Lors de sa création le 7 janvier 2019, Ports de Normandie naviguait à vue. L’entité créée à l’initiative des collectivités locales pour gérer les ports de Caen-Ouistreham (Calvados), Cherbourg (Manche) et Dieppe (Seine-Maritime), ne savait alors rien du Brexit, ni la date ni les conditions de retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne. Les trois ports français, essentiels dans le trafic du transmanche dans la partie ouest du détroit avec un trafic annuel de deux millions de passagers et de 7 Mt de marchandises, sont désormais au moins fixés sur un calendrier.
En dépit des circonstances – l’attentisme des Britanniques face à l’incertitude du Brexit aurait pu être fatal –, l’année 2019 leur a été globalement favorable. Les trafics ont été dans l’ensemble en augmentation. Toutes activités confondues, commerce, transmanche et croisière, le nombre d’escales a progressé de 4 % (3 000) sur l’ensemble portuaire. Le nombre de passagers sur le transmanche est à l’avenant, avec une augmentation de 1,28 % pour atteindre les 2 millions de passagers. Irish Ferries a eu un incontestable effet sur le trafic vers l’Irlande, qui a fait un bond de 32,60 %.
La compagnie irlandaise a concentré en 2019 toutes ses escales françaises sur Cherbourg. Elle y a également aligné son nouveau et grand ferry, le WB Yeats, sur la route vers Holyhead. Les volumes de Stena Line sont, eux, restés stables
En revanche, les lignes vers le Royaume-Uni sont en repli de 3,21 %. Quant au trafic croisière, il est en progression de 7,9 %, avec 61 escales en 2019 et 169 161 passagers.
Les lignes transmanche connaissent également une croissance de leur tonnage de fret (+ 3,54 %) et du nombre de poids lourds (+ 4,19 %). La progression du fret n’a cependant pas profité de façon égale aux trois ports: les flux sont en hausse de 3,11 % à Caen Ouistreham, de 3,33 % à Cherbourg mais en recul de 2,57 % à Dieppe.
Les ports normands ont en fait bénéficié de trafics supplémentaires liés, par un effet d’anticipation, à la constitution de stocks outre-Manche. Les mouvements sociaux des douaniers sur les ports du détroit du Pas-de-Calais les ont aussi favorisés.
Le progression de 1,31 % du trafic conventionnel, qui s’établit à 918 000 t, est due à la forte augmentation des déchargements de granulats à Dieppe (+ 140 000 t) qui compense le recul des exports de céréales (– 130 000 t) à Caen Ouistreham provoqué par les travaux d’embectage et les problèmes de fonctionnement de l’écluse ouest. Les trafics de niche tirent aussi leur épingle du jeu avec une croissance des trafics de bois (+ 62 %) et de bentonite (+ 34,37 %) à Caen Ouistreham, tout comme les colis lourds (transformateurs et hydroliennes) en croissance à Caen Ouistreham et Cherbourg.
Positionnement sur les EMR
Au vu de ces résultats, le premier objectif de l’autorité concessionnaire, qui représente 6 000 emplois directs, est de conforter sa place de leader sur le Transmanche à l’ouest du Détroit du Pas-de-Calais. Incarnation de cette revendication, les choix d’Irish Ferries mais aussi le positionnement à Caen Ouistreham par Brittany Ferries de son futur Honfleur au GNL, en remplacement du Normandie. L’Europe a octroyé une enveloppe de 300 K€ pour préparer son arrivée ainsi que 1,7 M€ pour développer le ferroutage à Cherbourg.
Par ailleurs, dans le cadre du Brexit, le ministère de l’Intérieur s’appuie sur Ports de Normandie pour affiner et renforcer les modalités de passage des frontières dans les ports. Dieppe a été agréé pour le transport des équidés et a obtenu, tout comme Caen Ouistreham, un niveau d’agrément élevé de leur système de contrôle pour le transport des animaux vivants.
Les trois ports entendent également jouer un rôle dans le développement des énergies marines renouvelables, en s’appuyant sur leur offre de solutions dans cette filière.
GE Renewable Energy a inauguré début novembre son usine de fabrication de pales d’éoliennes en mer sur un terrain de 11,5 ha du port de Cherbourg.
Les travaux d’extension du môle Est à Caen-Ouistreham ont débuté. Trois hectares sur la mer vont être gagnés pour pouvoir accueillir un centre de maintenance du champ éolien de Courseulles-sur-mer.
À Dieppe, EMDT (Éoliennes en Mer Dieppe Le Tréport), filiale d’Engie, a obtenu les autorisations pour la construction et l’exploitation des 62 éoliennes au large de Dieppe et du Tréport, dont la mise en service est prévue en 2023.
Pour finaliser l’ensemble de ses projets, ports de Normandie prépare un plan pluriannuel à l’échelle des trois ports de 25 à 40 M € par an.
* Région Normandie, départements du Calvados, de la Manche, de la Seine-Maritime et agglomérations de Caen-la-Mer, du Cotentin et de Dieppe-Maritime.