Nous avions indiqué dans un article paru dans le JMM du 7 octobre (mais rédigé avant la prise de position de la Commission européenne en date du 29 septembre) que les modifications du texte de l’article 262 II du CGI, visant à limiter les exonérations de TVA aux seuls navires affectés à la navigation en haute mer, devraient être considérées comme une adaptation sémantique du dispositif d’exonération en vue de mettre le droit fiscal français en cohérence avec le dispositif de la directive européenne. L’ajout de la précision « en haute mer » ne devrait pas créer de conséquences pratiques dans la majeure partie des situations. Cette analyse s’appuyait en particulier sur la réponse écrite apportée par l’administration fiscale le 22 février, interrogée sur la nature des critères requis pour bénéficier de l’exonération de TVA prévue à l’article 262 II du CGI aux navires de commerce. L’administration avait alors indiqué que l’exonération de TVA applicable aux opérations de livraison, de réparation, de transformation, d’entretien et d’affrètement et de location portant sur les navires de commerce affectés à la navigation en haute mer était soumise à trois critères, à savoir l’inscription du navire comme navire de commerce en France ou à l’étranger, la présence à bord d’un équipage permanent, et l’affectation des navires aux besoins d’une activité commerciale.
En ne reprenant pas parmi les conditions d’éligibilité à l’exonération de TVA, comme le demandait la Commission Européenne, la condition de navigation en haute mer, l’administration fiscale neutralisait dans les faits les conditions d’affection à la navigation en haute mer qui avait été ajoutée au dispositif de l’article 262 II 2o du CGI à la demande expresse de la Commission européenne. Cette modification intervenue au 1er janvier était ainsi privée de tout effet.
L’administration fiscale française entendait ainsi maintenir sous couvert d’un changement sémantique de la loi une exonération large de TVA aux navires assurant un trafic rémunéré de voyageurs ou utilisés pour une activité commerciale sans exiger qu’ils soient affectés à la navigation en haute mer.
Piquée au vif par cet affront, la Commission européenne a donc décidé de saisir la Cour de Justice en vue de faire condamner la France et l’amener à modifier définitivement son dispositif d’exonération dans un sens plus restrictif conforme à la direction européenne en vigueur.