La compétitivité des ports africains est devenue, au cours des dernières années, un sujet récurrent. Continent en plein développement, l’Afrique compte sur ses ports pour accompagner sa croissance. Le sujet est arrivé sur la table du Club des ports africains, créé par le Crans Montana Forum. Les représentants des organismes fondateurs, réunis à Bruxelles le 8 mars, ont largement débattu de la compétitivité des ports africains. Pour poser le sujet en termes concrets, Yves de Moor, directeur du groupe DML, négociant en matériaux de construction, a exposé un cas pratique. Il a un contrat pour approvisionner la cimenterie de Bangui en clincker. « Un sac de ciment coûte 22 $, soit le prix le plus cher du monde. La République centrafricaine a besoin de nouvelles constructions. Le coût de passage portuaire est un élément majeur dans ce coût », a expliqué Yves de Moor. Il continue en expliquant que le prix de la tonne de ciment arrivée à Pointe-Noire est de 88 $, les frais de manutention entrent pour le même montant. Il a cherché des solutions en passant par le port de Matadi, de Boma ou de Cabinda mais, au final, soit le coût de passage portuaire grève sérieusement le coût du sac de ciment, soit les prestations proposées sont trop aléatoires. Un point de vue que le directeur général du Conseil burkinabé des chargeurs, Ali Traoré, a exposé. « Le coût de passage portuaire est devenu un élément dont les conséquences se répercutent jusqu’au panier de la ménagère. Nous devons agir pour réduire ces coûts par la modernisation des ports et la réduction des taux de fret. » Le directeur général du CBC a plaidé pour une baisse des taux de fret des armateurs desservant l’Afrique. « Nous comprenons les difficultés actuelles des compagnies maritimes. Nous constatons que la baisse des taux de fret des lignes avec l’Afrique est plus faible que celle sur l’Asie. Il faut revoir tout le système », a continué Ali Traoré. Quant à la gestion des ports, il appelle à une plus grande concurrence entre les opérateurs portuaires pour « éviter les monopoles dans les ports africains. »
Pour le directeur Afrique et Moyen-Orient de APM Terminals, Peder Sondegaard, « il existe plus d’opportunités que de problèmes en Afrique. » Un potentiel que le manutentionnaire souhaite bâtir par des partenariats publics/privés. « Une solution qui apporte une expertise, des financements et un savoir-faire international. » Pour le responsable de APM Terminals, un terminal n’est pas uniquement une question d’infrastructure mais aussi de procédures. « Un conteneur peut mettre jusqu’à 22 jours pour sortir. Ce délai est trop long », estime l’opérateur. Une donnée qui joue un rôle majeur pour l’Office guinéen des chargeurs. « Nous devons moderniser les méthodes de travail en Afrique, a souligné Mohammed Cheick Fofana, directeur de cet organisme. Nous avons créé un portail pour une dématérialisation et une amélioration du dédouanement. Nous voulons apporter une assistance aux chargeurs mais pour cela il faut aussi de la formation. »
Selon Peder Sondegaard, d’APM Terminals, une partie de la compétitivité des ports en Afrique se joue aussi sur son lieu et ses relations avec la ville. « Il faut sortir les ports de la ville pour éviter les goulets d’étranglement. » Une demande qui s’accompagne d’une plus grande fluidité des transports terrestres. Anatole Kikwa, directeur général de l’Ogefrem (Office de gestion du fret multimodal) en République démocratique du Congo, a souligné la diversité des corridors intérieurs en Afrique. Ainsi, pour la partie est de la RDC, les chargeurs utilisent les ports de Dar es Salaam et Mombasa plutôt que ceux de la RDC. Quant aux ports de la côte atlantique, Boma, Matadi et Banana, ils sont dans un état vétuste. « Nous appelons de nos vœux la construction d’un pont rail-route pour permettre de sortir rapidement les marchandises vers le centre du pays. Il faut avoir un grand port moderne avec des capacités nautiques idoines », a continué Anatole Kikwa.
Le Club des ports africains
Le Club des ports africains a été créé au sein du Crans Montana Forum en octobre 2012. Il réunit les principaux opérateurs portuaires et les décideurs maritimes africains. Il offre aux personnalités liées à ce secteur la possibilité de se joindre aux participants. Il a pour vocation d’être une plateforme privée pour des rencontres et la création de réseaux, mais aussi pour des discussions techniques entre membres. Le Club dispose d’un comité stratégique chargé d’assurer la cohérence des actions entreprises. Ce comité est présidé par Alain-Michel Luvambano, secrétaire général de l’Omaoc (Organisation maritime de l’Afrique de l’ouest et du centre) et Michael Achagwe Luguje, vice-président, qui assure la fonction de secrétaire général de l’AGPAOC (Assemblée de gestion des ports d’Afrique de l’ouest et du centre).