Parts de marché des ports français: toujours aussi flou

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Il faut porter au crédit de l’UPF, un certain réalisme: celui de tenter de réfléchir à ce qu’il conviendrait de faire pour développer certains types des trafics à partir d’une estimation de l’existant, des faits, et non pas en dessinant des cercles concentriques sur une carte, en oubliant l’existence d’autres séries de cercles concentriques, mais dont le centre est situé outre-quiévrain. Le 2 octobre, Pierre Franc (bureau des études économiques générales de la DGITM) a rappelé la difficulté de déterminer la part des trafics conteneurisés engendrés par le commerce extérieur français qui passent par les ports étrangers (situés toutefois dans le même espace économique). En 1986, 14 % des trafics imports et 21 % des exports passaient par des ports du Benelux. En 2004, les taux montent respectivement à 51 % et 43 %. Entre 2004 et 2011, il n’y a pas de données précises. De mise en place du marché unique (1992) en allégements des procédures douanières, les traces des flux physiques de conteneurs se perdent. Même le trafic conteneurisé généré par la France, quels que soient les ports de transit, est l’objet d’une « incertitude importante ».

Même si « l’essentiel » des marchandises conteneurisées chargées ou déchargés dans les ports français a pour origine/destination la France, la connaissance des trafics portuaires nationaux est insuffisante car une partie des trafics français passe par plus d’un port français. Par ailleurs, sont comptabilisés dans les trafics des ports français les transbordements de boîtes totalement étrangères au pays.

Étudier les positions stratégiques

Devant cette situation, le ministère a concentré ses efforts sur le niveau régional: étudier le commerce extérieur conteneurisé des régions les plus proches des ports français, de celles qui présentent un caractère « stratégique » pour les grands ports maritimes ou celles dont on sait ou craint qu’une partie des flux s’écoule par des ports étrangers (quoique géographiquement « naturels »). Ont donc été étudiées les 50 000 EVP environ générés par la région Rhône-Alpes et le 1,4 MEVP de l’Île-de-France. Dans le premier cas, entre 10 % et 12 % passent par Anvers. Le principal problème réside dans l’estimation des flux empotés ou dépotés dans les ports du Benelux et transitant en semi-remorques ou caisses mobiles entre ce range portuaire et la région Rhône-Alpes.

Dans le second cas, globalement 43 % des flux passent par le Benelux. Mais le facteur discriminant est la distance entre lieu d’empotage/dépotage et le port. S’il s’agit de l’Île de France, 21 % passent par le Benelux. Mais si ce lieu se trouve dans le Nord-Pas-de Calais, sans surprise, le chiffre monte à 93 %.

Pour récupérer le plus facile (les 21 %), il faudrait maintenir le calme dans les ports français, « harmoniser » les conditions de paiement de la TVA en Europe, et améliorer les liaisons terrestres avec l’Ile-de-France. Et, plus finement, savoir de quoi l’on parle en distinguant l’import de l’export et étudier les « motivations » des donneurs d’ordre lorsque leurs flux ne passent pas majoritairement par les ports français.

À plus ou moins long terme, Pierre Franc propose même de « tenter » de développer un indicateur macro d’attractivité des ports français.

Un long naufrage statistique

Au printemps 2011, l’Union des ports de France diffuse une étude réalisée à sa demande sur « les parts de marché des ports française et le trafic “transbordé” dans les ports étrangers ». Devant le désert statistique et après avoir souligné que seule la notion de part de marché « accessible » aux ports français avait un peu de sens, l’étude estime qu’il faudra plusieurs années de travail pour disposer d’un indicateur de compétitivité et d’attractivité des ports français. En décembre 2010, deux membres du conseil général de l’Environnement et du Développement durable tentent de réveiller les consciences dans un rapport intitulé « Évolution du fret terrestre à l’horizon de dix ans ». René Genevoix et Alain Gilles soulignent que la situation a continué à « se dégrader: on voit apparaître, officiels ou non, des chiffres de plus en plus divers, voire fantaisistes. Il serait nécessaire […] de se pencher sérieusement sur cette question et de voir s’il est possible, au moins dans un certain champ, de reconstituer des indicateurs suffisamment fiables. Ceci en particulier pour les conteneurs, trafic stratégique et par essence très mobile ».

En mars 2007, le rapport 102 du Conseil national de l’information statistique recommande « d’améliorer la connaissance des flux conteneurisés et rouliers; […] d’approfondir, moyennant un benchmark efficace, le suivi des grandes évolutions internationales dans le domaine de la logistique et de la conteneurisation ». La méconnaissance de la réalité n’est pas spécifique aux trafics portuaires, elle concerne également le ferroviaire: « La mauvaise connaissance du fret ferroviaire constitue la faiblesse majeure, soulignée par tous… à l’exception notable de l’opérateur dominant. » En avril 2012, estimant que « des statistiques fiables et de haute qualité sont en effet essentielles à une prise de décision fondée sur des données probantes », la Commission européenne a proposé de renforcer l’indépendance des instituts nationaux de statistique et « en particulier » de leur directeur et d’obliger les États membres à signer des « engagements en matière de confiance », qui réaffirmeront au niveau politique « le plus élevé » leur obligation de respecter « pleinement » l’indépendance et le code de bonne pratique de la statistique européenne.

VNF organise les fuites

Le 8 novembre, a été inaugurée la nouvelle porte de garde du port fluvial de Givet (Ardennes), explique le maître d’ouvrage VNF. Cette nouvelle protection contre les crues doit permettre le passage de bateaux de 1 350 t et autres paquebots fluviaux.

VNF souligne que « située à l’extrémité d’un itinéraire à grand gabarit reliant les ports de la mer du Nord au département des Ardennes, la zone portuaire de Givet (presque 500 000 t) constitue une véritable tête de pont fluvial » pour la région Champagne-Ardenne et une opportunité pour le tissu économique local. Des réflexions sur un partenariat avec le port autonomie de Namur et sur une extension de la zone portuaire de Givet ont « également été menées à bien ».

Combien de conteneurs risquent ainsi d’échapper aux ports français?

Il y a une trentaine d’années, la SNCF avait provoqué une certaine émotion chez certains parlementaires français en organisant des trains complets entre la France et Anvers. Ils se sont donc plaints auprès du ministre, considérant qu’une entreprise publique ne devait pas favoriser « l’évasion » des trafics, même si la demande est bien présente.

« En tout dernier ressort, la plus courte distance géographique est le critère minimal et le plus certain pour définir un hinterland », rappelait l’auteur de l’étude parue au printemps 2011 pour le compte de l’Union des ports.

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