Les 21 et 22 février s’est tenu au siège de l’OIT, à Genève, le « Forum de dialogue mondial sur la sécurité dans la chaîne d’approvisionnement concernant le remplissage des conteneurs ». Son objectif est de proposer des recommandations sur l’adoption d’une approche commune tout au long de la chaîne logistique pour l’application correcte des normes appropriées et des bonnes pratiques en matière d’empotage des conteneurs et activités de suivi.
Pour alimenter le débat, les représentants des employeurs, des employés et des gouvernements disposaient d’un rapport d’environ 70 pages (hors annexes) qui a tenté de présenter l’importance du problème, que cela soit en transport terrestre (route et fer) ou maritime: la multiplicité des règles qui ne sont pas nécessairement convergentes; quelques solutions trouvées ici et là pour sensibiliser les chargeurs directs ou les groupeurs au problème de l’arrimage correct de la marchandise dans le conteneur, respectant à la fois les normes routières et maritimes ainsi que le centrage approprié des poids; les besoins de formation.
Première constatation: il n’existe aucune consolidation des données sur les accidents impliquant des conteneurs à l’échelle d’un continent, encore moins au niveau mondial. Seuls les accidents graves et maritimes « bénéficient » d’une certaine publicité. L’importance du phénomène n’est donc pas à ce jour mesurée. Pire, l’efficacité des efforts qui pourraient être faits pour améliorer la situation ne pourrait pas être mesurée. Le rapport propose donc de réfléchir à la nécessité de mettre en place une base de données internationale sur tous les accidents. Cela fait penser à la fugace proposition du directeur général du Cesam qui proposait à ses adhérents de mettre en place une banque mondiale de données sur la position des conteneurs afin d’évaluer l’étendue de leurs risques (JMM du 20/3/2009, p. 13). Avec les futurs 18 000 EVP de Mærsk Line, il y aurait de quoi réveiller l’intérêt des assureurs facultés et coque et de leurs réassureurs en matière d’accumulation de valeurs.
Le rapport commandé par l’OIT note également que, compte tenu de l’importance de la Chine dans le commerce maritime conteneurisé, il y a lieu de vérifier que ses nombreux chargeurs largement dispersés dans un territoire immense appliquent l’intégralité des directives sur les bonnes pratiques. Il souligne cependant que la Chine « n’est naturellement pas le seul pays où les règles en matière d’empotage ne sont pas respectées et où des cargaisons sont mal arrimées […] ».
Autre cible de la sensibilisation aux bonnes pratiques: les PME. « Il est généralement admis que les entreprises qui tireraient le plus grand profit de l’accès aux directives sur les bonnes pratiques sont pour l’essentiel de petites entreprises, sans grande expérience des contraintes et des forces subies par les conteneurs, qui sont disséminées dans le monde entier, communiquent dans des langues différentes et ne peuvent pas compter sur l’appui d’associations professionnelles ».
L’empotage pour les nuls
Pour agir efficacement sur cette population, sans oublier les grands groupes ni les groupeurs, il faut concevoir des programmes de sensibilisation et de formation simples et facilement accessibles. Le rapport souligne la pertinence des vidéos réalisées par l’UK P&I intitulées « Any fool can stuff a container », officiellement traduit de façon politiquement correcte par « N’importe qui peut remplir un conteneur ». Pas complètement naïfs, les auteurs du rapport recommandent la mise en place d’un contrôle. Deux solutions sont à examiner:
– le contrôle des boîtes par les compagnies maritimes et les gestionnaires de terminaux;
– une législation « contraignante » pour les chargeurs prévoyant la remise obligatoire d’un certificat d’empotage avant chargement, aux compagnies maritimes et manutentionnaires. Le rapport ne dit pas qui emettrait ce certificat? Un tiers ou le chargeur lui-même?
L’ITF lance une campagne de sensibilisation aux dangers des conteneurs mal empotés
Le 14 février, afin de préparer le forum de l’Organisation mondiale du travail sur les dangers que présente un conteneur maritime mal empoté, la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) a appelé ses adhérents nationaux à mener des actions de sensibilisation auprès des décideurs et/ou acteurs publics et privés. Conteneurs en surpoids, mal arrimés ou ne disant pas contenir des marchandises dangereuses sont autant de dangers pour les travailleurs. C’est la première fois que ce dossier sera réellement abordé au niveau international, souligne l’ITF.
« Jusqu’ici les guides de bonnes pratiques et l’autorégulation n’ont pas été en mesure de mettre un terme aux plus graves accidents. C’est la raison pour laquelle nous recommandons la mise en place d’obligations internationales afin que ceux qui manutentionnent ou transportent des conteneurs connaissent leurs poids, la nature de l’emballage, la qualité du saisissage, la position du centre de gravité, l’existence ou non de produits dangereux », a expliqué le secrétaire général de l’ITF, David Cockroft. Voilà un ancien dossier qui devrait donc trouver rapidement une solution efficace. En effet, si l’on en juge par l’action conjointe du World Shipping Council et de l’International Chamber of Shipping demandant à l’OMI de mettre en place une réglementation obligatoire relative à la vérification des poids de conteneurs avant embarquement (JMM du 10/12/2010, p. 5), les compagnies maritimes sont sur la même longueur d’onde. Il n’y a donc qu’à conclure vite et bien, en mai prochain, lors du 89e comité de la sécurité maritime de l’OMI, ainsi le souhaitent le WSC et l’ICS.