Charles Claden: « L’Abeille-Bourbon est capable de remorquer des bateaux de 350 000 tonnes. L’essentiel, c’est qu’ils disposent de points de remorquage solides. En général, les compagnies les prévoient mais pas toutes. Mais si ce type de bateau devait échouer, il faudrait des semaines, voire des mois pour le prendre en charge. Autre phénomène qui prend de l’ampleur, le développement des grands navires à passagers, ces paquebots qui peuvent accueillir plus de 5 000 personnes. La bonne gestion de la sécurité dépend d’eux. Ils ont des moyens adaptés. Nous avons déjà remorqué des ferries et nous pourrions remorquer un paquebot, mais, en cas d’incident majeur, le sauvetage de l’ensemble des passagers, nécessiterait des moyens colossaux. »
En ce qui concerne l’éventuel remorquage de grands et très grands porte-conteneurs, lors d’une conversation téléphonique avec le JMM, Charles Claden a précisé plusieurs points: les calculs théoriques sur les puissances nécessaires au croc pour maintenir des navires de plus de 7 000 m2 de fardage ont leur limite. Maintenant, il faut faire des tests en vraie grandeur, et de préférence avec un vent d’au moins six Beaufort, pour « voir ». Cela ne prendra qu’environ quatre heures, estime Charles Claden. C’est en testant le remorquage d’un VLCC après l’accident de l’Amoco-Cadix (mars 1978) que l’on s’est rendu compte qu’un pétrolier dont le tirant d’eau dépasse les 18 m environ, remonte naturellement au vent en vitesse avant très lente, même avec une barre bloquée.Le tirant d’eau des futurs Triple-E de Mærsk ne dépasse pas les 16,5 m avec un fardage infiniment plus important. Autre préoccupation du commandant Claden, le remorquage d’un grand porte-conteneurs en fuite (c’est-à-dire par vent arrière) et à petite vitesse, constitue une configuration favorable à la survenance d’un roulis paramétrique; la pontée pourrait ne pas y résister très longtemps. Interrogation complémentaire, la tenue à la cape d’un grand porte-conteneurs en cours de remorquage: par vent et mer de l’avant, il est possible qu’à cause de son fardage, le navire fasse des embardées de part et d’autre de l’axe de remorquage. De sorte que les vagues arriveraient de deux à trois quarts de son avant, constituant ainsi l’une des conditions à la survenance du roulis paramétrique. Retour à la situation précédente.
On ne peut pas vanter les très faibles émissions de gaz à effet de serre (GES) à l’unité transportée de ses très grands porte-conteneurs, et ne pas être favorable à l’idée d’investir quatre heures afin de vérifier, d’une part, la présence et l’efficacité des dispositifs d’urgence de prise de remorque et de la résistance des points de remorquage, et d’autre part, le comportement du flotteur. Faudra-t-il prévoir une aide financière en R&D au titre du navire du futur, par exemple?
CMA CGM exemplaire
Les GES occupent beaucoup les esprits, beaucoup moins le fait que seuls les pétroliers de 20 000 tpl et plus, neufs ou anciens, ont l’obligation d’être équipés à l’avant comme à l’arrière, d’un dispositif d’urgence de prise de remorque.
Sur une base purement volondaire, CMA CGM équipe tous ses navires neufs, au-delà de 8 500 EVP, d’un système de remorquage d’urgence. Ce système, installé sur la plage avant du navire, consiste en un Smit Bracket et une chaine d’une dizaine de mètres de long.
Par ailleurs, la compagnie travaille actuellement à la mise à jour pour tous ses navires des plans et procédures de remorquage d’urgence, conformément aux réglementations internationales.
CMA CGM a également équipé ses grands navires du système d’aide à la navigation Octopus destiné à prévenir les risques de roulis paramétrique, surf, etc.
Actuellement, deux de ses porte-conteneurs (un 9 400 EVP et un 13 800 EVP) sont équipés des jauges de contrainte et accéléromètres, dans le cadre de projets de recherche avec les chantiers et le Bureau Veritas.