JOURNAL DE LA MARINE MARCHANDE (JMM): COMMENT EST ORGANISÉE LA TASK FORCE?
Shadya Omar (S.O.): Elle comprend stricto sensu une vingtaine de personnes, comptant d’autres personnels d’Interpol émanant d’autres unités de l’organisation comme notre centre de commande et de coordination, ou de nos bureaux nationaux ou régionaux, en Afrique et au Moyen-Orient notamment.
JMM: ET COMMENT FONCTIONNE-T-ELLE?
S.O.: Nous privilégions trois domaines d’intervention: l’amélioration de la collecte des preuves, l’échange d’informations et la mise sur pied de capacités d’intervention efficaces. La formation constitue l’un de nos outils majeurs: à destination des forces de police – et accessoirement des magistrats – de nos pays membres, elle vise à les familiariser avec la dimension transnationale de la piraterie et à les faire travailler en commun. Ce dernier point est une des clés de la réussite, même dans les affaires strictement nationales, car il est fréquent que dans un même pays, les différentes forces impliquées – police, marine, douanes, etc. – rechignent à coopérer entrer elles. Sur le plan opérationnel, nous avons constitué un Incident Report Team (IRT). Cette équipe d’experts seconde les forces nationales de police en cas de besoin, à leur demande expresse. Elle aide par exemple à la constitution de preuves ou au débriefing des équipages attaqués. L’IRT est intervenue trois fois en 2012. L’information collectée nous est communiquée par nos États membres par notre système de communication I-24-7 (pour indiquer qu’elle est opérationnelle 24 h sur 24 et 7 jours sur 7). Nous avons aussi une base de données globale sur la piraterie maritime.
JMM: EN QUOI LA BASE DE DONNÉES GLOBALE SUR LA PIRATERIE MARITIME DIFFÈRE-T-ELLE DES BASES DE DONNÉES DÉJÀ EXISTANTES, COMME CELLES DE RECAAP OU DU CENTRE DE COLLECTE D’INFORMATIONS SUR LA PIRATERIE DU BMI?
S.O.: Ce sont des outils complémentaires. Les bases de Recaap et du BMI recensent des informations stratégiques, telles le nombre et la localisation des incidents. La base de données globale sur la piraterie maritime est une base opérationnelle, dans laquelle figurent des données sensibles sur les pirates et leurs activités.
JMM: PLUS LARGEMENT, COMMENT TRAVAILLEZ-VOUS AVEC LES AUTRES ORGANISATIONS LUTTANT CONTRE LA PIRATERIE?
S.O.: Nos coopérations sont multiples. Nous participons par exemple au groupe de travail de l’ONU sur la piraterie, qui cherche à définir les stratégies de lutte. Nous collaborons aussi avec l’Otan et Europol, et avons signé en novembre un mémorandum de coopération avec Recaap, comportant échanges d’informations et assistance mutuelle. Nos contacts avec les organisations professionnelles du monde maritime sont également nombreux.
JMM: QUELLES ÉVOLUTIONS RÉCENTES VOYEZ-VOUS ÉMERGER DANS LA PIRATERIE MARITIME?
S.O.: Le nombre des incidents est relativement stable en Asie et a tendance à légèrement reculer en Afrique de l’Est. Il y a par contre une recrudescence en Afrique de l’Ouest, où la piraterie sévit surtout sous forme de vols à bord des navires.