Dans son Livre Blanc du 12 septembre 2001, la Commission européenne propose un programme d'action autour de quatre axes : le rééquilibrage des modes de transport, la suppression des goulets d'étranglement, la place des usagers au coeur de la politique des transports et la maîtrise des effets de la mondialisation des transports. Au travers de ces mesures qui se déclinent par des actions plus précises sur les différents modes de transport, il est intéressant de dresser un premier bilan de ce document. Le 20 novembre, une conférence s'est tenue à Bruxelles, sur un bilan de cette politique des transports. Lors de son discours d'ouverture, le commissaire européen aux transports, Antonio Tajani, a rappelé les grandes lignes de la politique des transports des prochaines années : « décarbonation des transports, promotion de l'Europe des citoyens et donner de nouvelles sources de croissance et de compétitivité. » Cette conférence a clos la réception par la Commission de tous les avis sur une future politique européenne des transports pour les 20 prochaines années. Ces mesures devraient être discutées lors du conseil des ministres européens des transports.
Parmi les principales mesures du Livre Blanc de 2001 figurent en bonne place les questions maritimes. Le document de la Commission proposait de se doter de « règles renforcées sur la sécurité maritime allant au-delà de celles qu'elle a proposées après la catastrophe de l'Erika. » Sur ce point, les différents paquets sur la sécurité maritime adoptés depuis lors, ont largement contribué au niveau continental à cet objectif. Le premier paquet sur la sécurité maritime, entré en vigueur le 22 juillet 2003, comprend trois volets : le contrôle par l'État du port afin d'augmenter le nombre de navires contrôlés, l'uniformisation des méthodes de travail des sociétés de classification et le retrait des pétroliers à double coque. Le second paquet comporte aussi trois séries de mesures : la création de l'Agence européenne de sécurité maritime (dont l'inauguration a eu lieu en septembre 2006), l'obligation pour les États membres de mettre en place un dispositif de surveillance de trafic et de définir des lieux de refuge et, enfin, la création d'un mécanisme de remboursement et de compensation aux victimes des marées noires, qui ne sera finalement pas adopté. Enfin, le troisième paquet sur la sécurité maritime prévoit la responsabilité des États du pavillon, la modification des directives sur les sociétés de classification, le contrôle par l'État du port, le suivi du trafic, une directive sur les enquêtes après accident, la responsabilité civile des propriétaires de navires et l'indemnisation des dommages aux passagers. Au final ces trois ensembles réglementaires s'inscrivent dans le droit fil du Livre blanc sur la sécurité maritime. Autre point, entrant dans le cadre de la sécurité maritime, la mise en place, préconisée dans le document de 2001, d'un système européen de gestion de trafic. Les différents États côtiers ont commencé à déployer leur système de surveillance maritime. L'intégration de tous ces systèmes au niveau européen n'est pas encore réalisée. La sécurité est aussi affaire de social. Dans son texte, la Commission a demandé la mise en place de règles sociales à intégrer lors des contrôles. Si les pays membres de l'Union ont adopté la convention des Nations unies sur les droits des navigants, leur intégration dans les contrôles par l'État du port n'est pas entièrement entrée dans les moeurs.
Le guichet unique
En 2001, les autoroutes de la mer ont occupé une place dans ces « choix du transport en Europe ». La création de ces « autoroutes de la mer » doit se faire dans le « cadre d'un schéma directeur du réseau transeuropéen. Cela suppose une meilleure connexion des ports avec le réseau ferroviaire et fluvial et une amélioration de la qualité des services portuaires », note le Livre blanc de 2001. Le sujet reste toujours d'actualité. Si des liaisons existent, elles n'ont pas toujours eu le caractère d'autoroute de la mer au sens européen du terme. En dix ans, les souhaits de la Commission se font de plus en plus pressants mais les applications ont bien du mal à voir le jour et surtout à se pérenniser. La mise en place de ces liaisons maritimes devaient aussi se combiner avec le transport fluvial, jugé plus à même à répondre rapidement à une demande de transport que des infrastructures ferroviaires souvent défaillantes, selon la Commission. Les combinaisons entre fleuve et mer sur des liaisons intracommunautaires restent une exception aujourd'hui. En 2001, l'autorité européenne imaginait déjà le concept de « guichet unique » pour toute la chaîne logistique intégrant fer, fleuve et maritime. Elle demandait la mise en place d'embranchements fluviaux, dont VNF est défenseur et promoteur. Venait aussi l'harmonisation des prescriptions techniques et sociales des unités fluviales en Europe. Une longue marche entamée mais qui n'est pas encore finie.
La création du programme Marco Polo
Dans son texte de 2001, l'UE a annoncé la création du programme Marco Polo, destiné à financer des « initiatives innovatrices (...) visera à faire de l'intermodalité plus qu'un simple slogan, mais une réalité compétitive et économiquement viable. » Tous les ans, le programme Marco Polo aide ces initiatives mais sur une durée courte. La pérennité de ces expériences repose principalement sur une volonté industrielle qui tient, pour sa part, sur des considérations plus financières que politiques.
Le Livre blanc de 2001 dresse aussi un catalogue d'infrastructures à réaliser dans les prochaines années pour désengorger les routes. Il s'agit soit d'améliorer des liaisons existantes, soit de créer de nouvelles routes fluviales, ferroviaire ou routière, soit encore de prévoir l'arrivée des nouveaux États membres d'Europe orientale. Ce réseau transeuropéen qui comprend plusieurs projets sur le territoire français, avec notamment le canal à grand gabarit Seine-Escaut ou les liaisons ferroviaires transalpines et transpyrénéennes, reste en suspens. En 2004, la commission a présenté une révision de ce réseau avec l'intégration des autoroutes de la mer. Le nerf de la guerre demeurant toujours sur le financement, la Commission a imaginé dès 2001 une « mutualisation des revenus des redevances d'infrastructure. » La faible mobilisation des budgets nationaux et les limites du partenariat public/privé ont obligé l'autorité européenne à se tourner vers des solutions nouvelles. L'idée étant d'affecter à des infrastructures plus respectueuses de l'environnement les recettes tirées des ouvrages de la région. Elle donne un exemple avec l'affectation des recettes de la taxation des poids lourds pour la construction d'infrastructures ferroviaires dans les Alpes.
Autre sujet abordé dans ce Livre blanc, le domaine portuaire devait subir un lifting. Un projet de directive sur les services portuaires était déjà en préparation. Il ne sera pas adopté. L'objectif de ce texte était d'instiller de la transparence dans l'accès aux services portuaires et d'éviter que les autorités portuaires ne deviennent juge et partie. C'est au regard des principes généraux de transparence et d'efficacité portuaire que le gouvernement français lancera en janvier 2008, sa réforme de l'organisation portuaire. D'autres pays suivent le mouvement avec des projets en Italie et en Espagne pour coller au mieux à ces principes en prenant en considération les particularités locales.
Ce document préconise d'autres actions, notamment sur le transport routier. L'objectif de la Commission est avant tout de permettre aux autres modes de transports d'avaler la croissance des transports pour limiter le routier à sa frange nécessaire. En outre, le document de la Commission de 2001 met l'accent sur la sécurité routière et la sécurité dans les tunnels, en réponse à l'accident du Tunnel du Mont Blanc. Sur le routier, l'harmonisation de la fiscalité des carburants et le rapprochement tarifaire des infrastructures avec la prise en compte des coûts externes a fait son apparition. Ces deux points sont toujours en discussion.