Détecter les attaques pour les éviter

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Dans des bureaux de la banlieue d’Angoulême, un écran radar montre des dizaines de points parfois si proches qu’ils forment alors un nuage opaque. Olivier Lacrouts met en route le M-Plot conçu par sa société, Diadès Marine. Le nuage s’éclaircit, les points se disjoignent. Chacun, redevenu unique, correspond à un navire de petite ou moyenne taille. Puis entre en scène le SeaSight, également mis au point par Diadès Marine, qui analyse le comportement de ces navires plus petits. L’un d’eux file à vive allure et devrait se trouver dans la demi-heure à proximité du navire équipé du même radar que celui dont les résultats sont analysés en Charente. Le mouvement de ce petit navire ressemble fort à une attaque pirate. L’alarme du radar retentit à la passerelle du navire au large des eaux somaliennes. Le commandant est averti du danger. À lui de dévier sa route pour éviter la mauvaise rencontre. Et aux garde-côtes d’intervenir.

Olivier Lacrouts a créé l’an dernier sa société Diadès Marine, spécialisée dans la détection et la prévention des attaques pirates. À l’aide de ses outils M-Plot et SeaSight, directement reliés aux radars des navires que la société accompagne, la société propose aux compagnies maritimes une « solution d’évitement et de prévention qui permet de réduire significativement le niveau de risque lié à la piraterie ». Ces deux outils sont complétés par un troisième, C-AIS, qui permet à des navires se trouvant sur une même zone de partager leurs informations pour affiner encore la détection. « Ainsi il est possible, à l’image d’un Coyote des mers, d’anticiper encore plus les dangers et de collaborer plus étroitement entre navires et autorités. »

Mettre la surveillance en commun

Alors que les systèmes radar servent habituellement à prévenir d’éventuelles collisions, Olivier Lacrouts exploite les informations qu’ils donnent pour déceler les mouvements suspects d’unités dans les parages du navire qu’il suit. « Nous imaginons leur mobilité, leur route. » Et à partir de leur comportement, les ordinateurs de Diadès Marine évaluent les possibles déplacements du navire et le risque qu’ils représentent pour le navire marchand. « Nous cherchons des solutions innovantes, humanistes et pacifiques plutôt que des solutions violentes au problème de la piraterie », souligne Olivier Lacrouts, convaincu que la riposte armée aux attaques de pirates ne peut que provoquer la surenchère. « Pour endiguer le phénomène, ajoute-t-il, il est nécessaire d’impliquer plus d’acteurs. » L’intervention des militaires a déjà montré toute son efficacité. Cependant, elle ne résout pas le problème de la piraterie, mais sert surtout à en ralentir la progression.

« Il faut aborder la question autrement, plaide le patron de Diadès Marine, et permettre aux navires d’être plus autonomes sur leur propre sécurité, leur capacité d’alerte. » Il va plus loin encore en proposant la mise en commun des informations obtenues par chaque navire. Il imagine un système coopératif où chaque navire participerait à cet effort de surveillance. « Cela permettrait de gagner en sécurité dans le golfe d’Aden et de pouvoir donner des préavis suffisants aux militaires pour qu’ils puissent intervenir. À terme, c’est ainsi qu’on peut venir à bout de la piraterie. » Un tel système permettrait aussi de réduire le coût de la sécurité.

Rassurer le personnel

Aujourd’hui, seuls les militaires sont formés à l’analyse des images radars. À la passerelle d’un navire, le radar n’est qu’un outil parmi d’autres et les officiers n’ont pas appris à y lire autre chose que le risque d’une collision. L’attention qu’on y prête se réduit encore lors des changements de quart. « Il faut savoir détecter l’environnement, identifier les menaces, mais pas leur tirer dessus. Nous avons les mêmes informations que le commandant, mais une analyse différente des données fournies par le radar. » Les outils de Diadès Marine font le travail à la place de l’homme. Les déplacements de navires ont été modélisés de façon à pouvoir être interprétés par l’ordinateur. Olivier Lacrouts donne l’exemple de ce qui apparaît sur l’écran radar comme un navire de taille moyenne qui se sépare en deux petits qui se mettent en route ensemble à près de 30 nœuds vers un troisième navire. Ou encore celui d’une poursuite depuis l’arrière du navire, pas suivie par les radars puisqu’il n’y a alors aucun risque de collision. Dans ces deux cas, le risque d’une attaque pirate est clair. Le commandant a toutes les clés en main pour prendre sa décision, « changer de route et foncer ».

Diadès Marine emploie sept personnes, notamment informaticiens et électroniciens. Ses outils permettent de rassurer le personnel embarqué et de réduire son stress, de rassurer les clients quant à leur marchandise et de faire baisser les primes d’assurance. Ils intéressent évidemment les compagnies maritimes, ainsi que les exploitations off shore de pétrole, les gardes-côtes et les travaux en mer. Ils devraient obtenir leur labellisation dans les deux prochains mois.

Spécialiste de la protection navale

Ingénieur, Olivier Lacrouts a commencé à travailler chez Thales dans les domaines de l’aéronautique navale, de la défense, de la stratégie dans les secteurs naval et militaire maritime, puis il a poursuivi chez Nexeya où il a dirigé les activités de défense navale. C’est dans ce cadre qu’il a travaillé à la maintenance des frégates de surveillance françaises engagées dans les missions de protection contre la piraterie et dans la lutte antidrogue. À ce titre, il a imaginé des solutions, contractées par l’État, qui équipent aujourd’hui ces frégates.

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