L’objectif du projet Safeguard, financé par l’Union européenne, a été de mesurer en temps réel le temps de réaction des passagers en cas d’alerte. En tout, 4 300 passagers ont participé à cinq exercices d’évacuation entre 2009 et 2011. Ces exercices se sont déroulés sur trois navires – un ferry doté de cabines, un ferry sans cabines et un navire de croisière – appartenant à trois compagnies maritimes distinctes (Color Line, Royal Carribean cruises et Minoan Lines). Une équipe de chercheurs internationaux a pu étudier le temps de réaction des passagers au signal d’alarme, ainsi que le chemin parcouru pour accéder aux points de rassemblement, grâce à l’installation de caméras vidéo et d’un système de détection infrarouge.
Les chercheurs ont observé que le temps de réaction des passagers varie en fonction de l’endroit où ils se trouvent au moment où retentit le signal d’alerte. Les voyageurs qui sont dans leurs cabines tardent plus à réagir que ceux qui sont dans les espaces publics (restaurants, cafés, etc.). Par ailleurs, les données collectées sur les trois navires ont montré que les passagers qui voyagent sur le navire de croisière sont également plus lents à réagir que les passagers des ferries. Selon les chercheurs, cette différence peut s’expliquer par la différence d’âge entre les deux catégories de voyageurs.
Les conclusions du projet Safeguard, financé par l’Union européenne, ont été soumises à l’International Maritime Organisation (IMO). Les chercheurs qui ont participé à cette étude grandeur nature espèrent que l’IMO utilisera les résultats de l’étude pour améliorer ses recommandations en matière de protocoles d’évacuation (Maritime Safety Committee circ. 1238). Pour le moment, les recommandations de l’IMO sont principalement basées sur des simulations sur ordinateur et ne prennent pas en compte un certain nombre de facteurs qui peuvent, selon les chercheurs, peser sur le temps de réaction des passagers au signal d’alarme en cas d’incident (comportement des familles, impact de la chaleur et de la fumée, angle d’inclinaison du navire etc.). Indépendamment des conclusions du rapport Safeguard, l’IMO a annoncé le 3 décembre qu’elle souhaite voir modifier les règles qui encadrent les exercices de sécurité sur les navires de passagers qui effectuent des trajets de plus de 24 heures (voir encadré).
Des passagers soulagés de participer à ces exercices
Au terme du séminaire de présentation des résultats, Ed Gallea, professeur à l’université de Greenwich, a encouragé les compagnies maritimes à réaliser chaque année des exercices d’évacuation pour que les équipages soient « capables de gérer l’effet de foule observé lors des exercices ». D’autant que d’après cet expert, il y a une demande de la part des passagers. « Sur le Jewel-of-the-Sea de Royal Carribean Cruise où nous avons réalisé un des cinq exercices, les passagers m’ont demandé de tenir une conférence sur le projet Safeguard », a témoigné Ed Galea. « Je n’ai jamais eu un public aussi attentif! » Chris Van Raalten, chargé de la sécurité pour Royal Carribean Cruise, a confirmé de son côté que, depuis le naufrage du Costa-Concordia le 12 janvier, les clients de la compagnie maritime réagissent de manière très positive aux exercices de sécurité.
Appel aux rescapés du Costa-Concordia
Pour aller plus loin dans l’amélioration des procédures d’évacuation, le professeur Galea préconise de recueillir les témoignages des rescapés du Costa-Concordia. « Malheureusement, pour le moment, je me suis heurté à un mur, a-t-il déploré. Or il y a urgence à les interroger. Plus le temps passe et moins les témoignages seront fiables », a fait remarquer le professeur de l’université de Greenwich qui cherche à rentrer en contact avec les rescapés du navire de croisière.
L’IMO demande une accélération des exercices d’évacuation
Au terme de la session qui s’est déroulée du 26 au 30 novembre, la commission de sécurité maritime de l’International Maritime Organisation (IMO) a conclu à la nécessité d’accélérer les exercices d’évacuation sur les navires de passagers dont les rotations dépassent les 24 heures. « Il devrait être obligatoire d’organiser un exercice de rassemblement des passagers avant le départ du navire ou immédiatement après », a conclu la commission, « à la lumière de l’accident du Costa-Concordia ». Actuellement, les compagnies sont obligées d’organiser un tel exercice « dans les 24 heures » qui suivent l’embarquement des passagers lorsque le trajet dépasse les 24 heures. Cette proposition d’amendement de la convention internationale Solas va être soumise aux membres de l’IMO. L’organisation espère que l’amendement sera adopté lors de sa prochaine session, en juin 2013, et qu’il entrera en vigueur en 2014.