Effervescence sur les quais phocéens, le 8 août, lors de la venue du ministre marocain des Transports Aziz Rabbah, accompagné d’une délégation d’une dizaine de personnes composée essentiellement de hauts fonctionnaires, de la directrice du port de Tanger Med et du directeur du port de Casablanca. Pas d’annonce officielle sur le démarrage du service roulier entre Tanger et Marseille dont on parle depuis plusieurs mois déjà, mais seulement la volonté de créer un terreau fertile entre les deux rives. « Le rôle des gouvernements consiste à créer un environnement favorable. Il appartient désormais aux opérateurs portuaires de faire leurs calculs », a expliqué le ministre.
« Il faut laisser les armateurs parler à leurs clients. Les exportateurs marocains soutiennent cette démarche. Le projet est mis sur la table et les transporteurs doivent à présent évaluer l’efficacité et la compétitivité du service. Il s’agit de donner une impulsion », a expliqué Christine Cabau-Woehrel, présidente du directoire du GPMM, reçue deux mois plus tôt à Rabat.
Une plate-forme logistique pour les produits agricoles
Ces échanges ont abouti à la signature de deux accords cadres de coopération entre le GPMM et l’Agence nationale des ports d’un côté, et l’Agence spéciale Tanger Méditerranée (TMSA) de l’autre. Ces accords portent sur l’étude de faisabilité d’une plate-forme logistique dans les bassins Est, dédiée à la réception, au traitement et à la réexpédition des produits agricoles marocains. « Nous cherchons à développer de nouvelles lignes pour les marchandises et les passagers. Nous exportons nos produits vers la Russie et les pays de l’Est et l’idée repose sur la création de bases intermédiaires pour nos produits frais avant d’atteindre les marchés cibles », a précisé le ministre, estimant que la France peut jouer ce rôle. Il a d’ailleurs rappelé au passage que le gouvernement marocain allait investir quelque « 10 Md€ dans les infrastructures à Tanger, Casablanca, Agadir et favoriser l’intermodalité ».
Un deuxième volet des accords porte sur la coopération dans le domaine de la formation à la sûreté maritime, les métiers portuaires et la logistique. « Nous avons tout intérêt à créer une plate-forme de formation pour alimenter l’économie maritime mondiale en ressources humaines », a précisé Aziz Rabbah.
Après avoir signé un premier accord dans le domaine de la formation dans la construction navale avec Busan en Corée du Sud, l’Institut supérieur des études maritimes (Isem) a signé les 26 et 27 août un nouvel accord avec l’université de Bretagne occidentale et prévoit pour 2015 une formation en droit maritime.
« Pour la partie logistique, nous envisageons une collaboration avec l’Ifep à Marseille portant sur la formation continue », a expliqué Amane Fethallah, directrice de l’Isem, qui explique que les structures de formations déjà en place au Maroc sont privées.
« Notre structure sous la tutelle du ministère de l’Équipement, des Transports et de la Logistique est publique », précise la jeune femme. La diversification entamée par l’Isem correspond aux difficultés croissantes rencontrées par les navigants marocains à trouver du travail. Faute de pouvoir valider leur brevet en naviguant, les jeunes diplômés pourront poursuivre leurs études par un master et intégrer d’autres formations.
D’ailleurs, la question de la proportion des navigants est au cœur de l’appel à manifestation d’intérêt lancé par le ministère marocain des Transports pour exploiter onze lignes maritimes entre le Maroc, l’Espagne, l’Italie et la France (incluant les ports de Sète et Marseille).
Sur les cinq compagnies ayant répondu (Intershipping, Medlines, Redfish, Navline et Armas), seulement trois – des sociétés établies au Maroc mais détenues par des capitaux étrangers – ont été retenues (Navline, Redfish et Intershipping, qui opère grâce à une autorisation temporaire la liaison entre Tanger et Algésiras depuis l’arrêt de la Comarit en 2012).
« Auparavant les compagnies marocaines devaient être à capitaux marocains à 100 %. Dans ce nouvel appel à manifestation d’intérêt, les opérateurs peuvent faire entrer à hauteur de 50 % des sociétés étrangères afin de tester la capacité des opérateurs privés », a précisé Karim Nikdam, chef de la division transports maritimes au sein du ministère marocain des Transports. Interrogé sur le délitement ces dernières années du pavillon marocain, il répond qu’une réflexion va être engagée pour créer une compagnie maritime publique « avec une bonne gestion et une gouvernance sans rapport aucun avec la Comanav ».