Un nouveau corridor logistique s’ouvre au nord du pays

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Jusqu’à présent, plus de 70 % des récoltes de soja et de maïs provenant du Mato Grosso (la plus grosse région brésilienne productrice de grains) étaient acheminées par camion jusqu’aux ports de Santos (État de São Paulo) et de Paranaguá (État du Paraná), à plus de 2 000 km du lieu de production, voire encore plus au sud, jusqu’aux ports de São Francisco do Sul (État de Santa Catarina) et Rio Grande (État de Rio Grande do Sul). Mais une décision inédite marque la récolte 2013-2014. Plutôt que de descendre la BR-163, de nombreux camions transportant du soja pour le compte de Bunge et Cargill ont commencé à remonter la route fédérale en direction de l’État du Pará, malgré le mauvais état de cet axe routier. « En raison de la surcharge logistique et des facteurs climatiques, il commence à devenir viable de monter la BR-163 », juge Clythio Van Buggenhout, directeur des ports brésiliens pour Cargill.

Bunge et Cargill donnent ainsi le coup d’envoi à l’un des principaux corridors intermodaux du Brésil, formé par l’usage de la BR-163 et de voies d’eau (en particulier Tapajós-Amazonas).

Un fort potentiel

Défendue depuis des années par les agriculteurs de la région, cette alternative devrait, en théorie, être valable pour tous les grains plantés au-dessus du 13e parallèle, au niveau de la ville de Lucas do Rio Verde (État du Mato Grosso). Dans ce schéma, les camions empruntent la BR-163, franchissent la frontière de l’État du Pará et peuvent continuer jusqu’à Campo Verde, voire Miritituba. De là, les marchandises peuvent être transbordées sur des barges jusqu’aux ports exportateurs de l’État du Pará (Santarém et Vila Rica) et jusqu’à Santana (État de l’Amapá). Les céréales seront ensuite acheminées en navires Panamax vers l’Europe et vers l’Asie en passant par le canal de Panama. Ce second itinéraire, comparé au trajet actuel, pourrait représenter un gain de temps estimé à quatre jours (aller et retour). « Durant la récolte 2012/2013, la valeur moyenne du fret était de 133 $/t en partant des ports de Santos et Paranaguá. Notre estimation est que cette valeur sera de 88 $/t en embarquant depuis le Pará, dès que les terminaux de la région fonctionneront pleinement », déclare Edeon Vaz Ferreira, directeur exécutif du Movimento Pró-Logística du Mato Grosso (organe représentatif du milieu agricole). Ce système logistique pourrait donc générer une réduction de 34 % sur le coût du fret et écouler 40 Mt annuelles de céréales d’ici à 2020, selon ces mêmes prévisions.

Effervescence

Les deux précurseurs Bunge et Cargill ne sont pas les seuls à adopter cette stratégie. Le secteur privé compte investir environ 2,3 milliards de réals (soit 722 M€) dans la construction d’installations de transbordement, de hangars de stockage, de terminaux portuaires, de remorqueurs et d’embarcations, et utiliser ce nouvel itinéraire pour la récolte 2014-2015.

Cette nouvelle mosaïque logistique repose notamment sur le goudronnage de la BR-163 (promis par le gouvernement pour fin 2015, via une concession), sur l’amélioration de la navigabilité sur la voie d’eau Tapajós-Amazonas, et sur l’installation de près d’une dizaine de terminaux fluviaux à Miritituba, un futur hub stratégiquement situé sur la rive du Tapajós, dans la municipalité d’Itaituba (État du Pará). Au total, sept entreprises ont déjà acquis des terrains afin d’y construire des terminaux: Bunge et Cargill, bien sûr, mais aussi Hidrovias do Brasil (entreprise de P2 Brasil, joint-venture de Pátria Investimentos et Promon), Cianport (joint-venture de Fiagril et Agrosoja), Unirios, Chibatão Navegações et Reicon. Pour l’instant, seul Bunge a obtenu la licence. Les autres acteurs en sont encore à la phase d’étude d’impact environnemental ou attendent le feu vert du gouvernement pour lancer les travaux. Selon le journal brésilien Valor, d’autres acteurs seraient en train d’étudier des partenariats ou de chercher des surfaces disponibles, à l’instar de la société américaine ADM, du Français Louis Dreyfus Commodities ou de Multigrain, contrôlé par le japonais Mitsui. La dispute pour les terrains est âpre, et les investisseurs commencent à s’intéresser à Santarenzinho, dans le district de Rurópolis, à 15 km de Miritituba. Transportes Bertolini, Amaggi et Cevital ont récemment acquis des terrains dans le secteur, tandis qu’Odebrecht Transport mise sur un joint-venture avec Brick Logística, une entreprise spécialisée dans les projets portuaires de Belém.

Le secteur attend également avec impatience les appels d’offres pour les nouveaux terminaux portuaires de céréales que le gouvernement fédéral prétend lancer prochainement au Pará: un à Santarém (où seul Cargill opère actuellement), un à Vila do Conde (Bunge y dispose déjà d’un terminal, tandis que ADM et Hidrovias do Brasil y comptent des terrains), et trois à Outeiro. Chacun de ces terminaux devrait permettre d’augmenter de 5 Mt le trafic en céréales de l’État. L’autorité portuaire Companhia Docas do Pará (CDP) espère que ces appels d’offres auront lieu au cours de ce semestre et qu’ils comprendront également la création d’un terminal pour engrais à Santarém.

Les pionniers du Corridor Nord

La société Amaggi a été pionnière dans le transport fluvial de grands volumes de marchandises en Amazonie, en misant sur Porto Velho et la voie d’eau Madeira. Elle a été suivie par Cargill, qui a obtenu un terminal à Santarém dès 1997, et la société Bunge. Les retards dans le goudronnage de la BR-163 ont conduit ces acteurs à geler leurs plans. Mais le projet, de nouveau d’actualité, signe le grand retour du Corridor Nord. Bunge, par exemple, a initié une stratégie baptisée Terfron (terminaux portuaires de la frontière nord). Outre Miritituba, la société compte un terminal à Barcarena et Unitapajós, un joint-venture avec Amaggi dédié au transport fluvial de marchandises. De son côté, Cargill entend doubler la capacité opérationnelle du terminal de Santarém d’ici fin 2015, pour atteindre 5,5 Mt par an, et participer à l’appel d’offres concernant le terminal de Vila do Conde.

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