Une évidence. L’édition 2019 de la Revue du transport maritime, publiée ce 30 octobre par la Cnuced, n’étonnera à vrai dire aucun professionnel du secteur. Le transport maritime mondial s’est mis en mode ralenti, ajustant sa fréquence sur les nombreuses incertitudes qui ont coagulé ces derniers mois et sur lesquelles il a peu de prises directes. Reflétant le pouls de l’économie mondiale, le secteur a stationné à 2,7 % en 2018, contre 4,1 % en 2017, pour atteindre néanmoins les 11 milliards de tonnes transportées. Le ralentissement n’a immunisé aucun segment du fret maritime, embarquant la manutention portuaire, dont le débit a perdu deux points entre 2017 et 2018, de 6,7 % à 4,7 %.
« Le fléchissement de la croissance du commerce maritime résulte de plusieurs tendances, dont l’affaiblissement du système commercial multilatéral et le protectionnisme croissant », a déclaré Mukhisa Kituyi, le secrétaire général de la Cnuced, y voyant « un avertissement que les politiques nationales peuvent avoir un impact négatif sur les aspirations de tous en matière de commerce maritime ».
La liste des décisions politiques qui ont pris en otage les mers et les océans, est longue. Les foucades tarifaires de Donald Trump, les répliques de Xi Jinping, la mise en cale sèche de l’Iran, les demandes de retraits et/ou renégociation de certains traités de libre-échange… ont contrarié la marche des affaires en 2018.
L’escalade des droits de douane entre les États-Unis et la Chine aurait affecté 2 % du volume du commerce maritime mondial, les céréales, le conteneur et les produits sidérurgiques étant les plus touchés.
Les tensions commerciales révèlent cruellement, note le rapport, la dangereuse dépendance du monde à la Chine. En 2018, les importations maritimes en provenance de Chine étaient estimées à un quart du commerce maritime mondial. La Chine bégaie et le monde devient littéralement aphone. La réduction de ses importations de minerai de fer et de charbon a eu in extenso un effet négatif sur le vrac sec, un des deux piliers du commerce maritime mondial avec le conteneur.
Sur le plan de l’exploitation, le secteur vit toujours avec ses vieux démons: son addiction aux EVP dans un contexte pourtant très incertain. Au début de 2019, la capacité totale de la flotte mondiale s’élevait à 1,97 milliard de tonnes de port en lourd (tpl), en hausse de 2,61 %. Les transporteurs de gaz ont connu la plus forte progression (+ 7,25 %), principalement en raison de l’expansion du GNL. Mais la flotte mondiale de conteneurs a également continué d’augmenter (5 %).
Pour autant, l’institution s’attend à ce que le commerce maritime international progresse à un taux de croissance annuel moyen de 3,4 % au cours de la période 2019-2024, tiré par le conteneur (+ 4,5 %), le vrac sec (+ 3,9 %) et le gaz, promis à un bel avenir par des préoccupations environnementales.
« Le visage du transport maritime est en train de changer. Il se caractérise par une nouvelle normalité du fait de la modération de la croissance commerciale mondiale, d’une régionalisation des chaînes d’approvisionnement, du rééquilibrage chinois, des catastrophes naturelles intensifiées, d’une sensibilisation accrue au réchauffement planétaire ». Cette « nouvelle normalité » implique de revoir l’offre, et « les transporteurs semblent avoir abandonné la quête de navires de plus en plus gros ».
Pourtant, selon VesselsValue, le carnet de commandes de méga navires totalise à ce jour 1,2 MEVP, soit une centaine d’unités de plus de 18 000 EVP.
Quant à la « nouvelle normalité » ? La Cnuced considère-t-elle que la part de marché cumulée des 10 principales compagnies de transport maritime de conteneurs, passée de 68 % à 90 % entre 2014 et 2019, en est une ?
110 Md$
Une seule cyberattaque dans 15 ports de l’Asie-Pacifique pourrait coûter 110 milliards de dollars, selon une étude produit par le Centre for Risk Studies de l’Université de Cambridge. 92 % des coûts ne seraient pas aujourd’hui assurés.
