Le contenu local sur la sellette

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Il y a dix ans, après les fabuleuses découvertes offshore dites pré-sal, le gouvernement brésilien a voulu doper le secteur pétrolier et, par ricochet, l’industrie navale, en instaurant la règle de contenu local. Sous la houlette du président Luiz Inacio Lula da Silva puis de Dilma Rousseff, Petrobras a été doté d’un cadre légal extrêmement favorable, au détriment des compagnies étrangères. En contrepartie, le géant pétrolier doit, par exemple, atteindre en moyenne un quota de 65 % pour la production locale de ses plates-formes et sondes. D’après l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), le Brésil est d’ailleurs le troisième pays au monde avec le plus grand nombre d’exigences de contenu local.

Mais, contrairement à l’objectif initial, cette initiative protectionniste a fini par ronger la compétitivité brésilienne. Elle représenterait l’une des principales entraves au développement de la production pétrolière de Petrobras et à l’implication des investisseurs étrangers, critiquent nombre d’experts.

Vers une politique d’incitations fiscales

Aujourd’hui, le secteur pétrolier réclame donc des modifications réglementaires. L’Institut brésilien du pétrole, du gaz et des biocarburants (IBP), qui réunit les principales entreprises du secteur, a remis à l’Agence nationale du pétrole, du gaz naturel et des biocarburants (ANP) plusieurs propositions visant à assouplir le système en place. L’IBP réclame par exemple l’adoption de pourcentages fixes de contenu local, le maintien de ce système dans une dizaine de segments stratégiques (la construction de navires d’appui, par exemple) et la fin des pénalités. Actuellement, le non-respect des exigences de contenu local se solde en effet par de lourdes amendes, représentant 278 millions de réals (soit 80 M€) sur la seule année 2014. « Les pénalités ne permettent pas de développer les fournisseurs », déplore le secrétaire exécutif de l’IBP, Antônio Guimarães. C’est pourquoi les professionnels du secteur réclament plutôt des incitations fiscales temporaires et l’amélioration des conditions de financement pour les entreprises qui favorisent le contenu local dans le choix de leurs équipements et services.

Dans le sillage des milieux industriels, le ministre des Mines et de l’Énergie, Eduardo Braga, et la directrice générale de l’ANP, Magda Chambriard, se sont prononcés au mois de mai en faveur d’un assouplissement de la législation actuelle. Une proposition est aujourd’hui en cours d’élaboration entre le ministre et l’ANP: elle devrait être présentée par le gouvernement cet été.

Sous influence chinoise

Dilma Rousseff, quant à elle, se montre farouchement opposée à une quelconque modification réglementaire. Mais pour combien de temps? La présidente traverse une phase délicate, affaiblie par les révélations de corruption politique massive liée à Petrobras (à ce jour, ces pots-de-vin atteignent 2,1 Md$). En outre, ce serait compter sans l’influence croissante de l’empire du Milieu au Brésil. Les groupes bancaires chinois ont soulagé Petrobras, qui tente de rebondir, avec un prêt de 10 Md$. Le Premier ministre chinois, Li Keqiang, en visite au Brésil en mai, a promis plusieurs dizaines de milliards de dollars d’investissements, d’accords commerciaux et de financements, notamment dans les secteurs brésiliens de l’énergie et des infrastructures. Les Chinois ont d’ailleurs commencé à gagner quelques commandes. Le consortium Integra (Mendes Junior et OSX) a cédé au groupe chinois Offshore Oil Engineering Corporation (COOEC) le contrat de construction des modules et d’intégration des FPSOs P-67 et P-70, qui était jusqu’à présent confié au chantier naval d’OSX, dans le Port d’Açu (État de Rio de Janeiro). Il est ainsi fort probable qu’une grande partie de ce chantier, destiné à l’exploitation du pré-sal de la baie de Santos, soit transférée et finalisée à l’étranger. Le consortium Queiróz Galvão/Iesa devrait lui aussi perdre la commande de ses 19 modules pour les platesformes P-75 e P-77, au profit de chantiers navals asiatiques. Le chantier Jurong, situé dans l’État de l’Espírito Santo, pourrait être confronté à la même problématique pour ses commandes sur les FPSO P-68 et P-71.

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