Après que les quatre groupes de travail aient travaillé à huis clos le matin sur les propositions sensées nourrir le Grenelle de la mer, près de 300 personnes ont assisté, l'après-midi du 23 juin à Brest, aux courtes présentations des synthèses avant de poser des questions et de faire part de leurs idées sur la question. Autant dire que les nombreux sujets abordés avaient un air d'inventaire à la Prévert qui passait du coq à l'âne en mélangeant de multiples approches dans la bouche d'intervenants aussi critiques que frustrés. « L'État, à l'origine de ce Grenelle de la mer, doit surtout cesser de supprimer des emplois dans les métiers maritimes » a rugi un syndicaliste. « Nous avons des propositions à vous faire, des mesures à appliquer dès maintenant » ont vivement souligné d'autres intervenants. Alain Malardé, de la Confédération maritime, a ainsi insisté sur le besoin d'unifier les moyens de l'État en mer pour leur donner de la force. « Quatre administrations de quatre ministères différents, c'est complètement incohérent », a-t-il souligné, faisant remonter le vieux débat sur les garde-côtes. Un représentant de Bretagne vivante a abondé en ce sens en demandant « un audit national sur les moyens de surveillance et de contrôle ».
Devant un public passionné, à défaut d'être toujours très averti, le préfet maritime de l'Atlantique, Anne-François de Saint-Salvy, a tempéré la vivacité de certains propos. « Il ne faut pas oublier que le temps de la mer est différent de celui de la terre et qu'il faut un certain temps de réflexion et d'application. »
Le coup de gueule du président de Région
Deux réactions majeures ont émaillé ce Grenelle de la mer brestois. Celui de l'ancien ministre de la Mer (1981 à 1983) Louis le Pensec d'abord, qui a jugé « anormal que, pour 555 000 km2 de terre, la France compte 40 ministres mais pas un seul spécifiquement mer pour nos 11 M de km2 marins. C'est une aberration numérique et politique, a-t-il commenté et précisant que cela le confortait dans l'idée qu'il faut, au gouvernement, un Monsieur ou une Madame Mer pour jouer un rôle de vigie ou de poil à gratter chaque fois que les questions maritimes sont oubliées. » Celui du président de la Région Bretagne, Jean-Yves Le Drian, ensuite, qui a très sérieusement mis en cause le bien-fondé de ces assises régionales en fustigeant la décision surprise, et sans aucune concertation, de transférer la Direction régionale des Affaires maritimes de Rennes vers Nantes. « À quoi sert que nous parlions de gouvernance de la mer, l'un des thèmes de ce Grenelle, quand on se voit imposer une décision aussi incohérente ? a-t-il lancé aux représentants de l'état. J'ai le sentiment d'avoir reçu une gifle. On a vexé la Bretagne. Cette décision est incohérente sur le plan symbolique car la Bretagne, première région maritime européenne, avec plus de 50 % des inscrits maritimes français, va se trouver privée d'une administration. Elle est également incohérente sur le fonds. À quelle logique répond ce transfert alors que la préfecture maritime est à Brest et que les Cross d'Etel et de Corsen sont en Bretagne et que le préfet de la zone Ouest de défense est à Rennes ? » Pour lui, c'est à Brest que cette direction régionale aurait due être implantée, à proximité immédiate de la préfecture maritime.