« L’Afrique subsaharienne constitue l’un des centres du système énergétique mondial et illustre toutes les problématiques de la pauvreté énergétique dans un contexte de ressources abondantes », a déclaré Maria van der Hoeven, directeur exécutif de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), le 13 octobre à Londres lors de la présentation de Africa Energy Outlook, rapport spécial de la série World Energy Outlook. Les données recueillies par l’AIE « mettent en évidence le manque criant de services énergétiques modernes en Afrique subsaharienne », note le rapport de l’AIE. Le tableau varie d’un pays à l’autre mais, globalement, seuls 290 millions des 915 millions d’habitants ont accès à l’électricité, et le nombre de personnes qui en sont privées est en essor. Et ce malgré une croissance économique rapide de cette partie du continent africain depuis 2000 marquée par une demande accrue d’énergie. Dans le même temps, près de 30 % des découvertes mondiales de pétrole et de gaz de ces cinq dernières années ont eu lieu en Afrique subsaharienne, continue l’AIE. Le Nigeria est le pays le plus riche en ressources pétrolières. Toutefois, les incertitudes réglementaires ou géopolitiques et le vol de pétrole (jusqu’à 150 000 barils quotidiens, soit plus de 5 Md$ par an) dans le delta du Niger découragent l’investissement et la production. Cela conduit l’Angola à supplanter le Nigeria comme principal producteur de pétrole brut de la région, au moins jusqu’au début des années 2020, relève l’AIE. Des producteurs plus modestes, Sud-Soudan, Niger, Ghana, Ouganda et Kenya voient leur production progresser puis décliner avant la fin des années 2020. La capacité de raffinage s’améliore, ce qui signifie qu’une plus grande part de l’approvisionnement en pétrole brut de la région est traitée sur place. « La contribution nette de la région à l’équilibre pétrolier mondial se réduit à cause de la baisse de la production de plus de 6 millions de barils par jour (b/j) en 2020 à 5,3 Mb/j en 2040, combinée à un doublement de la demande de produits pétroliers à 4 Mb/j », estime l’AIE.
Vers un export de GNL depuis la côte Est
En ce qui concerne le gaz, le Nigeria reste le premier consommateur et producteur de la région. Toutefois, le centre de gravité des nouveaux projets gaziers se déplace vers la côte Est avec les grandes découvertes offshore au Mozambique et en Tanzanie. L’ampleur de l’exploitation de ces gisements et leur isolement rendent leur date de mise en production incertaine. Ils pourraient accroître la production régionale annuelle de 75 Mdm3 sur un total atteignant 230 Mdm3 d’ici à 2040. L’exportation de gaz naturel liquéfié (GNL) depuis la côte Est pourrait être facilitée par la proximité relative des marchés importateurs d’Asie. Pour améliorer la situation énergétique de l’Afrique subsaharienne, l’AIE propose trois mesures dans un scénario principal, lequel, « à condition d’être accompagné de réformes plus générales de la gouvernance, pourrait entraîner un gain de 30 % pour l’économie de cette région d’ici à 2040 ». La première mesure conseille « 450 Md$ d’investissements supplémentaires dans le secteur de l’électricité » pour réduire les coupures de courant de moitié et assurer un accès universel à cette énergie dans les zones urbaines. La deuxième porte sur « une coopération et une intégration régionales plus approfondies facilitant le lancement de nouveaux projets de production à grande échelle et favorisant une plus grande expansion du marché transfrontalier ». La troisième préconisation concerne « une meilleure gestion des ressources et des revenus, en adoptant des processus robustes et transparents permettant une utilisation plus efficace des recettes générées par le pétrole et le gaz ». Ainsi, une action concertée d’amélioration du fonctionnement du secteur énergétique subsaharien pourrait contribuer au développement économique de cette région et préparer « l’aube d’un siècle de l’Afrique ».