Fin d'année chargée pour le Bureau d'enquêtes sur les événements de mer qui a diffusé son 3ème rapport sur des incidents/accidents mettant en cause des navires marchands.
Le pétrolier chimiquier norvégien Doris de 140 m h.t. construit en 1998, « parfaitement entretenu », est en approche du port de Lorient, le 3 avril à 4 h 30, pilote à bord. La visibilité est médiocre, voire nulle.
Après avoir envisagé, dans un premier temps, de gagner un mouillage d'attente, il est in fine décidé d'embouquer la passe Ouest. Le commandant (59 ans ; 13 ans de commandement) prend lui-même la barre manuelle, note le BEAmer.
À la hauteur de la bouée A8, « une erreur dans l'exécution d'un ordre de barre amène le navire à s'écarter de sa route et à heurter, par son tribord, la bouée « Écrevisse » dont la chaîne de mouillage s'enroule autour du moyeu de l'hélice, le corps-mort en béton endommageant également le gouvernail. Dès lors, le navire devient très difficile à gouverner.
À la hauteur de la bouée du Pot, il talonne, sans gravité toutefois.
Il est pris en charge par le remorqueur portuaire Scorff, prépositionné conformément à la réglementation en vigueur.
Le Doris accoste enfin au port de Lorient, non sans difficultés. Un barrage déployé à l'arrière contient une pollution de faible ampleur. Le facteur déterminant de l'incident est, selon le BEAmer, l'organisation du travail en passerelle : le fait que le commandant soit lui-même à la barre est jugé « surprenant et contraire aux pratiques. En effet, étant donné que le commandant est responsable du navire en toutes circonstances, le fait de tenir la barre ne lui permet pas d'assumer ce rôle. De plus, ni l'officier de quart (qui était le second capitaine, lui aussi norvégien), ni le matelot (philippin) n'assurent de contrôle sur le commandant timonier.
En outre, contrairement aux usages, les indications de barre du pilote ne sont pas répétées mais seulement acquiescées, ce qui ne permet pas à ce dernier d'avoir la certitude que les ordres sont bien compris et donc correctement exécutés », note le BEAmer.
La topographie du chenal d'accès au port de Lorient et sa largeur limitée sont retenues comme facteur aggravant en cas d'avarie ou d'écart de route. De plus « la décision prise d'entrer le navire, par conditions de visibilité fortement réduite à nulle constitue un facteur potentiellement aggravant des conséquences de l'événement dans la mesure où le bord ne s'est pas immédiatement rendu compte qu'il avait touché la bouée ».
La brume épaisse est retenue comme étant un facteur conjoncturel « ayant pu jouer un rôle dans la survenance de l'événement ».
sans surprise
Le BEAmer recommande :
- « aux armateurs, de doter leurs navires des documents cartographiques, sous forme électronique ou papier, nécessaires pour les navigations envisagées ; et
de rappeler aux commandants de mettre en place une organisation de passerelle leur permettant d'exercer leur responsabilité et de ne pas prendre eux-mêmes la barre en eaux resserrées.
- Aux pilotes maritimes et aux capitaines, de respecter en passerelle les procédures normalisées de transmission des ordres ».
Déchargé, le Doris a été remorqué jusqu'à Rotterdam pour y être réparé. Il a repris son exploitation à la mi-juin.