’Égypte, la Turquie ou encore l’Arabie Saoudite sont tous dans des exaspérations de leurs positions internationales. Conflits de voisinage et/ou revendication de places sur l’échiquier mondial attisent partout des crispations. On pourrait dire que le monde actuel est énervé. Bien des régimes autoritaires ou démocraties musclées sont tentés par des positions martiales.
Les démocraties occidentales portent moins de conflictualité latente mais sont devenues des sources de problèmes. Du côté européen, le Brexit vient d’être (enfin) soldé. À 27, l’UE est un ensemble parcouru de fractures et de tentations populistes. Le mandat de Donald Trump aura été un tumulte de quatre ans.
Sur le plan des échanges, le monde global est agité par la guerre commerciale transpacifique qui affecte le conteneur et quelques exportations américaines. Le pétrole est la proie des rivalités russo-saoudiennes. Les marchés de l’acier et de l’aluminium sont encombrés de barrières douanières.
Ère du mercurisme?
Le monde est multipolaire, un mot pudique pour ne pas dire atomisé, mais la règle du fonctionnement du commerce international reste malgré tout le libre-échange. Initiée aux États-Unis à la fin des années 1930 et réalisée par la création de l’OMC, la facilité du commerce reste de mise bien que rien ne soit acquis. Les crises de 1873 et 1929 ont emporté en leurs temps des échanges libéralisés.
Un néologisme pourrait traduire l’actuel monde complexe. Sous le sceau du dieu du commerce, le « mercurisme » pourrait être cette inextricable relation économique qui lie l’ensemble des États du monde au travers du commerce. Fournisseurs, importateurs, investisseurs de chaque pays participent à la mobilité des marchandises dont le commerce maritime est l’outil technique.
La dynamique des échanges reste forte. La Chine a soif de matières premières et le monde engloutit du « made in China ». La dynamique maritime internationale et les investissements portuaires continuent d’enchevêtrer les économies nationales et régionales. La vieille influence européenne, le rôle de Singapour et de Dubaï et les nouvelles routes de la soie chinoises se croisent et s’entrecroisent.
Le transport maritime peut redouter la « martialisation » du monde car il y puise sa liberté. On peut aussi émettre l’idée que la densité des échanges économiques crée un juste nœud gordien. L’élan de la globalisation a ralenti. Le Covid-19 pose problème. Mais on peut parier que l’enchevêtrement économique est un bien pour le monde.