La Cour des comptes a procédé à l’évaluation du dispositif de contrôle de la sécurité des navires dans le cadre de sa mission d’évaluation des politiques publiques. Le travail mené a eu pour objectif de « mesurer les performances et d’apprécier l’efficacité et la pertinence du dispositif public de contrôle de la sécurité des navires au regard des deux missions de l’État » dans ce domaine, indique la Cour dans un rapport publié le 5 décembre. La première mission est conduite au titre de l’État du pavillon à l’égard des navires battant pavillon national et soumis au droit français. Les contrôles s’exercent sur une flotte d’environ 18 200 navires dont 5 400 se livrent à des activités commerciales et 12 800 à des activités de pêche et de conchyliculture en métropole et outre-mer. La compétence de l’État du pavillon repose sur la convention des Nations Unies de 1959 sur la haute mer. La seconde mission est accomplie au titre de l’État du port à l’égard des navires étrangers faisant escale en France. Ces derniers représentent environ 6 000 navires par an, soit 15 000 à 16 000 escales annuelles. Les contrôles réalisés au titre de l’État du port relèvent du Mémorandum d’entente de Paris (MOU) signé en 1982 et aussi des directives européennes, notamment les paquets Erika. « Le dispositif de contrôle de la sécurité des navires est entièrement sous la responsabilité de la direction des Affaires maritimes, dépendant de la direction des infrastructures, des transports et de la mer, placée sous l’autorité du ministre délégué chargé des Transports, de la mer et de la pêche », rappelle la Cour.
Une profonde réforme est nécessaire
Le constat de la Cour des comptes à l’issue de son enquête est sans appel. « Le dispositif public, mis en place pour les contrôles de l’État du pavillon, produit des résultats de qualité inégale. En matière de contrôles d’État du port, le dispositif ne parvient pas à atteindre les objectifs qui lui sont fixés. » Et la Cour de conclure que « le dispositif existant n’est plus adapté aux priorités de la sécurité maritime de la France. » Selon le rapport, le dispositif français de contrôle de la sécurité des navires, conçu à l’origine pour les contrôles de l’État du pavillon et armé principalement par d’anciens navigants, s’est développé en dix ans en réponse à l’urgence résultant des sinistres de l’Erika et du Prestige, sans anticipation ni ligne directrice. Il souffre aujourd’hui d’une situation relativement figée et difficile en termes de gestion des ressources humaines dans laquelle sont associés des personnels à statuts différents mais appelés à l’exercice de missions similaires au sein d’un même ensemble. La récente réorganisation territoriale des services de l’État qui sépare des services traditionnellement placés dans la même chaîne hiérarchique et qui œuvre de façon proche et complémentaire à la sécurité des navires et des équipages, porte aussi atteinte à l’unité et à l’efficacité du système, souligne le rapport. Les performances insuffisantes du dispositif mettent donc en cause la pertinence de son organisation. Aussi, la Cour appelle à « une profonde réforme et à une réorganisation du système de contrôle de la sécurité des navires et de leurs équipages à moyens constants vu le contexte de grandes tensions budgétaires. » Pour cela, le rapport présente six recommandations:
– Améliorer le pilotage stratégique de la politique de sécurité des navires sous pavillon français.
– Définir pour la décennie à venir une politique de ressources humaines cohérente avec les objectifs stratégiques de la politique de sécurité des navires.
– Améliorer et fiabiliser les bases de données et systèmes d’informations gérés par l’administration des Affaires maritimes pour renforcer la qualité et l’efficacité des contrôles.
– Renforcer le rôle moteur des directions interrégionales de la mer dans la nouvelle organisation administrative relative à la sécurité maritime.
– Procéder à la réorganisation du réseau des centres chargés des contrôles et aux réallocations des moyens permettant une meilleure adéquation du dispositif aux charges réelles et aux priorités résultant des enjeux européens et nationaux.
– Fixer des objectifs et indicateurs pertinents pour rendre compte des résultats et performances du système de contrôle français des navires étrangers dans le cadre des obligations européennes au titre de l’État du port.