Onze paquebots ont trouvé refuge dans le port de Marseille-Fos quand d’autres places portuaires refusaient d’accueillir ces navires à la dérive. Avec ses faux airs de Miami, le port phocéen accuse le coup, et des grèves et de la pandémie, avec un manque à gagner estimé à près de 30 M€ cette année.
La crise sanitaire a fait des ravages dans l’industrie de la croisière. « 550 escales de paquebots étaient programmées en 2020. Le trafic devait dépasser les 2 millions de passagers avec une hausse de 10 % », rappelle Jean-François Suhas, le président du Club de la croisière de Marseille-Provence. « Nous avons perdu 246 escales, dont 130 en tête de ligne, entre mars et le 1er juin. Cela représente un million de passagers et un manque à gagner de 150 M€ qui affecte l’industrie de la croisière et les transports (taxis, VTC, autocars…) à 60 % et le tourisme (cafés, hôtels restaurants, commerces…) pour 40 % ». Les services portuaires, notamment le pilotage, sont aussi considérablement impactés. « La station de Marseille, dont l’activité est compensée par les mouvements de navires de Fos, soutient les petites stations de pilotage de Nice, Cannes Villefranche qui connaissent une chute de chiffre d’affaires de 80 %. Depuis trente ans que je fais ce métier, je n’ai jamais vu un tel choc et nous ne sommes pas au bout du tunnel. Les agents maritimes coque et réceptifs traversent une situation dramatique », déplore-il. Le président du Club de la Croisière Marseille-Provence rappelle que cette activité draine 400 M€ par an de devises sur le territoire d’Aix-Marseille et représente 3 000 emplois.
Marseille, port refuge
« La pandémie a marqué le pas et il faut que l’activité redémarre. Les secteurs qui en dépendent attendent un positionnement du Conseil de défense », appuie Jean-François Suhas. Progressivement, la pandémie reculant en France, la vie à bord et sur les quais reprend ses droits, les marins étant de nouveau autorisés à franchir la coupée pour se rendre en ville. Autre signal positif, le Costa Smeralda, que le port de Marseille-Fos a autorisé à stationner avant son retour en mer, a été avitaillé à deux reprises en GNL.
Également président du Conseil de développement portuaire de Marseille-Fos, Jean-François Suhas assure que les investissements dans la transition énergétique de la croisière seront maintenus. « Nous aurons les aides nécessaires, quitte à recourir à l’emprunt. Avec les projets de Charte Bleue, d’avitaillement au gaz et d’équipement des quais en courant électrique, Marseille apparaîtra sous un nouveau jour », ajoute l’initiateur du Blue Maritime Summit. Lors de la première édition organisée le 17 octobre, quatre armateurs, représentant 83 % des escales dans les bassins portuaires de Marseille, s’étaient engagés pour limiter leur impact environnemental dans des mesures qui allaient bien au-delà des réglementations en vigueur.
En attendant, le secteur devrait mettre entre quatre et cinq ans avant de retrouver son niveau d’avant crise.