La réforme portuaire montre un visage particulièrement contrasté à Marseille-Fos. Si, sur les bassins Ouest tout semble sourire, les professionnels pleurent au contraire à l'Est. Sur le premier site, le trafic conteneurs s'envole (+21 % sur 7 mois) et les portiqueurs CGT du GPMM ont fait preuve depuis le début d'un vrai sens de la realpolitik. Dans les bassins traditionnels, c'est la catastrophe. Il a fallu un an de conflit qui a continuellement perturbé le terminal conteneurs de Mourepiane (-31 % sur 7 mois) pour parvenir à un accord de principe. L'encre de l'entente n'avait pas fini de sécher que l'Algérie décidait de freiner ses importations, plongeant un peu plus les bassins Est dans le marasme économique...
« Chaque fois qu'on croit s'en sortir, un événement nous fait replonger. Si ça continue, la réforme portuaire sera bientôt le cadet des soucis ». Ce professionnel portuaire marseillais, plutôt spécialisé dans le trafic avec l'Algérie, ne cherche plus à masquer son abattement. Début juillet, ce dernier se montrait pourtant optimiste en confirmant une reprise dans les affaires sur la Méditerranée. Fin juillet, il était enchanté. Les portiqueurs CGT de Mourepiane avaient fini par accepter un accord avec la direction du GPMM au bout d'un an de conflit douloureux. « Puis à partir du 15 août, cela a été le trou. Les bassins Est sont devenus un désert ». Les terminaux rouliers ont mal encaissé le changement des règles d'importation imposé par le gouvernement algérien.
Bassins Est : l'hémorragie de l'activité
Des armements au transitaire en passant par les manutentionnaires (Intramar, Socoma et Marseille Manutention), le coup de frein a été particulièrement brutal. La moitié environ du tonnage habituel se serait évaporée au soleil d'août. Et que des armements qui desservaient Mourepiane (CMA-CGM, Turkon lines, Borchard et Contenemar) se refusent toujours à quitter Fos où leurs navires ont trouvé refuge.
Du coup, les professionnels commencent à douter : le transfert des agents du GPMM vers Intramar (société dans laquelle le GPMM devrait prendre 30 % des parts) sera t-il fondé économiquement ? Il devait pourtant s'effectuer à minima : une quarantaine d'agents conducteurs d'engins, soit la totalité du contingent et une vingtaine d'agents de maintenance, soit un peu moins de la moitié des effectifs. Ce serait, suivant l'accord convenu avec la CGT locale, une soixantaine d'agents qui devraient rejoindraient les 71 dockers d'Intramar. Mais en pleine hémorragie des trafics. Côté matériel, le manutentionnaire a proposé le rachat de quatre portiques sur les cinq qui équipent Mourepiane et d'une grue sur rail pour le trafic du sucre.
Bassins Ouest : de grandes perspectives
Dans les bassins Ouest, la situation présente une meilleure perspective. Une section CGT du GPMM s'est créée à partir du constat des divergences apparues avec les agents des bassins Est. Et une union sacrée s'est réalisée avec la section CGT des dockers. Sur le papier, une soixantaine d'agents de maintenance et 75 de conduite devraient être transférés sur les trois terminaux des bassins Ouest : Carfos (Sea Invest) et Stockfos pour les terminaux minéraliers et des Tellines, Eurofos et Seayard pour le terminal de Graveleau. Des chiffres à compléter par les 250 agents des terminaux pétroliers de Fos-Lavéra qui seront dirigés vers une filiale contrôlée à plus de 51 % par le GPMM. La mise en opération de Fos 2XL annoncée pour début 2011 offre un gage de développement. Confirmé par le probable mariage entre les deux opérateurs de manutention, Eurofos (MGM) et Seayard. Pour le terminal conteneurs de Fos (Graveleau), ces derniers ont établi une offre commune sur six portiques et un autre en option ; les deux autres portiques de ce terminal n'ayant pas retenu leur attention. Le terminal minéralier où Carfos (Sea Invest) a déclaré son intérêt pour un portique et un chargeur. Toujours avec Carfos, le terminal céréalier des Tellines verrait basculer un portique, une grue et des bandes transporteuses.
Sur l'ensemble du port, la réforme se traduirait donc, si tout se passe bien, par le transfert de quelque 200 agents du GPMM vers la manutention et autant vers la filière pétrole. L'établissement public compte aujourd'hui 1500 salariés. Chiffres auxquels il faut rajouter le rachat d'une quinzaine d'engins de levage, si la Commission nationale d'évaluation donne son feu vert.