Le potentiel d’exportation de gaz naturel liquéfié de l’Iran

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Le plan global d’action conjoint (Joint Compréhensive Plan of Action, JCPOA), signé le 14 juillet à Vienne par Téhéran et les pays du groupe 5+1 (États-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni, Allemagne), « met l’Iran sur la voie de la réinsertion au sein de l’économie mondiale », assure en introduction un bulletin publié mi-juillet par ICIS, l’un des plus importants fournisseurs de renseignements sur les secteurs de l’énergie, de la chimie et des engrais. « La future levée progressive des sanctions », qui pourrait survenir au cours du premier semestre 2016 si l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) se déclare convaincue du respect intégral du JCPOA par l’Iran, « pourrait propulser ce pays parmi les premiers producteurs mondiaux d’énergie et lui permettre de prendre une place prépondérante au sein des économies en Asie », continue ICIS. Selon des données publiées par BP dans sa publication annuelle Statistical Review, les réserves de gaz de l’Iran sont estimées à 34 trillions de mètres cubes (tcm) au 31 décembre 2014, soit un niveau plus élevé que celles de la Russie et du Qatar. « Malgré de vastes réserves énergétiques et une importante production de pétrole et de gaz, l’Iran exporte actuellement très peu », note ICIS. 173 milliards de mètres cubes (bcm) de gaz naturel ont été produits en 2014, en progression de 70 % depuis 2005. Cent soixante-dix bcm ont été consommés par les Iraniens eux mêmes en 2014. Neuf bcm seulement ont été exportés, principalement à destination de la Turquie, de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan, selon les données de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Dans ce contexte, ICIS annonce que de nombreuses compagnies ont tablé sur la signature d’un accord et « se préparent depuis au moins un an » pour ne pas manquer les opportunités d’investissements qui vont naître suite au règlement de la question du nucléaire iranien.

Trouver des partenaires internationaux

Parmi ces opportunités figure « le potentiel d’exportation de gaz naturel liquéfié » (GNL) par l’Iran, notamment avec une exploitation plus intensive du champ de South Pars. Celui-ci est exploité depuis plusieurs années avec un objectif d’exportation qui ne s’est jamais concrétisé à cause des sanctions prises à l’encontre de Téhéran en 2006 et renforcées à partir de 2010. « Plus de 2,5 Md$ ont été investis à South Pars pour la construction de ce qui apparaît aujourd’hui comme une usine d’exportation à moitié réalisée », précise ICIS. Les deux trains de liquéfaction pour exporter 10,8 Mt par an de gaz n’ont pas vu le jour tandis que des réservoirs de stockage et des installations portuaires sont sortis de terre, ce qui a permis la mise en service d’une centrale électrique alimentée au gaz au terminal de Tombak. La levée des sanctions devrait permettre à l’Iran d’avoir accès aux technologies les plus récentes pour relancer le projet d’exportation de GNL à partir de South Pars. ICIS est convaincu que le développement d’un tel projet nécessite la participation d’un opérateur international et expérimenté de GNL. « Trouver un ou des partenaires va prendre du temps. Et une fois cette étape franchie, les exportations de GNL de South Pars ne commenceraient que quatre ou cinq ans après », ce qui mène, en termes de planning, entre 2020 et 2025. Compte tenu de l’ampleur de ses réserves, l’Iran pourrait également travailler pour accueillir un autre grand projet d’exportation de GNL voire d’autres de dimensions plus modestes en termes de Mt/an exportées. Toutefois, pour ICIS, « il existe deux points de blocage sur le chemin de l’Iran pour devenir un exportateur majeur de GNL à court ou moyen terme ». Le premier frein est le nombre élevé de projets d’exportation de GNL au niveau mondial, que ce soit en Amérique du Nord, en Afrique orientale ou en Australie, dont les mises en service prévues entre 2016 et 2020 devraient largement satisfaire une demande de gaz relativement stagnante. Et les contrats de vente à long terme associés à ces projets réduiront d’autant les clients potentiellement intéressés par le GNL iranien qui ne serait disponible qu’après 2020. Le deuxième frein relève du domaine politique: Téhéran pourrait donner la priorité à l’amélioration des liens régionaux du pays plutôt que de tabler sur des exportations de GNL à l’international. Le gouvernement pourrait alors choisir d’exporter du GNL à partir d’installations de liquéfaction existantes à Abu Dhabi ou Oman. Il pourrait aussi décider de répondre prioritairement à la demande régionale en forte augmentation dans les marchés intérieurs de ses voisins, de l’Irak à l’Ouest au Pakistan à l’Est par gazoducs.

Accéder aux technologies récentes

Avant de profiter des différentes opportunités possibles d’exportations de son gaz, l’Iran doit d’abord relever de nombreux défis, poursuit ICIS. Bien que doté d’abondantes réserves, le pays doit à la fois développer ses capacités de production et d’exportation et trouver des débouchés pour son gaz. Bien que des investissements ont été réalisés ces dernières années dans des projets d’exportation de gaz sous forme liquéfiée ou par gazoducs, le pays doit aussi se mettre en mesure d’accéder aux technologies les plus récentes et de nouer des partenariats avec des entreprises internationales spécialisées et expérimentées. Pour ICIS, en termes de calendrier, l’option la plus rapidement opérationnelle pour l’Iran est l’exportation de GNL par les installations d’une capacité de 8 Mt/an qui devraient entrer en service à Dar Island à Abu Dhabi en 2019. Vient ensuite l’option de la relance du projet d’exportation de GNL à partir de South Pars pour une mise en service à l’horizon 2025. Toutefois, la décision en faveur de l’une ou l’autre de ces solutions dépend de la réponse à une question qui ne relève pas seulement de décisions à prendre par l’Iran: après 2020, quelle sera la tendance de la consommation mondiale de gaz? Si celle-ci apparaît insuffisante par rapport à l’offre mondiale disponible, Téhéran pourrait choisir de se concentrer d’abord sur la fourniture de gaz à ses voisins au sein de sa sphère régionale.

Des volumes importants de GNL mi-2020, au plus tôt

Dans un communiqué publié mi-juillet, l’agence internationale de notation FitchRatings, également fournisseur d’analyses, de données ou de modèles d’évaluation, a estimé que « l’Iran a un potentiel à long terme pour devenir l’un des premiers producteurs de gaz, grâce à ses 34 trillions de mètres cubes (tcm) de réserves estimées de gaz naturel, soit environ 18 % du total mondial ». Cela constituerait une réelle évolution car l’Iran n’a jamais été un exportateur de gaz naturel de premier plan. Pour FitchRatings, même si les sanctions internationales sur le pays sont levées, « il faudra au moins cinq ans pour accélérer la production et construire les gazoducs nécessaires pour devenir un grand exportateur terrestre de gaz ». Concernant le GNL, « le coût plus élevé et la complexité plus grande des installations signifient que des exportations de GNL ne pourraient se matérialiser que dans une décennie au plus tôt, voire plus ». Plusieurs projets gaziers importants en Iran sont à différents stades de mise en œuvre, explique FitchRatings. Il y a South Pars où les réserves estimées prouvées de ce champ géant de gaz sont évaluées à environ 14 tcm. C’est une partie d’un champ de gaz plus large partagé avec le Qatar. Il couvre une superficie de 9 700 km2 dont 3 700 km2 situés dans les eaux territoriales de South Pars de l’Iran dans le golfe Persique. La capacité de production actuelle atteint seulement 107 milliards de mètres cubes (bcm). L’AIE prévoit que 67 bcm de capacité supplémentaire pourraient être mis en service à South Pars avant la fin de cette décennie. Une partie pourrait être exportée sous forme de GNL. Un autre champ important est celui de North Pars, avec des réserves estimées à 1,3 tcm. En 2006, la société China National Offshore Oil Corporation (CNOOC) a signé un accord avec l’Iran pour développer ce champ et y construire une usine d’exportation de GNL de 20 Mt/an. CNOOC devrait y consacrer 16 Md$. Des projets existent aussi pour les champs de Ferdosi et Golshan. Pour ces quatre champs, pour la période 2005-2009, l’Iran avait fixé des objectifs de production/exportation de 70 Mt de GNL. FitchRatings rappelle « qu’en raison des sanctions internationales, ces projets axés sur l’exportation connaissent des retards importants car la plupart des compagnies pétrolières étrangères ont cessé de traiter avec l’Iran » à partir de 2006. FitchRatings note que dans le même temps, la consommation de gaz du pays a considérablement augmenté, passant à 170 bcm entre 2005 et 2014 (+ 66 %). Ce taux de croissance est le deuxième le plus élevé au monde après celui de la Chine et fait de l’Iran le quatrième plus grand de consommateur de gaz derrière les États-Unis, la Russie et la Chine. FitchRatings prévoit qu’une part importante de la capacité nouvellement mise en service au cours des prochaines années servira le marché intérieur et ne sera donc pas exportée.

Bientôt un FLNG en Iran?

Dans un point de vue publié sur le site Internet naturalgaseurope.com, un expert a apporté des éclaircissements suite à l’annonce en juillet d’Alireza Kameli, directeur général de la National Iranian Gas Export Company (Nigec), de négociations en cours avec la « plus grande entreprise au monde spécialisée dans les équipements FLNG pour transférer du gaz iranien vers l’Europe dans les sept à douze mois ». La société n’est pas nommée mais il pourrait s’agir de Royal Dutch Shell Plc, dont le p.-d.g. s’est rendu à Téhéran en juin. Royal Dutch Shell Plc possède actuellement le plus grand navire de FLNG au monde, le Prelude. Celui-ci peut produire au moins 5,3 Mt/an de liquides, 3,6 Mt/an de GNL, 0,4 Mt/an de gaz de pétrole liquéfié (GPL) et 1,3 Mt/an de condensat. La division relations avec les médias de Shell a déclaré à naturalgaseurope.com: « Il n’y a aucune possibilité pour le groupe de réaliser des affaires en Iran tant que l’environnement des sanctions existe. Shell se conforme à toutes les sanctions internationales. Nous suivons de près les développements politiques et juridiques et leurs implications sur les restrictions imposées aux compagnies pétrolières internationales. » La Nigec a indiqué être en pourparlers avec plus de 170 sociétés étrangères qui ont à plusieurs reprises fait savoir leur volonté de retourner en Iran une fois que les sanctions seront levées.

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