Davantage de papier mais moins de confiance à bord

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Le management des navires baigne dans le respect des procédures. Au 4e forum Marisk de Nantes, les navigants ont pointé les risques de cette conception de plus en plus virtuelle de la mer.

Le premier facteur de risque en mer, c’est l’humain. Suivant ce principe, le code ISM, généralisé depuis 2002, a pour conséquence, pour les participants à la conférence sur les outils de management du 4e forum Marisk de Nantes, une « prise de distance » entre les hommes de la terre et ceux du navire et, à bord, entre la hiérarchie et l’équipage. « Autrefois, un navire devait être autonome. Désormais, du fait du progrès des télécommunications, à quand la conduite d’un navire de la terre à l’aide d’une simple télécommande? », constate d’abord Raphaël Baumler, ancien commandant de bord et professeur à l’Université maritime mondiale de Suède. Deux sociologues, Syamantak Bhattacharya, du centre de recherche de la finance, de l’économie et de la logistique marines de Plymouth, en Angleterre, et Claire Flecher, du laboratoire IDHE de l’université de Nanterre Paris X, ont mesuré les effets de la « paperasse » ISM. Claire Flecher a observé les marins face à cette obligation « d’écrire ce qu’ils font et de faire ce qu’ils ont écrit ». Pour elle, cette « normalisation » nie leur expérience parce qu’elle vient leur dire quoi faire et « que les consignes suffisent ». Elle note la tendance à remplir les check list sans regarder, à ne pas remplir ou à noyer d’informations la documentation demandée. Cela permet au marin de conserver une certaine autonomie. Cette documentation incarne aussi les nouveaux enjeux de notre époque: traçabilité et responsabilité individuelle. Le navigant vit mal cette situation. « Les “bricolages” dans les rapports écrits sont nombreux », note Claire Flecher. La relation au commandant, supérieur hiérarchique et, de toute façon, premier responsable en cas de problème, manque de confiance. Situation aggravée par le fort turn-over des équipages.

Syamantak Bhattacharya, de son côté, constate que les armateurs et les navigants ont des conceptions opposées du code ISM. Outil facilitateur pour les premiers, moyens de contrôle pour les autres. « L’ISM est beaucoup contournée », note-t-il lui aussi. Pour, au final, faires des meilleures conditions d’emplois des équipages un facteur de sécurisation des navires bien plus important que l’ISM. « On oublie la réalité de la mer qui devient un monde virtuel », s’alarme Jean-Charles Cornillou, expert en doctrine technique du ministère du Développement durable. Tandis qu’un membre de l’assistance redoute « que les catastrophes, peut-être moins nombreuses, soient de plus en plus graves ».

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