« Le Brent s’est établi à 108 $ le baril ($/b) en moyenne sur 2013, en très léger recul par rapport aux 111 $/b atteints lors des deux années précédentes », indique le panorama Contexte pétrolier 2013 et tendances 2014 de l’IFP-EN, publié en février 2014. « Les écarts à la hausse et à la baisse restent significatifs, avec des variations de plus ou moins 10 $/b, mais la tendance apparaît plutôt inférieure à ceux connus depuis six ans. » En 2013, les pics du Brent aux alentours de 120 $/b ont toujours été consécutifs à des tensions géopolitiques: en Iran en début d’année, en Égypte et en Syrie au cours de l’été, entre l’Irak et l’Arabie Saoudite à l’automne. Il ne faut pas non plus oublier les déclarations très négatives d’Israël après la signature de l’accord intérimaire le 24 novembre entre l’Iran et les cinq pays membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies plus l’Allemagne (groupe 5 + 1). « Le contexte géopolitique a donc une nouvelle fois largement pesé sur le prix du pétrole, qui réagit avec une très forte sensibilité à la moindre tension », explique l’IFP-EN. Cela est lié au fait que le marché pétrolier fonctionne à flux tendu avec de très faibles marges de manœuvre, estimées à seulement 3 Mb/j par l’Agence internationale de l’énergie (AIE), soit moins de 4 % de la demande pétrolière mondiale. Toute instabilité effective ou supposée a donc un effet important sur le prix. À défaut de pouvoir augmenter l’offre, il s’agit par la hausse des prix de réduire, si nécessaire, la demande.
Des menaces réelles ou supposées
Les envolées du Brent en 2013 « reflètent également le recul de l’offre dans certains pays membres de l’Opep: Libye, Irak et Iran », continue l’IFP-EN. La production de ces nations pourrait toutefois repartir à la hausse en 2014 avec des « volumes pouvant atteindre jusqu’à 2,5 Mb/j ». Pour cela, la Libye doit retrouver ses niveaux de production d’avril 2013 (+ 1 Mb/j, production à 1,4 Mb/j) en améliorant son contexte politique et sécuritaire très dégradé, l’Irak ses niveaux d’août 2013 (+ 0,3 Mb/j à 3,2 Mb/j). L’Iran doit parvenir à produire + 1 Mb/j pour atteindre 3,6 Mb/j très vite après la suspension de l’embargo. Si ces trois membres de l’Opep parviennent à produire plus en 2014, « la question se pose de l’ajustement de la production de l’Arabie Saoudite », selon l’IFP-EN. L’émirat a toujours fait ce choix, en ligne avec sa position historique de producteur d’appoint, sauf au milieu des années 1980. « Un choix différent ne peut se concevoir que dans le cadre d’une position géopolitique d’opposition, visant à affecter négativement ses deux voisins chiites, Iran et Irak. […] Mais ce serait prendre un risque important pour l’équilibre régional, alors que d’autres membres de l’Opep comme l’Algérie, la Libye ou le Venezuela comptent aussi sur un prix minimum de plus de 110 $/b afin d’assurer l’équilibre de leurs budgets contre 80 $/b pour l’Arabie Saoudite ». Si l’émirat ajuste sa production, à défaut d’un excès d’offre sur le marché, cela se traduirait par une hausse des marges de production détenues par l’Opep entre 3,6 Mb/j et 5,7 Mb/j contre 3 Mb/j en 2013. Et des marges de production élevées pour l’Opep constitueraient un facteur favorable pour tirer le prix du Brent vers le bas et accompagner la reprise économique attendue dans les pays occidentaux avec une croissance de 3,6 % en 2014, selon les prévisions du FMI, soit 0,7 % de plus par rapport à 2013. Tout ne dépend toutefois pas de l’Opep et « les risques géopolitiques vont aussi peser sur l’évolution du prix du pétrole en 2014 comme en 2013 », note l’IFP-EN. Ainsi, « les évolutions en Afrique du Nord et au Moyen-Orient » continueront de peser sur les prix. « Les menaces réelles ou supposées sur la production ou le commerce de pétrole, via Ormuz ou Suez, constituent aussi des facteurs de hausse. C’est pourquoi la situation en Égypte ou en Syrie, pourtant sans impact direct sur le marché pétrolier, joue un rôle dans la formation du prix de ce produit », rappelle l’IFP-EN. Il reste aussi l’incertitude sur la poursuite ou non de la suspension de l’embargo sur l’Iran au second semestre 2014. Enfin, la grande inconnue du marché reste le potentiel de développement des huiles de roche-mère aux États-Unis. La production américaine a déjà atteint 2,3 Mb/j en 2013, devrait dépasser les 3 Mb/j en 2014 et participe ainsi à l’essor attendu de la production des pays non-Opep. Les conséquences de cette situation sur les flux d’exportations et d’importations pourraient être « considérables ».