TVA: une « simplification » difficile

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L’UMPF dénonce depuis plusieurs années les modalités françaises de perception de la TVA sur les marchandises importées de pays non membres de la Communauté européenne, qui entraînent pour les ports français « une profonde distorsion de concurrence par rapport à leurs voisins du Benelux », selon son président Jean-Charles Le Gall.

Lors du Conseil stratégique de l’attractivité du 17 février 2014, le président de la République, François Hollande, avait annoncé une simplification du paiement de la TVA à l’import: « Dès janvier 2015, dans le cadre de la procédure de domiciliation unique (PDU), procédure simplifiée de dédouanement à domicile, les entreprises pourront reporter la TVA due sur les marchandises importées sur leur déclaration courante de TVA. La procédure sera simple, accessible aux PME tout comme aux grands opérateurs étrangers. » Cette annonce de « simplification » a abouti à l’adoption de l’article 25 du projet de loi de finances rectificative pour 2014 (PLFR), qui permet aux entreprises d’autoliquider la TVA à l’importation, sous réserve, donc, qu’elles soient « titulaires d’une procédure de domiciliation unique (PDU) ».

Procédure inadaptée aux PME PMI

L’UMPF déplore l’introduction de cette restriction qui a « mis en échec », selon elle, l’efficacité d’une mesure pourtant indispensable. L’article 25 du PLFR vise en effet à réduire les disparités européennes dans les systèmes d’acquittement de la TVA (système fiscal au Benelux contre régime douanier en France) et à renforcer « l’attractivité de la France ». Dans le Benelux, la TVA est acquittée et déduite simultanément, sans décaissement pour l’entreprise, alors que les importations via les ports français étaient soumises à paiement immédiat, l’opérateur récupérant la TVA ultérieurement. Or, la PDU reste une procédure « très complexe et inadaptée aux PME PMI », rappelle l’UMPF: « Seules 350 entreprises en France sont titulaires d’une PDU, et depuis l’entrée en vigueur de la disposition, une centaine d’entreprises au niveau national ont entamé les démarches pour l’obtenir et pouvoir bénéficier de la mesure d’autoliquidation » (la plupart des entreprises qui ont manifesté leur intérêt étaient déjà titulaires d’une procédure de dédouanement à domicile). Deux amendements ont été présentés au Sénat avec pour objet l’élargissement à « toutes les entreprises réalisant des importations en France de la possibilité d’opter pour un report du montant de la TVA directement auprès de la Direction générale des Finances publiques (DGFiP) sur la déclaration fiscale » (amendement du 2 décembre 2015 portant sur le PLF 2016 et amendement du 10 décembre 2015 portant sur le PLFR 2015).

Bien que l’annonce de « simplification » ait été réitérée en diverses occasions, la mesure tarde à être appliquée. L’UMPF regrette ainsi que « le gouvernement n’ait pas tenu ses engagements ». Notamment lors du Comité interministériel de la mer (CIMer) du 22 octobre, la mesure qui devait être annoncée par le Premier ministre Manuel Valls a été « retirée au dernier moment sur l’insistance de la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) », selon l’UMPF.

Futur code des douanes de l’Union

Ces complications et retards risquent même de rendre la mesure d’autoliquidation dans sa forme actuelle rapidement obsolète, puisque la DGDDI a annoncé que la PDU disparaîtrait au 1er mai avec l’entrée en vigueur du nouveau « code douanier communautaire ». Le « choc de simplification » vise aussi à adapter le régime français aux standards qui seront mis en œuvre dans le cadre de la future procédure de dédouanement centralisé communautaire. L’UMPF appelle donc à « l’adoption immédiate d’un système d’autoliquidation pour tous », faisant valoir de multiples avantages pour l’économie française. D’une part, le rapatriement des flux conteneurisés vers les ports français entraînerait des créations d’emplois, selon les professionnels de la filière, qui s’accordent à dire que « 1 000 conteneurs supplémentaires transitant par un port génèrent entre trois et six emplois » (un potentiel de 10 000 emplois pour les 2 MEVP annuels qui ne transitent pas par les ports français actuellement, selon l’estimation de l’UMPF). D’autre part, « le débarquement de ces marchandises dans les ports français permettrait d’augmenter les droits de douanes et d’augmenter la recette fiscale » (25 % des droits de douane sont acquis au budget de l’État). L’UMPF souligne enfin que la compétitivité des ports français est étroitement liée à la politique de report modal mise en avant par le gouvernement dans le cadre de la « transition énergétique pour la croissance verte ».

Point sur la procédure de dédouanement centralisé

Le code des douanes de l’Union (CDU) a été adopté le 9 octobre 2013 en tant que règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil. Il est entré en vigueur le 30 octobre 2013, abrogeant le règlement (CE) n° 450/2008 (Code des douanes modernisé). Ses dispositions de fond ne s’appliqueront qu’à compter du 1er mai (rectificatif au règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil du 9 octobre 2013 établissant le code des douanes de l’Union). Il permettra aux entreprises au statut d’opérateur économique agréé (OEA) de procéder à un dédouanement centralisé au niveau européen des marchandises importées d’un pays tiers ou exportées vers un pays tiers. Concrètement, elles pourront dissocier les flux déclaratifs des flux physiques en déposant toutes leurs déclarations auprès de leur bureau de domiciliation quel que soit le lieu où les marchandises sont physiquement présentes. Aujourd’hui, les flux déclaratifs et physiques sont encore liés dans la plupart des cas, la déclaration étant déposée auprès du bureau du lieu de présentation des marchandises.

Le CDU et les actes délégués et d’exécution « rationaliseront la législation et les procédures douanières; offriront une plus grande sécurité juridique et une uniformité accrue aux entreprises; fourniront des orientations plus claires aux agents des douanes de toute l’UE; simplifieront les règles et procédures douanières et renforceront l’efficacité des opérations douanières pour répondre aux besoins de la société moderne; achèveront le passage des services douaniers à un environnement sans papier entièrement électronique; accroîtront la rapidité des procédures douanières pour les opérateurs économiques respectueux des règles et fiables (opérateurs économiques agréés) ».

(Source: « Fiscalité et union douanière », Commission européenne: http://ec.europa.eu/).

La réponse de la DGDDI

Interrogée le 1er février sur la position de l’UMPF, la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) a souhaité faire connaître la sienne sur la question soulevée. Voici sa réponse: « Le bilan, établi fin décembre, de la mise en œuvre de la mesure d’autoliquidation de la TVA à l’importation adossée à la procédure de domiciliation unique (PDU), est très encourageant. Plus d’un 1,6 Md€ cumulés ont été autoliquidés. Depuis le début de l’année 2015, les services de la douane examinent en moyenne plus d’une dizaine de demandes nouvelles par mois. Plus de la moitié des nouvelles PDU ont été sollicitées par des petites et moyennes entreprises (PME) et par des entreprises de taille intermédiaire (ETI), en vue de bénéficier de l’autoliquidation de la TVA. Avec l’entrée en application du code des douanes de l’Union (CDU) au 1er mai 2016, la DGDDI, en liaison avec d’autres ministères, examine les conditions d’adaptation mais aussi d’élargissement du périmètre de l’autoliquidation aux évolutions induites par la nouvelle réglementation. En raison de la vulnérabilité de la TVA à la fraude, il importe que la mise en œuvre de cette mesure préserve les recettes de l’État. Ainsi, l’accent sera davantage mis sur les assujettis présentant des garanties suffisantes en matière de solvabilité financière et de maîtrise de la chaîne de dédouanement, en se basant sur les critères prévus par le CDU. Au final, l’évolution législative devrait permettre de concilier, d’une part, les objectifs d’attractivité du territoire national et de compétitivité des entreprises françaises avec, d’autre part, l’impératif de préservation des recettes de l’État. »

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