Ils ont passé entre eux une règle tacite de non-agression. Le marché se charge de leur rappeler qu’ils sont en concurrence. La prudence aussi les conduit à calibrer leurs déclarations. Søren Skou, le PDG du leader mondial du transport maritime de conteneurs Maersk et néanmoins danois, ne réservera donc pas, à l’endroit de son homologue français CMA CGM, les flèches décochées vers les compagnies maritimes asiatiques HMM et Yang Ming. À l’occasion de la présentation des résultats financiers, AP Møller Maersk avait estimé « totalement inacceptables » les aides d’État perçues par ces compagnies qui « n’ont pas gagné d’argent depuis dix ans ».
Parmi les principaux transporteurs mondiaux, Maersk est sans doute le seul qui peut se permettre de distribuer les mauvais points, n’ayant apparemment perçu aucun subside public selon le récapitulatif effectué par Alphaliner. En juge de paix, le consultant montre que les aides d’État n’ont jamais cessé d’irriguer les trésoreries exsangues.
HMM reste la mieux lotie. Depuis 2016, comptabilise Alphaliner, la banque publique Korea Development Bank (KDB), son plus grand actionnaire (74 %) a injecté plus de 3 000 milliards de KRW. Le géant chinois Cosco aura reçu, depuis 2009, 11,2 milliards de RMB en subventions publiques directes (l’État chinois détient 46 % du capital). Les transporteurs taïwanais Yang Ming et Evergreen, qui ont déjà été largement soutenus par le ministère taïwanais des Transports et des communications via des émissions d’actions, des lignes de crédit à des taux d’intérêt préférentiels ou des réductions sur les frais portuaires et fonciers, doivent être les bénéficiaires d’une aide de 896 M€ cette année.
Quant à Hapag-Lloyd, le gouvernement allemand a fourni une garantie de prêt couvrant 90 % d’une ligne de crédit de 1,2 Md€ en octobre 2009. La ville de Hambourg (HGV) a investi 484 M€ pour acquérir une participation de 23 % du transporteur allemand à la même période.
PIL vient de recevoir un nouveau prêt de 450 M$ d’une entité appartenant au fonds souverain de la cité-État Temasek Holdings, après avoir reçu de ce fonds un prêt de quelque 180 millions de dollars singapouriens en janvier 2018
Quant à l’israélienne ZIM, détenue en partie par l’État, aucune aide directe n’a été signalée… depuis la restructuration de sa dette en 2014, assure Alphaliner.