Aides d’État illégales: le chantier naval ENVC doit rembourser 290 M€

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Après une enquête approfondie, la Com mission européenne a conclu le 7 mai que les aides publiques d’environ 290 M€ versées par le Portugal à Estaleiros Navais de Viana do Castelo S.A. (ENVC), l’ancien opérateur des chantiers navals situés à Viana do Castelo n’étaient pas compatibles avec les règles de l’UE. Elle a également estimé que les aides devaient être remboursées par ENVC et pas par le nouvel opérateur, WestSea, qui a racheté une partie des actifs d’ENVC. Il n’y a pas de continuité économique entre ENVC et WestSea, étant donné que les actifs ont été achetés aux conditions du marché. La Commission rappelle que l’ENVC subissait de lourdes pertes depuis 2000, année à partir de laquelle le Portugal lui a directement et indirectement octroyé des subventions continues au moyen de diverses mesures: une augmentation de capital en 2006; plusieurs prêts accordés entre 2006 et 2011 pour couvrir les frais de fonctionnement; et autres lettres de confort et garanties permettant à ENVC de souscrire des contrats de financement avec des banques. La valeur totale de ces mesures s’élève à environ 290 M€.

Sur la base de son enquête ouverte en 2013, la Commission a estimé qu’aucun investisseur privé n’aurait accepté de subventionner une entreprise qui fonctionnait à perte depuis 13 ans. Les mesures n’ont dès lors pas été accordées aux conditions du marché et constituent des aides d’État au sens des règles de l’UE. Ces aides ont conféré à ENVC un avantage économique « significatif » sur ses concurrents qui fonctionnaient sans ces subventions. La Commission a en outre conclu que les mesures n’étaient pas compatibles avec les règles communes, notamment les lignes directrices de 2004 sur les aides au sauvetage et à la restructuration, sur la base desquelles les aides en faveur des entreprises en difficulté peuvent être autorisées moyennant le respect de certaines conditions. Tout d’abord, à cette époque, ENVC ne disposait pas d’un programme de restructuration réaliste lui garantissant une viabilité à long terme sans aide d’État supplémentaire; ensuite ENVC avait reçu, au cours des dix années précédentes au moins, des aides répétées, en violation du principe de non-récurrence, qui n’autorise l’octroi d’aides au sauvetage ou à la restructuration qu’une fois tous les dix ans, afin d’éviter que certains opérateurs du marché ne tablent sur les aides publiques au lieu de gérer efficacement leurs entreprises en ne comptant que sur leurs seules compétences.

Les mesures ont dès lors faussé la concurrence dans le marché unique, en violation des règles de l’UE en matière d’aides d’État, et la société ENVC est tenue de rembourser le montant de l’avantage perçu.

Dans sa décision, la Commission a tenu compte du fait qu’ENVC était actuellement en cours de liquidation et qu’une partie de ses actifs (notamment une sous-concession sur les terrains exploités par ENVC) ont été acquis par l’opérateur privé WestSea, détenu par Martifer et Navalria. Étant donné que WestSea n’a acquis qu’une partie des actifs, et ce, aux conditions du marché à l’issue d’une procédure ouverte de mise en concurrence, la Commission a conclu que WestSea n’était pas le successeur économique d’ENVC. L’obligation de rembourser les aides incompat i bles avec le marché intérieur in combe donc toujours à ENVC.

Rappel des faits

Fondée en 1944 et nationalisée par le Portugal en 1975, la société ENVC exploitait le plus grand chantier naval du Portugal. Elle est totalement détenue par l’État via une holding. La situation nette du chantier est négative depuis au moins 2009. En décembre 2013, l’État décide de le liquider et de vendre ses actifs. Le chantier a ainsi été acquis par WestSea à l’issue d’une procédure ouverte de mise en concurrence. Les interventions des pouvoirs publics dans des entreprises exerçant des activités économiques peuvent être considérées comme ne constituant pas des aides d’État au sens des règles de l’UE dès lors qu’elles sont effectuées à des conditions qu’un opérateur privé guidé par les critères du marché aurait acceptées (principe dit de l’investisseur en économie de marché). Si ce principe n’est pas respecté, les interventions des pouvoirs publics constituent des aides d’État au sens des règles de l’UE (article 107 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne), car elles procurent à leur bénéficiaire un avantage économique, au détriment de ses concurrents. La Commission analyse ensuite si ces aides peuvent être jugées compatibles avec les règles communes de l’UE qui autorisent certaines catégories d’aides, telles que les lignes directrices de l’UE sur les aides au sauvetage et à la restructuration. Ces aides entraînent des distorsions de concurrence importantes, étant donné qu’elles maintiennent artificiellement en vie des entreprises qui auraient été écartées du marché en leur absence. Pour éviter que des entreprises « inefficientes » ne se maintiennent que grâce aux subventions publiques, ces aides ne sont octroyées que dans des conditions très strictes, une fois tous les dix ans.

Discontinuité ou non?

Pour déterminer si des aides ont été répercutées sur les nouveaux propriétaires dans le cadre d’une vente d’actifs, la Commission examine s’il existe une continuité économique entre l’ancien et le nouveau propriétaire. Elle a recours à divers indicateurs, tels que l’importance des actifs vendus (actifs et passifs, maintien de la main-d’œuvre, portefeuille d’actifs), le prix de vente, l’identité du ou des acquéreurs, la date de la vente et la logique économique de l’opération. Il semble n’y avoir aucune continuité économique, la vente s’étant déroulée au moyen d’un appel d’offres ouvert, transparent et non discriminatoire, le nouveau propriétaire a acquis les actifs au prix du marché et n’a donc bénéficié d’aucune aide.

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