Sommaire des sentences 1151 à 1152

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Un navire est affrété au voyage pour transporter une cargaison de blé entre un port allemand et un port Libyen. À l’arrivée sur rade au port de déchargement, le navire remet son avis de mise à disposition. Un échantillon de la cargaison est prélevé à bord pour analyse de radioactivité, l’agent indiquant que l’accostage aura lieu après résultat de l’analyse. Le lendemain, l’analyse est négative, mais les conditions météorologiques se sont détériorées et le navire doit attendre plusieurs jours sur rade avant d’aller à quai. L’affréteur italien demande ensuite de ne pas décharger sans instruction de sa part; trois jours après, autorise le déchargement mais c’est le chargeur allemand qui, n’étant pas payé de sa marchandise, intervient à son tour pour retarder le déchargement qu’il accepte finalement quelques jours plus tard.

Le demandeur au 1er degré était le fréteur qui réclamait des surestaries alors que l’affréteur estimait que du despatch money était dû.

Avant toute défense au fond, l’affréteur soulevait l’incompétence de la C.A.M.P. en s’appuyant sur l’article 2 du règlement communautaire no 44/2001 du 22 décembre 2000 qui dispose que les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre sont attraites devant les juridictions de cet État membre et sur la Convention de New York qui prévoit la reconnaissance de la clause compromissoire écrite insérée dans un contrat ou un compromis signés par les parties, or la charte-partie n’était signée par aucune des parties.

Sur le fond, les parties s’opposaient sur deux points: le décompte du temps pendant l’attente sur rade et le décompte du temps pour le retard consécutif à l’intervention du chargeur.

Pour le fréteur, le temps d’attente sur rade avait été délibérément retardé par l’affréteur pour des raisons commerciales, en témoignait le fait que l’affréteur avait demandé après l’accostage de ne pas décharger cependant que l’affréteur contestait la validité de la notice remise sur rade, alors que le poste de déchargement était libre, et s’appuyait sur l’état des faits pour mettre en avant les conditions météorologiques qui avaient empêché le navire d’accoster tout en soutenant que, s’il l’avait voulu, le capitaine aurait pu cependant venir à quai en venant chercher le pilote dans l’avant-port, ce qu’il s’était refusé à faire.

Sur le retard à décharger à la suite de l’intervention du chargeur, le fréteur prétendait que le connaissement ne lui ayant pas été présenté, il n’avait pas voulu prendre le risque de décharger la marchandise en fraude des droits du chargeur et engager ainsi sa responsabilité alors que l’affréteur faisait valoir que la charte-partie prévoyait précisément que la marchandise pourrait être remise sans présentation du connaissement en échange d’une lettre de garantie signée de l’affréteur suivant le modèle fourni par le P and I du fréteur, que cette lettre de garantie lui avait été délivrée, qu’ainsi le fréteur avait violé une des dispositions de la charte-partie et qu’en conséquence le décompte des staries devait être interrompu.

Dans sa décision, le Tribunal arbitral a d’abord écarté l’exception d’incompétence soulevée par l’affréteur car, d’une part, le règlement communautaire exclut spécifiquement l’arbitrage de son champ d’application et, d’autre part, même si la charte-partie n’a pas été signée, ce qui est de pratique courante, son exécution par les parties ne laissait planer aucun doute sur la réalité du contrat, le modèle de charte-partie incluant la clause d’arbitrage ayant été proposé par l’affréteur lui-même.

Pour déterminer le début des staries, le Tribunal arbitral s’est appuyé prioritairement sur l’état des faits signé par le capitaine et l’agent désigné par l’affréteur et secondairement sur les autres documents versés par les parties au dossier. Il a déterminé que le jour de l’arrivée sur rade le temps était suffisamment maniable pour permettre au navire de venir à quai et qu’il apparaissait clairement que l’accostage avait été volontairement retardé au moins jusqu’au résultat de l’analyse. Le fait que le poste de déchargement était non occupé ne le rendait pas pour autant disponible pour le navire ce qui autorisait le capitaine suivant la charte-partie à donner son avis de mise à disposition sur rade.

Pour les jours suivants, l’état des faits indiquait que le port était fermé en raison du mauvais temps. Le Tribunal a rappelé que l’obligation faite à l’affréteur de mettre à disposition du navire un poste de déchargement est une obligation fondamentale de la charte-partie et qu’en contrepartie, le fréteur s’oblige à se rendre au poste désigné. Comme l’a déjà jugé une jurisprudence de la C.A.M.P., si l’empêchement n’est pas de son fait, le risque de ne pas pouvoir entrer au port pour des raisons nautiques ou météorologiques n’a pas à être supporté plusieurs fois par le navire. En l’espèce, pour des raisons qui leur étaient propres l’affréteur ou le réceptionnaire avaient décidé de ne pas faire entrer le navire le jour de son arrivée, ils devaient donc supporter les conséquences du mauvais temps qui, selon l’état des faits, avait ensuite empêché le navire d’accoster, le temps d’attente sur rade comptant comme staries.

Sur l’attente à quai en raison de la demande du chargeur, le Tribunal a donné raison à l’affréteur qui avait remis la lettre de garantie dans les termes prévus par la charte-partie et qui en outre était nommé au connaissement comme mandant du chargeur allemand en considérant que ce dernier ne pouvait se montrer plus exigeant que celui pour le compte duquel il agissait. Le temps ainsi perdu a donc interrompu le décompte des staries. Le Tribunal arbitral a établi une feuille de temps aboutissant à un montant de surestaries dû par l’affréteur mais d’un montant moindre que celui réclamé par le fréteur. L’affréteur avait par ailleurs formulé une demande de dommages intérêts en raison d’une saisie sur ses comptes bancaires en USD à la demande du fréteur pour sûreté de la somme allouée par les arbitres au premier degré, au motif que cette saisie était abusive et vexatoire. Le Tribunal arbitral l’a débouté de sa demande considérant que la saisie n’était pas disproportionnée par rapport à l’enjeu du litige et qu’elle pouvait être aisément levée contre remise d’une garantie bancaire. La sentence a alloué au fréteur une somme au titre de l’article 700, partagé pour moitié les frais et honoraires d’arbitrage du premier degré et laissé à la charge de l’affréteur ceux du second degré.

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