La 17e convention Euro-Med a été dominée par deux thèmes majeurs, à savoir: la réglementation OMI sur un fuel à 0,1 % qui entrera en vigueur au 1er janvier 2015 pour la zone ECA, et la suppression de l’ecobonus. Emanuele Grimaldi, directeur général du groupe éponyme, souhaite un report de l’annexe VI de Marpol. « Un fuel avec une teneur en soufre de 0,1 % va coûter très cher. On complique actuellement la vie des armateurs avec des contraintes. Il faut nous donner plus de temps car nous ne disposons pas des données nécessaires pour prendre des décisions et investir en conséquence. L’Europe aurait mieux fait d’étudier consciencieusement le problème et de rechercher des solutions. Nous espérons que le prochain forum de la Communauté européenne, en ce mois de novembre, sera l’occasion pour tous les secteurs concernés de venir avec le même message. » L’armateur Grimaldi considère que d’importantes actions, du moins au niveau de son groupe, ont déjà été entreprises en vue de réduire consommation et émissions, et que les résultats sont significatifs. Ses nouvelles générations de navires ont une consommation inférieure. L’application d’une peinture silicone a permis de réduire la consommation de 10 %. À cela s’ajoutent un reprofilage des bulbes et un contrôle strict des consommations. Une optimalisation des moteurs est à l’étude. Un groupe de travail est chargé d’évaluer l’impact de scrubbers, de fuels alternatifs comme le GNL. Le plus important constructeur européen de moteurs est de la partie. Chiffres à l’appui, l’armateur démontre que la différence de prix entre le fuel à haute teneur en soufre et celui dont la teneur est de 1 %, actuellement utilisé en zone ECA, est très faible. Cette différence ne varierait guère par rapport à une teneur de 0,5 %. Par contre, à 0,1 %, l’impact financier sera énorme. Les armements pourraient facilement s’en tirer avec une réglementation imposant 0,5 %, ce qui équivaudrait à réduire de huit fois les émissions, comparé à la réglementation précédente portant sur 4 %. Passer de 0,5 % à 0,1 % augmentera le coût du fuel de 50 %. « Quelle que soit la réglementation, il est essentiel qu’elle ne pénalise pas l’industrie du shipping, qui est en fait la plus soucieuse de l’environnement en tant que mode de transport », a déclaré Emanuele Grimaldi. Les professionnels du shipping s’interrogent sur la manière dont les fonctionnaires de l’IMO ont pris leurs décisions. Selon Emanuele Grimaldi, les politiciens doivent prendre contact avec les animateurs de l’industrie avant de prendre des décisions.
Interrogations
De nombreuses questions restent sans réponses. Y aura-t-il assez de fuel à 0,1 % disponible, et à quel prix? Faudra-t-il attendre que l’industrie automobile se convertisse totalement à la propulsion électrique pour libérer un volume suffisant de fuel à un prix plus bas? Le GNL peut être une solution en Baltique, mais pas nécessairement ailleurs. Aux États-Unis, des applications vont intervenir pour le pavillon national, mais il est question de subventions. De plus, un stockage de GNL à bord exige beaucoup de place au détriment de la cargaison, et qu’en sera-t-il de la stabilité des navires? « Il est impensable d’opter maintenant pour le GNL, ou toute autre alternative, donc prudence en matière d’investissements », prévient Emanuele Grimaldi.
Y a-t-il des chances de relancer un ecobonus européen? Le système de subvention lancé par l’Italie sur la relation avec l’Espagne, au profit des transporteurs routiers pour les inciter à se détourner de la route en faveur du maritime, a été bloqué, d’une part par un manque de moyens, puis définitivement par le DG4 qui considère cette subvention comme aide d’État.
Tommaso Affinita, managing director de Rete Autostrade Mediterranee, regrette cette évolution. L’ecobonus est un atout pour le développement de la multimodalité. C’était le seul moyen de développer du trafic maritime et de jouer la carte du réseau des corridors multimodaux (vu sous l’angle italien…). Sur trois ans, quelque 200 M€ pnt été dégagés et plus de 600 000 voyages enregistrés. La fin du système a évidemment eu un impact. Un certain nombre de transporteurs ont repris la route. Une nouvelle proposition a été lancée, qui vise à éviter l’intervention des États, animée par Cofitarma et d’autres organisations et qui porte sur un ecobonus « vert » européen. Le système dépendrait ainsi de la Communauté européenne, via Marco Polo ou autre organisme, proposition qui s’expliquerait par le fait que les autoroutes de la mer sont maintenant inscrites dans le réseau TEN-T qui s’est vu octroyer un montant de 33 Md€. Cette proposition n’a guère suscité de réactions à Bruxelles.