Transport illicite d’armes: CMA CGM poursuivie par la malchance?

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Et de trois: des machines nord-coréennes susceptibles de fabriquer des armes ou munitions transbordées sur un navire d’ANL à destination de l’Iran (JMM du 4/9/2009, p. 5); 13 conteneurs shipper’s owned chargés à Bandar Abbas d’armes et munitions iraniennes découvertes au Nigeria (JMM du 12/11/2010, p. 4); et maintenant trois conteneurs de « lentilles » explosives chargés en Syrie à bord du Victoria intercepté par la marine israélienne la semaine dernière. L’histoire bégaie de façon préoccupante pour le 3e transporteur mondial conteneurisé.

« À ce jour, notre responsabilité n’a jamais été mise en cause », répond Pierre de Saqui de Sannes (2s), ancien gouverneur militaire de Marseille, depuis trois ans et demi conseiller institutionnel France, Afrique et Moyen-Orient de CMA CGM. « En ce qui concerne les machines nord-coréennes, les États concernés continuent de s’interroger sur leur nature et leur usage précis. Au Nigeria, nous avons montré à l’ambassade à Paris tous les documents en notre possession et notamment ceux exprimant notre refus de transborder les boîtes, conformément à la législation nigériane. C’est la douane qui nous a finalement donné son accord pour transborder. Au même moment, les services de sécurité du pays ont demandé à inspecter les conteneurs. Il s’agit là d’un dossier interne au Nigeria. Nous n’avons d’ailleurs pas versé un schilling d’amende. Le Victoria a été libéré quelques heures après avoir été inspecté par les autorités israéliennes. Elles ont simplement exigé que nous renoncions par écrit à toute action juridique contre Israël compte tenu du lieu où a eu lieu l’interception. Plus généralement, quel que soit le registre d’immatriculation de nos navires, nous coopérons pleinement et en toute transparence avec le secrétariat général de la Défense et de la sécurité nationale (sous l’autorité du Premier ministre, ndlr). Nous sommes même demandeur d’informations de la part des services de renseignements mais ces derniers peuvent ne pas être enthousiastes à l’idée de nous en donner. On peut craindre que pour un transport illicite d’armes, il puisse être plus judicieux de le laisser se réaliser afin de tenter d’identifier le destinataire. Notre premier acte de coopération consiste à respecter tous les embargos: celui de l’ONU, des États-Unis et de l’UE. Ces embargos sont matérialisés par l’existence d’une liste de noms d’entreprises ou de personnes physiques avec lesquelles il est interdit de travailler. Cette liste est intégrée dans notre système informatique qui vérifie, lors du booking, que l’identité du chargeur ne pose pas de difficulté. Nous nous doutons bien que cela est insuffisant. Nous avons donc sensibilisé nos agents à ces problèmes mais dans certains États, être agent maritime n’est pas aussi simple que cela. Ils peuvent être soumis à des pressions. Nous allons donc créer, à Marseille, des cellules chargées de piloter spécifiquement les agences maritimes installées dans les États « à risques » mais, pour d’évidentes raisons, je ne vous donnerai pas de détails sur le pilotage. Nous dépendons de la justesse de la déclaration du chargeur. Un de nos navires a failli brûler dernièrement lorsqu’un conteneur déclaré comme étant chargé de jouets a commencé à exploser avec des feux d’artifice.

JMM: S’abriter derrière la clause said to contain et charger ou décharger en Iran peut paraître un peu audacieux (JMM du 26/11/ 2010, p. 7). Le 8 mars, l’ONG United Against Nuclear Iran vous a demandé par écrit, comme à Mærsk, de cesser vos escales en Iran. Une vingtaine de parlementaires américains était en copie.

Pierre de Saqui de Sannes (P.S.S.): Cesser de faire escale à Dalian, supposé être le port de transbordement des exportations illicites de la Corée du Nord, à Lattaquié où ont été chargés les trois conteneurs d’armes saisis, et en Iran, va finir par poser des problèmes et laisser la porte ouverte à tous ceux qui ont moins de principes à respecter. Nous prônons le respect des réglementations et embargos, pas l’arrêt de tout transport de marchandises vers ces ports.

JMM: Vous n’êtes « que » le 3e transporteur mondial derrière Mærsk et MSC. Ces derniers font rarement l’objet d’une telle couverture médiatique. Or toutes proportions gardées, ils devraient aussi avoir leur lot de fausses déclarations. Sont-ils plus attentifs? Ont-ils plus de chance? Gèrent-ils mieux les médias?

P.S.S.: Posez leur la question. Notre objectif est de minimiser les risques sur nos navires et de poursuivre nos efforts dans la lutte contre le transport de marchandises illicites.

JMM: Dans un autre ordre d’idée, où en êtes-vous de vos réflexions relatives à la protection de vos navires contre les attaques de pirates?

P.S.S.: Douze attaques depuis le début 2011. Le problème concerne principalement nos « petits » porte-conteneurs qui desservent la côte Est de l’Afrique et non pas les grands qui transitent par le golfe d’Aden. Avant l’été, des décisions seront prises. D’ores et déjà, nous demandons à ce que le personnel en passerelle porte un casque et un gilet pare-balles, car les assaillants n’hésitent pas à tirer. Non, nous n’avons pas expérimenté le canon à eau (voir p. 40).

Libération du Mærsk-Constellation

Le 18 mars l’Agencia AngolaPress a indiqué que les autorités angolaises avaient « libéré le navire américain Mærsk-Constellation qui était empêché de poursuivre sa route dans le port de Lobito pour raison d’irrégularités liées au transport de quatre conteneurs contenant des munitions non-manifestées. Selon un communiqué du ministère des Relations extérieures, à cause de cette irrégularité et malgré le départ du navire, la société Mærsk est tenue responsable en vertu des lois douanières angolaises. […] Le navire a poursuivi sa route avec 23 membres d’équipage, composés de 20 Américains dont le commandant, et trois Polonais. […] Arrivant des États-Unis via Dakar, il a déchargé au port de Lobito (Benguela) des produits alimentaires d’une ONG sud-africaine, Joint Aid Management. »

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