La France, 2e puissance maritime par l’étendue de sa ZEE (qu’elle n’arrive toujours pas à protéger de façon efficace), trouvera-t-elle les moyens de réunir 100 000 € rapidement? Rapidement, car le temps presse. L’échouement dramatique du Costa-Concordia a ouvert une brèche dans l’immobilisme ambiant en matière d’assistance aux navires de grand fardage. Il faut s’y engouffrer très vite car les questions sans réponse perdurent. Au large d’Ouessant, ou de Villefranche-sur-Mer (où se concentrent les grands paquebots), pourra-t-on empêcher un grand navire ayant perdu sa propulsion, de partir à la côte, un jour de grand vent? (même si dans certaines circonstances, échouer un navire peut être une solution judicieuse; souvenons-nous du MSC-Napoli).
Nous n’avons pas le temps de monter une usine à gaz à la façon de l’administration française ou européenne pour mobiliser, dans six mois, les sommes nécessaires. Pour une fois, l’industrie pourrait se prendre en main et ainsi s’offrir un « droit à communiquer » sur un sujet d’intérêt général dans un pays très côtier. Nul doute que l’opinion publique se passionne pour les planchers en bambous des conteneurs de la CMA CGM ou les essais de biocarburants de Maersk Line, mais elle devrait être encore plus attentive aux efforts financiers de ces compagnies, sans oublier MSC, souvent impliquée, en matière de prévention des risques. Les Abeilles International tirent un certain avantage des affrètements payés par le contribuable pour protéger les côtes. Un retour sur investissement serait le bienvenu, en cash.
Le professionnalisme du BV ne peut que se renforcer en disposant les données chiffrées acquises lors des essais.
Les pilotes se présentent facilement comme constituant un élément clef de la sécurité maritime, faisant partie à l’équipe d’évaluation héliportée à bord d’un navire désemparé. La Fédération ne peut pas hésiter à participer à cette recherche opérationnelle.
Les opérateurs de croisières en France pourraient y trouver matière à faire parler d’eux en termes positifs et réels.
Il y a quelques années, les assureurs maritimes français se disaient préoccupés par le gigantisme des navires. Voilà l’occasion d’objectiver cette préoccupation.
Le village maritimo-portuaire français a-t-il encore suffisamment d’énergie pour vite trouver 100 000 €? Il ne s’agit pas d’opposer les tenants des simulations numériques à l’expérimentation réelle. Il s’agit de savoir rapidement si le gigantisme des navires constitue une réelle menace pour les côtes françaises et leurs futurs parcs éoliens en mer. Il s’agit de savoir s’il y a encore de l’espoir dans ce pays.
Manœuvres à effectuer
En cinq jours, devront être réalisées les manœuvres suivantes:
– navire stationnaire: mesure des forces dues au vent de travers et de face pour vérifier des formules.
– navire en travers de la houle (en roulis) à ramener face à la houle par remorqueur croché sur l’avant ou sur l’arrière.
– idem avec de la gîte.
– idem avec machine opérationnelle mais sans barre.
– mise à la cape du navire.
– remorquage du navire face à la houle avec et sans vent arrière
– idem sans houle, sans vent, mais en eau restreinte.
Seront mesurés et enregistrés, la trajectoire du navire (et ses paramètres) ainsi que la force sur la remorque et l’angle dans le plan horizontal.
Le vent maximal sera de 40 nœuds sur un front de 300 m; et la houle de 3,6 m avec une période de 8 s sur un front de 700 m. La maquette employée sera l’Otello. À l’échelle 1/30, elle représente un porte-conteneurs de 14 000 EVP d’un fardage de 15 000 m2. Dans ces conditions, le remorqueur de Port-Revel dispose d’une puissance de traction similaire à celle de l’Abeille-Bourbon.
Les essais se dérouleront sur cinq jours pour un coût de l’ordre de 100 k€ a estimé Arthur de Graauw, directeur de Port-Revel.
Le temps de dégel du lac sera mis à profit pour collecter les fonds nécessaires. La supervision des essais pourrait être confiée à l’Institut français de navigation.