Sentence 1172 du 3 février 2010

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Un contrat de transport de minerai de fer d’environ 8 cargaisons par an pendant 5 ans, par navires de gros tonnage, a été signé en 2003. L’exécution de ce contrat s’est déroulée sans incident jusqu’à la fin de la quatrième année.

Pendant cette période, les taux de fret et de surestaries pratiqués sur le marché libre des frets ont évolué à la hausse pour atteindre la quatrième année des niveaux jusqu’à cinq fois supérieures aux taux contractuels, le prix des combustibles des navires ayant de son côté subi une augmentation de même ampleur. Ces conditions défavorables aggravées par une congestion portuaire, des hausses importantes des frais de port et de ses propres frais généraux ont très lourdement, pour l’armateur, amputé les résultats escomptés du contrat.

Confronté à ces bouleversements économiques sans précédent, il a estimé légitime de demander, dans les conditions de la charte-partie, l’application de la clause dite de « hardship ».

Cette clause de sauvegarde prévoit qu’au cours du contrat des événements notamment de type économique, non prévus par les parties à la date de conclusion du contrat, peuvent survenir et en affecter l’exécution en créant soit un avantage excessif pour une partie, soit un préjudice sérieux pour l’autre partie. Selon cette clause, si une partie invoque une situation de hardship, les contractants doivent se rencontrer dans les 30 jours et chercher une solution appropriée à la protection de leurs intérêts respectifs et pour la continuation du contrat.

Une réunion a eu lieu dans les conditions prévues par clause, mais n’a pas permis d’arriver à un accord.

L’armateur a décidé de réclamer en arbitrage la réparation de son préjudice sur l’ensemble des voyages contractuels.

L’affréteur a contesté la validité de la demande d’arbitrage au motif qu’elle ne lui permettait pas d’identifier les filiales défenderesses et s’est abstenu de verser à la Chambre arbitrale maritime de Paris les consignations demandées. Sur le fond il a plaidé l’absence d’une situation de hardship.

Les arbitres ont jugé que la clause dite de « hardship » est une clause de sauvegarde et qu’elle fait obligation aux co-contractants de se rencontrer et de rechercher une solution.

Ils soulignent, par contre, que cette clause est muette sur les conséquences d’un échec des pourparlers. Il n’est donc pas dans les pouvoirs des arbitres de se substituer aux parties pour modifier des clauses contractuelles. Le collège arbitral considère que la renégociation a été conduite de bonne foi.

Sur les effets d’une possible situation de « hardship », les arbitres précisent qu’ils ne pourraient concerner que la période du contrat postérieure à la notification formelle de la situation de « hardship » par la partie concernée et que cette clause ne peut avoir d’effet rétroactif pour concerner l’ensemble des voyages du contrat.

Sur l’éventuelle existence d’une situation de « hardship » les arbitres ont jugé que les parties étaient des professionnels avertis des contrats maritimes et qu’ils ont nécessairement pesé leurs risques avant de contracter. En signant un contrat de 5 années, l’Armateur devait prendre en compte les possibles augmentations de ses coûts d’exploitation et des frais de port. De telles augmentations mêmes importantes ne sont pas constitutives d’une situation de « hardship ».

Les arbitres soulignent également qu’un éventuel rééquilibrage du contrat ne peut, en aucun cas, être recherché par comparaison avec les taux pratiqués sur le marché des frets puisque le but même du contrat était précisément d’échapper aux aléas dudit marché.

Enfin, l’Armateur avait la possibilité de rechercher sur la durée du contrat une couverture à terme des soutes consommées par ses navires afin de se mettre à l’abri d’un éventuel choc pétrolier et que c’est délibérément, après y avoir songé, qu’il a décidé de ne pas couvrir ce risque.

Les arbitres ont, en conséquence, jugé que les éléments constitutifs d’une situation de « hardship » ne sont pas réunis en l’espèce et ont rejeté la totalité de la demande de l’Armateur.

Ils ont néanmoins jugé que la demande d’arbitrage était valablement formulée et que l’Affréteur ne pouvait pas, de bonne foi, exciper d’un changement de noms et d’adresse de sa société et de ses filiales depuis la signature du contrat pour prétendre que la demande d’arbitrage était nulle et en tirer argument pour refuser à plusieurs reprises de déposer les consignations demandées.

Les arbitres ont jugé qu’il avait ainsi violé le règlement de la Chambre arbitrale maritime de Paris et ont condamné l’affréteur à régler 50 % des frais de l’arbitrage. Ils ont pour la même raison décidé de ne pas lui accorder les sommes demandées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

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